Erreurs fatales - L'Infirmière Magazine n° 252 du 01/09/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 252 du 01/09/2009

 

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Exigeant, le métier d'infirmière est aussi risqué. Des accidents tragiques survenus sur des lieux de soins l'ont encore illustré cet été.

Deux infirmières ont été mises en cause au cours du mois d'août dans le décès de trois patients, l'un en Gironde et les deux autres en Seine-Maritime. Le 6 août, deux grands prématurés âgés de quatre et sept jours sont décédés dans le service de réanimation néonatale du centre hospitalier du Havre. Les examens biologiques pratiqués chez les deux nourrissons ont révélé des résultats « anormaux » présentant la même anomalie, a fait savoir l'Agence régionale de l'hospitalisation, sans préciser laquelle. L'infirmière en charge des nouveau-nés lors de l'accident a été suspendue à titre conservatoire, jusqu'au résultat des enquêtes judiciaire et médico- administrative.

Erreur sur la personne

Le 14 août, le quotidien Sud-Ouest révélait la mise en examen pour homicide involontaire d'une autre infirmière, à Bordeaux. L'IDE de 26 ans a reconnu s'être trompée de patient lors de la tournée des médicaments. Le 8 août, dans un établissement privé de Mérignac spécialisé dans la prise en charge de patients handicapés, où elle était arrivée la veille pour un renfort de trois jours, elle aurait administré à un quadragénaire lourdement handicapé des neuroleptiques oraux dosés pour un autre patient, de forte corpulence.

S'apercevant immédiatement de sa méprise, l'infirmière en avertit aussitôt la direction de l'établissement. Un médecin contacté en urgence ne juge pas opportun de se déplacer et recommande à la soignante de surveiller la tension du patient. En vain. Celui-ci décède d'un arrêt cardiaque dans la soirée. Placée en garde à vue au commissariat central de Bordeaux le lendemain, l'infirmière reconnaît les faits. La juge d'instruction décide son placement sous contrôle judiciaire avec interdiction d'exercer jusqu'à nouvel ordre et, le mardi suivant, la met en examen pour homicide involontaire.

Garde à vue indue ?

Selon son avocat Me Arnaud Dupin, la jeune soignante est « bouleversée » par son « erreur aux conséquences dramatiques et absolument imprévisibles ». Arguant du « parcours professionnel sans faille » de sa cliente, l'avocat a fait appel de l'interdiction d'exercer, car, estime-t-il, « il ne faut pas briser une carrière dans un tel contexte, les parents de la victime ayant décidé de ne pas déposer de plainte ».

Dans les deux cas, les enquêtes devront déterminer les circonstances exactes des décès et le rôle précis des professionnelles mises en cause, mais pour les représentants de la profession, de nombreuses questions se posent déjà. Par exemple, pourquoi le médecin contacté dans l'accident de Bordeaux ne s'est-il pas déplacé, s'interroge ainsi le Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI-CFE-CGC) ? Un lavage d'estomac n'aurait-il pas dû être pratiqué ? « Nous ne comprenons pas que notre collègue ait fait l'objet d'une garde à vue », s'étonne encore le syndicat, puisque la soignante a elle-même reconnu et signalé son erreur, et n'a montré aucune intention de faire obstruction à l'enquête.

« Nous sommes choqués d'être traités comme des criminels », a renchéri la Coordination nationale infirmière dans un communiqué.