Antalgiques et plaies - L'Infirmière Magazine n° 252 du 01/09/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 252 du 01/09/2009

 

plaies

Fiches

Face aux douleurs liées aux plaies, il existe des modes d'action progressifs et associables : le traitement local, des médicaments par voie systémique et des techniques sophistiquées.

TYPES DE DOULEUR

Nociceptive. Imputable à une lésion tissulaire (telle une plaie), elle est sensible aux antalgiques.

Neuropathique. Peu sensible aux antalgiques, elle survient en cas de lésion de nerf. Exemple : la douleur du membre fantôme après amputation.

Psychogène. C'est l'expression, à travers le corps, d'un trouble psychologique, comme une dépression. Ainsi, un patient souffrant d'une plaie veineuse chronique peut organiser sa vie autour de sa douleur - on parle de « douleur refuge ».

Mixte. Dans le cas où elle persiste plusieurs mois, en dépit des soins, la douleur est de plusieurs types : à terme, la douleur psychogène peut se juxtaposer aux deux premiers types.

ÉVALUATION DE LA DOULEUR

Déterminer le type de douleur, son caractère aigu ou chronique, son intensité, est fondamental. Un praticien sous-estime la douleur s'il ne demande pas au patient de l'évaluer lui-même. Il existe différents outils de mesure : l'échelle verbale simple, l'échelle numérique, l'échelle visuelle analogique (EVA).

Cette simple évaluation permet de choisir l'antalgique (ou l'association d'antalgiques) adéquat. De même, des échanges réguliers entre infirmière et médecin conduisent le second à adapter sa prescription.

La mesure de la douleur lors du soin doit être associée à l'évaluation ponctuelle des conséquences de la douleur sur l'humeur du patient, sa capacité à marcher, ses activités, ses relations à autrui, son sommeil, son goût de vivre. Si besoin, l'orienter vers un médecin spécialisé dans la prise en charge de la douleur, voire envisager un soutien psychologique.

AVANT LE PANSEMENT

Avant de réfléchir au type de pansement et à sa fréquence, l'infirmière vérifie l'existence d'une prescription d'antalgique. Elle demande au patient à quel moment il l'a pris. Puis elle lui explique le soin et les techniques, l'y associe, le relaxe.

TRAITEMENTS

Traitements locaux. Le premier, la crème Emla®, associe xylocaïne et prilocaïne. À appliquer trente minutes avant le renouvellement du pansement. Le second produit, le plus fréquemment utilisé, est la xylocaïne en gel 2 %. Efficacité en cinq à quinze minutes. Il est hors AMM (autorisation de mise sur le marché). Risque de toxicité systémique, toutefois faible.

Antalgiques par voie systémique

Palier 1. Contre ce premier niveau de douleur, un antalgique non opioïde peut être utilisé : le paracétamol, très bien toléré. En général, en prendre un gramme une heure avant le soin. En revanche, se méfier des anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS), en raison notamment du risque d'ulcère gastro-duodénal, d'insuffisance rénale, et cardiovasculaire.

Palier 2. Quatre opioïdes faibles existent : la codéine, le dextropropoxyphène (déjà retiré du marché dans d'autres pays et qui doit l'être progressivement en France), le tramadol (qui a moins d'effets secondaires que la morphine mais n'est pas toujours bien toléré) et le néfopam (non-disponible en per os).

Palier 3. Parmi les opioïdes forts, on trouve la morphine à libération immédiate, sous deux formes : le sulfate de morphine et le chlorhydrate de morphine. Quand le patient ne tolère pas un produit morphinique, il est possible de tenter un autre produit de ce type, même d'une force identique. La morphine n'agit pas sur les douleurs neuropathiques.

Gradation et association. Pour une EVA de 0 à 4 (douleur faible à modérée), un traitement de palier 1 suffit. Quand l'EVA monte entre 4 et 6 (douleur modérée à intense), passer aux produits du palier 2. En cas d'EVA très élevée (de 6 à 10), recourir aux opiacés du palier 3. Il est recommandé d'associer les traitements. Aux soins locaux peuvent s'ajouter des médicaments par voie systémique : d'abord le paracétamol, puis les produits du palier 2 (codéine ou tramadol) ou du palier 3. L'efficacité du paracétamol est accrue s'il est associé à un traitement par AINS (avec toutefois évaluation des risques) ou morphinique.

Dosage. En général, les patients soignés pour des plaies à domicile sont âgés et prennent de nombreux autres médicaments. Le risque d'effets indésirables lié aux antalgiques en est augmenté. Préférer les produits à demi-vie courte. Commencer par de petites doses, avant d'augmenter éventuellement, en particulier pour les morphiniques.

TECHNIQUES PLUS SOPHISTIQUÉES

Méopa. Utilisé à l'hôpital et en HAD, le mélange équimolaire oxygène-protoxyde d'azote est amené à se développer. Il est facile à administrer, nécessite peu de matériel, et les effets indésirables sont rares. Une surveillance clinique s'impose pendant seulement cinq minutes après la fin de l'inhalation. Une infirmière formée peut s'en charger seule.

ALR. L'anesthésie loco-régionale consiste à instiller en continu un anesthésique local puissant au moyen d'un cathéter périnerveux, mis en place à proximité des nerfs sciatique ou fémoral. Cette technique invasive, réservée pour le moment aux douleurs très intenses, permet d'interrompre la douleur, et ainsi de prodiguer des soins plus efficaces. Ce dispositif peut être laissé en place plusieurs semaines, à condition de surveiller régulièrement le pansement du cathéter. Au CHU de Rennes, une équipe teste différents dispositifs et met au point un protocole avec les infirmières.

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