Surveillance d'une statine - L'Infirmière Magazine n° 251 du 01/07/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 251 du 01/07/2009

 

pharmacologie

Conduites à tenir

En France, plus de 3 millions de patients hypercholestérolémiques sont soignés via un médicament de la famille des statines. Ces traitements requièrent un suivi attentif.

OBJECTIFS

La présence en excès de cholestérol dans le sang n'est pas une pathologie en soi. C'est l'augmentation du risque d'accidents cardiovasculaires qui est dangereux pour le patient. Le LDL-cholestérol se fixe sur la paroi de l'artère pour former une plaque d'athérome (1), qui va croître et former un rétrécissement artériel. Plus le taux de cholestérol est haut, plus le risque d'accident cardiovasculaire par obstruction des artères est important.

Le traitement de l'hypercholestérolémie repose, dans un premier temps, sur la mise en place d'un régime sévère afin de diminuer les apports en cholestérol. Lorsque ce régime s'avère insuffisant, il sera institué, en complément du régime, qui sera maintenu, un traitement par une statine, médicament hypocholestérolémiant. Les statines diminuent la production de cholestérol par le foie en inhibant des enzymes (HMG-CoA réductase...) nécessaires à la fabrication du cholestérol. Ils diminuent le LDL-cholestérol (mauvais cholestérol).

DÉMARCHE DE SURVEILLANCE

Vérifier la prescription :

- L'utilisation du dosage élevé n'est pas autorisée chez la personne âgée après 70 ans en raison de l'importance des risques musculaires.

- Absence d'interactions : les fibrates (autre famille d'hypolipémiant) augmentent le risque musculaire. L'itraconazole, le kétoconazole, la delavirdine, les anti-protéases ou encore le jus de pamplemousse augmentent les concentrations des statines.

- Contre-indication si le patient présente des antécédents d'insuffisance hépatique ou rénale grave.

Vérifier le suivi du régime. Le régime alimentaire est hypolipémiant et il doit être sévère. Un régime bien mené peut faire diminuer de 10 à 15 % le cholestérol total, ce qui représente une diminution de l'ordre de 0,2 à 0,3 g/l.

Aliments déconseillés :

- Éviter les graisses, ainsi que les aliments riches en cholestérol : jaune d'oeufs, abats (cervelle, rognons, foie), lard, saindoux. Éviter le beurre, la crème fraîche, les fromages à pâte dure (emmenthal, gruyère...), fromage gras (bleus, roquefort, chèvre...). De plus, le homard, les crustacés, les oeufs de poissons (dont le caviar), les noix ou encore les amandes sont à déconseiller.

- Limiter les aliments riches en graisses saturées (animales) : viandes grasses (porc, mouton...), charcuterie, lait et laitages, sauces à la crème ou au beurre.

- Contrôler les boissons alcoolisées et sucrées et diminuer les glucides.

Aliments conseillés :

- Consommer des aliments riches en graisses végétales poly-insaturées, à action hypocholestérolémiante : huiles de tournesol, de soja, de maïs, de pépins de raisin, poissons de mer à chair grasse (thon, maquereau, sardine, hareng, merlan, cabillaud, saumon...) et coquillages (huîtres, moules).

- Il faut utiliser de la margarine à la place du beurre, et tous les laitages allégés en matières grasses.

- Consommer avec modération les aliments riches en graisses mono-insaturées : huile d'olive, de colza, viande de porc.

Mesures d'accompagnement. La pratique d'exercices physiques modérés, l'arrêt du tabac et la vie hors stress ont un effet favorable sur la baisse des lipides.

Recherche des complications cardiovasculaires. Lorsque le régime est mal suivi ou si les statines ne suffisent pas à faire baisser le cholestérol, des accidents cardiovasculaires peuvent avoir lieu.

Complications coronaires. L'accident coronaire s'exprime par une crise d'angor avec douleur rétro-sternale intense et angoissante, constrictive, avec sensation d'oppression, irradiant vers le bras gauche, la mâchoire ou le dos. La douleur de l'infarctus ou de l'angor est du même type, mais n'est plus calmée par la trinitrine dans l'infarctus.

Au niveau vasculaire. L'accident vasculaire cérébral (AVC, anciennement appelé « attaque d'apoplexie ») se traduit par une perte de connaissance, éventuellement annoncé par des céphalées. Il peut aboutir à la perte de l'usage d'un bras, d'une jambe, de la moitié du visage (déviation de la bouche), ou par une hémiplégie.

Facteurs de risque d'accidents cardiovasculaires. Les facteurs de risque de maladies cardiovasculaires sont l'hypertension, le tabac, le diabète, le surpoids ou obésité, la sédentarité, les antécédents cardiovasculaires familiaux, et l'âge. L'association de plusieurs facteurs augmente le risque d'athérosclérose .

Mise en place de la surveillance

Dépistage des troubles musculaires graves. Les statines peuvent être responsables dans de rares cas de la destruction du muscle, appelée rhabdomyolyse. Elle apparaît de façon imprévisible : myalgies intolérables, faiblesse musculaire importante, destruction musculaire conduisant à une myoglobinurie. Les douleurs musculaires doivent être rapidement signalées au médecin.

Les situations à risque de troubles musculaires graves sont l'insuffisance rénale, l'hypothyroïdie (dosage de TSH), une maladie musculaire d'origine génétique, des antécédents musculaires liés à l'utilisation précédente d'une fibrate ou d'une statine, l'abus d'alcool et l'âge, lorsqu'il est supérieur à 70 ans.

Surveillance biologique

Suivi par le bilan lipidique. Les objectifs du LDL-cholestérol en cas de risques cardiovasculaires (recommandations de l'Afssaps de mars 2005 (2)) sont :

- Absence de facteur de risque cardiovasculaire : < 2,2 g/l ;

- Présence d'un facteur de risque cardiovasculaire : < 1,9 g/l ;

- Présence de deux facteurs de risque cardiovasculaire : < 1,6 g/l ;

- Présence de plus de 2 facteurs de risque cardiovasculaire : < 1,3 g/l ;

- Antécédents de maladie cardiovasculaire : < 1 g/l.

Surveillance de la fonction hépatique. Il est recommandé de pratiquer un bilan hépatique avant le traitement, puis trois mois après. Une élévation des transaminases supérieure à trois fois la limite supérieure de la normale doit conduire à l'arrêt du traitement ou à une diminution de la posologie.

Dosage des CPK (créatine phosphokinase). Il est demandé en cas de troubles musculaires inexpliqués. Si les CPK sont augmentées au-delà de cinq fois la norme, le traitement doit être interrompu.

Surveillance cardiaque

- La prise de la tension permet de dépister ou de suivre une hypertension associée.

- La prise du pouls permet de suivre les variations du rythme cardiaque.

- La mesure du poids est un moyen de surveillance du risque athéromateux chez l'obèse.

DÉPISTER LES EFFETS SECONDAIRES

Le risque majeur est l'apparition de troubles musculaires graves.

- Troubles musculaires : douleur ou sensibilité musculaire (myalgies), faiblesses et fatigue musculaires, crampes (bénignes), rhabdomyolyse ou destruction du muscle (grave et rare).

- Troubles digestifs : nausées, flatulences, diarrhées.

- Troubles neurosensoriels : vertiges, céphalées, asthénie, augmentation de l'appétit et prise de poids.

- Réactions cutanées : érythème, prurit, allergie cutanée.

- Troubles hépatiques : élévation des transaminases.

1- À lire : « Acides gras et athérosclérose », cahier de formation de L'Infirmière magazine n° 246, p. XII.

2- « Prise en charge thérapeutique du patient dyslipidémique », recommandations de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, mars 2005.

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