L'électro-convulsivothérapie - L'Infirmière Magazine n° 252 du 01/09/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 252 du 01/09/2009

 

psychiatrie

Cours

Toujours victime de la méfiance du public, l'électroconvulsivothérapie donne pourtant de bons résultats, notamment dans le traitement de la mélancolie. À condition de respecter certaines règles (bilan préanesthésique complet, placement rigoureux des électrodes, matériel adéquat...), les effets secondaires sont mineurs au regard de son efficacité thérapeutique.

INTRODUCTION

Autrefois dénommée électrochoc, puis sismothérapie, la méthode avait mauvaise réputation. C'est ce qui apparaît flagrant dans le film Vol au-dessus d'un nid de coucou de Milos Forman, qui illustre en effet l'utilisation répressive et pervertie d'une méthode efficace transformée à des fins punitives.

Partie intégrante des « thérapies de choc », la sismothérapie, avec les progrès actuels de l'anesthésie, le recours au curare et les avancées de la psychiatrie biologique, donne dans les états dépressifs des résultats égaux, sinon supérieurs, aux médicaments antidépresseurs, sans présenter les mêmes risques secondaires. Pourtant, l'électrochoc suscite toujours méfiance et effroi au sein du public. Il apparaît même faire partie de la barbarie thérapeutique. Or il s'agit de l'un des traitements les mieux évalués dans la panoplie thérapeutique. La découverte de cette méthode est le fruit d'une erreur d'interprétation et confirme la thèse de Gaston Bachelard, dans Le Nouvel Esprit scientifique (PUF) : la science n'est que la rectification d'une longue erreur. Dans l'histoire de l'électroconvulsivothérapie, Il faut citer trois noms : Ladislas Joseph von Meduna, Ugo Cerletti, Lucino Bini.

RAPPEL HISTORIQUE

Les précurseurs. L'histoire du début de la sismothérapie se lit comme un roman, avec des préoccupations médicales et un esprit de recherche passionné, qui montre l'importance d'une idée dont la concrétisation est ensuite rendue possible. C'est tout d'abord un psychiatre hongrois, Ladislas Joseph von Meduna (1896-1964) qui, dans les années trente, croyait avoir observé que les épileptiques n'étaient jamais atteints de schizophrénie. Convaincu de l'existence d'un antagonisme clinique entre schizophrénie et épilepsie, il en déduisit que déclencher artificiellement une crise d'épilepsie chez un schizophrène allait améliorer ses troubles.

Mais pour induire des crises d'épilepsie, Von Méduna ne disposait au début (1934) que du camphre en injection. L'année suivante, on découvrit qu'un de ses dérivés, le cardiazol, était tout aussi efficace et moins risqué. C'est ainsi que naissait le premier traitement de choc en psychiatrie : le choc au cardiazol ! Adoptée dans le monde entier, malgré son côté anxiogène et la difficulté de contrôler les crises convulsives (quelquefois mortelles), cette méthode avait aussi ses détracteurs qui en soulignaient le côté barbare. Mais les bons résultats constatés favorisèrent la poursuite de cette thérapie de choc.

Un neuropsychiatre italien, Ugo Cerletti (1877-1963), qui étudiait les lésions anatomo-pathologiques produites par les crises d'épilepsie déclenchées sur l'animal, utilisait le courant électrique. Malheureusement, de nombreux animaux mouraient d'électrocution ! Il apprit qu'aux abattoirs de Rome, on tuait les porcs par un tel procédé, ce qui l'incita à visiter les abattoirs. Là, il constata que les bouchers, avant d'égorger les porcs, les rendaient inconscients par le passage transcérébral d'un courant électrique. Cette méthode avait pour but de les rendre comateux avant de les tuer, mais en même temps les faisait convulser ! Cette observation lui donna l'idée d'envisager un passage transcérébral du courant électrique pour provoquer chez les animaux des crises comitiales. Il put vérifier alors que les convulsions généralisées n'étaient plus mortelles.

C'est alors qu'intervient un ingénieur électricien italien : Lucio Bini (1908-1964). Il construit pour Cerletti un appareil permettant de doser la quantité d'électricité délivrée... Et le 15 avril 1938, Cerletti réalisa le premier électrochoc chez l'un de ses patients ! Les résultats furent inespérés ! Le choc électrique succéda donc au cardiazol. Par ailleurs, les psychiatres observèrent de bien meilleurs résultats dans la mélancolie délirante. Ce fut la fierté de la psychiatrie d'avoir enfin découvert un traitement efficace pour soigner un trouble mental ! C'est la raison pour laquelle l'usage de l'électrochoc se généralisa pour tous les troubles mentaux.

À partir des années 1970, on constate une diminution du recours à la sismothérapie. Cela est dû en partie au mouvement antipsychiatrique des « années 68 », à la découverte de médicaments efficaces et à l'idéologie psychanalytique très en vogue, alors, dans certains services en France. Pourtant, la technique s'améliore. L'anesthésie générale est systématique. Elle diminue l'anxiété anticipatoire et la crainte de souffrir due à l'usage de l'électricité. La curarisation devient systématique pour éviter les luxations et fractures. Le curare, en effet entraîne une paralysie des muscles, évitant ainsi les conséquences des convulsions sur les articulations.

En France, la curarisation a été introduite par Jean Delay et son équipe. Et la conférence de consensus sur l'électrochoc recommande la curarisation par la succinylcholine (Célocurine ®) lors de la sismothérapie, pour éviter les effets des convulsions.

L'antipsychiatrie. Deux courants de pensée, qui en fait se rejoignent, ont frappé l'imaginaire social pendant les décennies 1960 et 1970. L'un vient d'Angleterre avec David Cooper et Ronald Laing et l'autre d'Italie avec Franco Basaglia. Cette théorie, appelée l'antipsychiatrie, considère que la maladie mentale est la réponse d'un individu à une pression psychologique et sociale intolérable. Le thérapeute doit « accompagner le patient dans son voyage intérieur » avec tolérance et sans être répressif. On comprend que l'antipsychiatrie est fondée sur la dénégation de la réalité du trouble mental. Selon elle, les réponses médicales apportées (enfermement, chimiothérapie, traitements de chocs) sont répressifs, voire barbares ! Il existe un écho philosophique à ce mouvement représenté aux États-Unis par Thomas Szasz (Le Mythe de la maladie mentale) et en France par Michel Foucault (Histoire de la folie à l'âge classique).

D'une certaine manière, l'antipsychiatrie a participé à l'humanisation des soins aux malades mentaux et a favorisé le développement du secteur. Même s'il faut reconnaître que sa théorie de l'origine sociale du trouble mental n'a jamais été validée par la suite. Ce mouvement a été relayé par le cinéma. Ken Loach avec Family Life et Milos Forman avec Vol au-dessus d'un nid de coucou ont contribué à la propagation de ces thèses dans le grand public.

PRATIQUE DE L'ECT

Technique. L'électroconvulsivothérapie (ECT) consiste à déclencher une crise d'épilepsie généralisée, sous anesthésie générale, par l'utilisation d'un courant électrique de faible intensité, pendant quelques dixièmes de secondes, pour soigner certains troubles mentaux.

Conditions de recours à l'ECT

Cadre juridique. La sismothérapie ne se pratique qu'avec le consentement du patient et son accord écrit signé. On peut à ce sujet utiliser la « fiche patient » élaborée par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (Anaes, intégrée en 2005 à la Haute autorité de santé. Lire la fiche p. VIII).

En effet, l'article L. 111-4 du Code de la santé publique (cf. article 11 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé) dispose que : « Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance, ou la famille, ou à défaut un de ses proches ait été consulté. »

Surveillance. Le patient est anesthésié, ce qui diminue son anxiété et contribue à humaniser la technique. Comme pour toute anesthésie générale, la séance se fera sous surveillance constante. Ensuite, le patient est transporté en salle de réveil. Il est cependant préférable que la salle d'ECT soit spécialement aménagée, pour éviter le transport. Par ailleurs, le patient est curarisé, ce qui bloque la phase clonique de la crise comitiale, afin d'éviter les risques ostéo-tendineux liés aux convulsions. Le voltage dépendra du patient, de la séance et du praticien, le but étant d'obtenir une crise comitiale généralisée.

Bilan pré-anesthésique. Les contre-indications supposent une excellente collaboration entre le psychiatre et l'anesthésiste. Leur dépistage nécessite un bilan pré-anesthésique :

- ECG ;

- radio pulmonaire ;

- radio du crâne face et profil.

L'anesthésiste devra en effet repérer et évaluer lors de la consultation préalable les risques liés à l'anesthésie en elle-même, les problèmes cardiaques et neurologiques, dont l'hypertension intracrânienne qui est une contre-indication absolue à cause du risque de décès qu'elle entraîne.

Effets indésirables :

- Immédiatement après la séance, nausées ou céphalées ont été décrites, mais ces symptômes banals passent en quelques heures.

- Dès les premières séances, on note de fréquentes pertes de mémoire, qui disparaissent quelques semaines après.

- Néanmoins, chez certains sujets a été décrite l'amnésie de la cure.

Mécanisme d'action. Pour les psychanalystes, l'ECT renverrait au détournement de la pulsion de mort, qui donne à la fois l'impression de « vivre sa mort » et de la vaincre, tout en ayant la possibilité de régresser dans un réveil avec la protection des autres. Pour les neurophysiologistes, l'action neuronale de l'électricité s'exercerait à deux niveaux :

1- une augmentation de la sensibilité des récepteurs post-synaptiques aux différents neuromodulateurs, notamment sérotoninergiques ;

2- ainsi qu'une augmentation de la circulation de ceux-ci, particulièrement au niveau du diencéphale.

Mais il est important de signaler que tout type de traitement s'intègre dans une prise en charge globale du patient.

Indications :

- Principalement la mélancolie (forme stuporeuse, délirante ou anxieuse). Les effets sont très rapides et dépassent le délai d'action des antidépresseurs, d'où l'utilité dans l'urgence suicidaire.

- À titre palliatif pour une contre-indication à un traitement antidépresseur.

- En remplacement de thérapeutiques contre-indiquées ou inefficaces. Le résultat sera alors aléatoire. Il s'agit des épisodes aigus de la schizophrénie, des psychoses puerpérales, des états maniaques, en cas de grossesse (pour éviter le risque tératogène de certains produits) ou chez la personne âgée (contre-indication de certains médicaments).

En pratique, la cure nécessite huit à douze séances à raison de deux par semaine.

RECOMMANDATIONS DE L'ANAES

Nous citons ici les Recommandations pour la pratique clinique d'avril 1997 de l'Anaes, portant sur les indications et modalités de l'électroconvulsivothérapie. L'Anaes recommande tout d'abord de proscrire le terme d'électrochoc et propose indifféremment sismothérapie ou électroconvulsivothérapie (ECT). Le traitement consiste à provoquer une crise comitiale généralisée au moyen d'un courant électrique à administration transcrânienne. Plusieurs séances sont répétées et espacées dans le temps. Elle rappelle ensuite que l'ECT a été introduite en France dans le traitement des maladies mentales dans les années quarante, mais souligne que les techniques employées initialement produisaient des convulsions motrices impressionnantes, à l'origine d'accidents traumatiques parfois graves.

D'où l'insistance sur le fait que les séances d'ECT soient réalisées sous anesthésie générale et avec une curarisation pour limiter les effets secondaires. L'anesthésie brève (quelques minutes) évite l'angoisse du patient liée à la paralysie des muscles respiratoires engendrée par la curarisation. L'utilisation d'une curarisation (par myorelaxants) a pour but de diminuer les convulsions motrices et leurs conséquences traumatiques.

Indications. L'Anaes distingue l'indication de première intention, ce qui souligne déjà l'efficacité de l'ECT, et l'indication de seconde intention, ce qui confirme son efficience !

En première intention :

- Lorsqu'il existe un risque vital à court terme ;

- Lorsque l'état de santé d'un patient est incompatible avec l'utilisation d'une autre forme de thérapeutique efficace ;

- Lorsque le bénéfice attendu par les traitements classiques est faible ;

- Voire, dans une indication appropriée, à la demande du patient.

En seconde intention :

- Après l'échec d'un traitement pharmacologique de référence ;

- Ou en raison de l'intolérance à un tel traitement ;

- Ou devant l'aggravation de l'état du patient.

Les pathologies

Les dépressions majeures :

> L'électroconvulsivothérapie a une efficacité curative à court terme démontrée chez 85 % des patients (études prospectives en double insu comparant les résultats d'ECT réelles à des ECT simulées où le patient était anesthésié mais ne recevait pas de stimulus électrique).

> L'ECT diminue la mortalité naturelle de la maladie.

> L'ECT a une efficacité comparable aux antidépresseurs dans les dépressions majeures.

> Des études bien conduites montrent une efficacité comparable (voire supérieure) de l'ECT au regard des antidépresseurs dans les dépressions majeures.

> Les contraintes et les risques liés à l'ECT font préférer, en première intention, le traitement pharmacologique, sauf lorsqu'une amélioration rapide et puissante est nécessaire (risque suicidaire, dénutrition et déshydratation sévère).

> L'ECT a une efficacité antidépressive démontrée par des études comparatives chez des patients pour lesquels les antidépresseurs n'ont pas donné de résultats.

> L'ECT est indiquée dans les épisodes dépressifs majeurs, que l'épisode soit isolé ou récurrent, en première intention pour les patients atteints de dépressions majeures psychotiques ou lorsque le pronostic vital est engagé (risque suicidaire, altération grave de l'état général) ; en deuxième intention lorsque la thérapeutique pharmacologique de la dépression a échoué, ou a été mal tolérée.

La nécessité d'un traitement de consolidation s'impose dans les suites de l'ECT, en raison du taux élevé (entre 35 et 80 %) de rechutes dans l'année (traitement pharmacologique ou séances d'ECT de consolidation).

Les accès maniaques. Avant les neuroleptiques et normothymiques, l'ECT a été utilisée avec succès dans les accès maniaques aigus. Actuellement, les neuroleptiques et le lithium sont utilisés en première intention dans les accès maniaques.

> L'ECT est aussi efficace que le lithium comme traitement curatif de l'accès maniaque aigu chez des patients recevant des neuroleptiques. Elle permet d'obtenir une action rapide sur l'agitation et l'exaltation de l'humeur.

> L'ECT reste un traitement efficace et utile des états maniaques aigus ou des états mixtes (agitation mal contrôlée, amélioration qui tarde), indiquée devant un tableau de manie délirante, confuse ou furieuse.

> Le nombre de séances d'ECT est souvent inférieur à celui des séances prescrites pour la dépression.

La schizophrénie. Le traitement de choix de la schizophrénie est la chimiothérapie neuroleptique. L'ECT a une efficacité :

- dans les exacerbations symptomatiques (soulagement rapide et à court terme) ;

- dans les troubles schizoaffectifs ;

- dans les syndromes paranoïdes aigus (risque de passage à l'acte) ;

- lorsque la symptomatologie thymique est au premier plan ;

- dans la catatonie ;

- lorsque des épisodes antérieurs ont été traités avec succès.

Autres indications. Citons pêle-mêle, sans les argumenter, les autres indications qui reposent souvent sur des cas isolés ou l'impression clinique de tel ou tel prescripteur :

- les troubles sévères de l'humeur concomitants à des pathologies somatiques (démence, sida, maladie de Parkinson) ;

- dans la maladie de Parkinson, l'ECT est discutée (effet à court terme) ;

- le syndrome malin des neuroleptiques peut être une indication de l'ECT ;

- dans l'épilepsie (pas d'études probantes ; élévation du seuil convulsif). L'efficacité des traitements fait réserver l'ECT aux cas résistants pour lesquels la chirurgie est envisagée ;

- les dyskinésies tardives induites par les neuroleptiques (indication discutée).

Situations particulières

Grossesse. L'ECT peut être utilisée tout au long de la grossesse. Une surveillance avant la séance de l'état du foetus et au réveil est conseillée. En cas de grossesse à risque ou lorsque le terme est proche, le monitorage est plus important et la présence d'un obstétricien souhaitable.

Enfant et adolescent. Les indications sont les mêmes que chez l'adulte. Chez l'enfant de moins de 15 ans, l'ECT doit être limitée aux cas où tous les autres traitements ont été inefficaces.

La technique tient compte du seuil épileptogène très bas chez l'enfant. Mais, comme les risques sur le cerveau en maturation n'ont pas fait l'objet d'études, il semble préférable de s'abstenir.

Personne âgée. L'efficacité de l'ECT ne diminue pas avec l'âge. L'ECT est mieux tolérée que certains antidépresseurs (imipraminiques). Il faut tenir compte de l'élévation du seuil convulsif avec l'âge.

Contre-indications

Absolue. L'hypertension intracrânienne (risque d'engagement cérébral), car la crise convulsive s'accompagne d'une élévation de la pression intracrânienne.

Relatives. Elles relèvent de l'appréciation du rapport bénéfice-risque pour chaque patient. Elles tiennent compte notamment :

- des risques dus à l'anesthésie et à la curarisation (cardio-vasculaire, respiratoire, allergique) ;

- de l'existence de lésions expansives intracrâniennes sans hypertension intracrânienne ;

- de la proximité d'un épisode d'hémorragie cérébrale ;

- d'un infarctus du myocarde ou d'une maladie emboligène ;

- de la présence d'anévrismes ou malformations vasculaires à risque hémorragique ;

- d'un décollement de rétine ;

- d'un phéochromocytome ;

- de traitement par ECT inefficace ou aux effets secondaires graves ;

- de la prise de certains médicaments comme les anticoagulants.

Risques et effets indésirables. La mortalité est estimée à 1 pour 10 000 patients (c'est-à-dire celle liée à l'anesthésie générale pour les interventions chirurgicales mineures) ou 2 pour 100 000 séances d'ECT.

Le taux d'accidents est estimé à 1 pour 1 400 séances. Il s'agit de : laryngospasme, traumatisme dentaire, luxation, fracture, défaillance circulatoire, état de mal épileptique, paralysie des nerfs périphériques, brûlure au point d'application des électrodes, apnée prolongée.

Le traitement engendre souvent, dans les minutes suivant la stimulation, une bradycardie avec hypotension transitoire (stimulation vagale centrale) et secondairement une tachycardie sinusale et une hypertension artérielle. Des arythmies cardiaques peuvent survenir. Elles disparaissent en général sans séquelles.

Les troubles immédiats disparaissent en quelques minutes à quelques heures après la séance. Il s'agit d'état confusionnel postcritique, d'amnésie transitoire, de céphalées, de nausées, de douleurs musculaires.

La sévérité des troubles est liée au nombre total de séances d'ECT, au placement bilatéral des électrodes, à l'utilisation d'un courant sinusoïdal (anciens appareils).

L'ECT ne provoque pas de lésions cérébrales objectivables chez l'adulte par les techniques actuelles d'imagerie.

Information et consentement. Une information complète et adaptée sur l'ECT sera donnée au patient et/ou à son entourage par le médecin responsable de l'administration du traitement et l'équipe soignante. Il est nécessaire de bien penser au tuteur et à la personne de confiance. À l'issue de ces entretiens, un document reprenant les informations énoncées sera remis au patient et/ou à l'entourage. Comme pour toute intervention médicale importante, le consentement du patient (et/ou de l'entourage) sera recherché et fera l'objet d'un accord signé.

Préparation du patient. Les thérapeutiques concomitantes non indispensables sont à éviter.

> Avant chaque séance d'ECT :

- Le patient doit être à jeun depuis au moins six heures. C'est pourquoi l'ECT est prescrite de préférence le matin ;

- On fait uriner le patient pour éviter une rupture vésicale et diminuer l'émission d'urine lors de la crise comitiale ;

- La cavité buccale est inspectée : les corps étrangers sont retirés (chewing-gum, prothèse) ;

- Un protège-dents est mis en place ;

- Une voie veineuse est posée et conservée jusqu'au départ du patient de la salle de réveil.

> La séance d'ECT ne peut commencer si l'anesthésiste n'est pas présent.

> Le psychiatre est responsable de l'administration du traitement.

> Une infirmière l'aide dans les soins de surveillance, de nursing et d'étayage dispensés au patient.

> La ventilation du patient est assistée avec une fraction de gaz inspiratoire en oxygène à 100 %, depuis l'induction anesthésique jusqu'à la reprise de la ventilation spontanée.

> L'ECG, la tension artérielle, la fréquence cardiaque et la saturation du sang en oxygène (oxymètre de pouls) sont surveillés pendant la totalité de la séance.

> Un agent anticholinergique peut être administré, notamment si une procédure de titration du seuil convulsif doit être mise en oeuvre, en raison de l'itération des stimulations électriques.

> Une anesthésie générale brève (quelques minutes) est réalisée avec des agents anesthésiques adaptés (barbituriques ou étomidate ou propofol).

> Un myorelaxant est ensuite administré, la succinylcholine le plus souvent, pour réduire l'amplitude motrice des convulsions.

Place des électrodes

Les deux électrodes délivrant le stimulus électrique doivent être maintenues étroitement en contact avec le scalp sans qu'il soit indispensable de raser les cheveux ; le gel conducteur (pâte ou solution) doit rester en regard des électrodes.

> Les électrodes sont placées :

- soit en bilatéral (le milieu de chaque électrode est alors appliqué en (1), à 2,5 cm au-dessus du milieu d'une droite allant du tragus de l'oreille au canthus externe de l'oeil) ;

- soit en unilatéral ; une électrode est placée en position fronto-temporale droite (en (1), comme en bilatéral) et l'autre en (2), à 2,5 cm du vertex du côté droit.

> L'ECT bilatérale est plus efficace que l'ECT unilatérale.

> L'ECT unilatérale est utilisée si l'on souhaite préserver les fonctions cognitives.

> L'ECT unilatérale avec une énergie proche du seuil épileptogène est inefficace.

Surveillance. Au décours immédiat, l'anesthésiste réanimateur s'assure de la reprise de la ventilation spontanée ; de la stabilité des constantes (TA, pouls) et de l'absence de troubles du rythme cardiaque.

Il est préférable que l'anesthésiste-réanimateur reste disponible jusqu'au réveil du patient.

La surveillance doit être assurée par une infirmière formée. L'infirmière référente du patient participe à la qualité et à la sécurité des soins lors du réveil.

Un état confusionnel ou une agitation nécessitent une surveillance médicale et une présence rassurante. La conduite d'un véhicule est déconseillée lors de la sortie.

Le médecin traitant sera tenu informé du déroulement du traitement.

CONCLUSION

L'électroconvulsivothérapie est maintenant une méthode bien codifiée dans sa technique, dans ses indications, et reconnue par la communauté scientifique internationale. Ses effets montrent un bon index thérapeutique avec finalement assez peu d'effets secondaires. Si l'on respecte certaines règles, pourquoi devrait-on s'en priver ?

Une conférence majeure

La conférence de consensus du National Institute of Health (États-Unis), organisée du 10 au 12 juin 1985, revêt une grande importance dans l'histoire des idées et de la progression de la pensée rationnelle en psychiatrie. Cette conférence a réalisé une première dans le monde scientifique de la psychiatrie. Elle a en effet permis de faire le point sur l'état des connaissances concernant l'électroconvulsivothérapie ; de dégager des axes de recherches cliniques ou fondamentales.

> Si l'on tient compte de ce qui est avéré, la première indication concerne la dépression mélancolique. Les études ont montré que l'ECT était aussi efficace, et parfois plus, que les antidépresseurs. En revanche, dans le sens inverse, aucune supériorité d'action des antidépresseurs sur l'ECT n'a été démontrée.

> Toutes les comparaisons ECT contre placebo (pas d'utilisation du courant chez un patient anesthésié) sont très nettement en faveur de l'ECT.

> L'ECT est aussi efficace que les sels de lithium dans le traitement de l'accès maniaque.

> L'ECT n'est pas plus efficace qu'un placebo dans les dépressions névrotiques ou réactionnelles d'intensité modérée.

> La curarisation a bien amélioré les complications mécaniques.

> Néanmoins, les troubles mnésiques restent l'effet indésirable le plus fréquent des ECT.

Cette conférence a également dégagé les impressions générales des chercheurs et des cliniciens sur ce que l'on croit savoir et ce que les thérapeutes aimeraient connaître. Par ailleurs, ces recherches servirent de base documentaire aux recommandations de l'Anaes, pour la pratique de l'électroconvulsivothérapie en 1997.

À lire

- « L'Électrochoc en psychiatrie », de Jean-Jacques Aulas, revue Prescrire, 1986 ; 6 (53) : 35-36.

- Le texte complet de la conférence de consensus du National Institute of Health est paru dans le Journal of the American Medical Association (JAMA) 1985 ; 254 (15) : 2103-2108.

- Recommandations pour la pratique clinique, indications et modalités de l'électroconvulsivothérapie, Anaes, avril 1997, 95 pages.

- La Dépression, de Dominique Barbier, Odile Jacob, 2003, 228 pages.

Fiche patient

Document d'information pour les patients et leurs proches concernant l'électroconvulsivothérapieUn traitement par ECT vous a été proposé. Ce document résume les informations principales concernant ce traitement.

> Qu'est-ce que l'ECT ?

L'ECT est l'aboutissement des progrès scientifiques et techniques de l'ancienne méthode appelée « électrochocs ». Réalisée à présent sous anesthésie générale, l'ECT permet l'amélioration rapide de l'état de santé de certains patients par le recours à l'équivalent d'une crise convulsive, artificiellement provoquée en utilisant un courant électrique faible et très bref appliqué à la surface du crâne.

> Quels sont les bénéfices de l'ECT ?

Certains patients ne réagissent pas ou réagissent tardivement aux médicaments utilisés habituellement dans quelques maladies comme la vôtre.

Des études scientifiques ont montré que l'ECT procure une amélioration nette de l'état de santé d'au moins 80 % de ces patients. Les principaux avantages de l'ECT sont sa rapidité d'action et l'importance de son effet bénéfique sur les symptômes aigus.

> Quels peuvent être les risques du traitement ?

Comme toute thérapeutique efficace et puissante, l'ECT comporte, à côté des avantages, des inconvénients, parfois des incidents et exceptionnellement des accidents.

Les risques de toute anesthésie générale peuvent être observés (en particulier allergie à certains produits, complications cardio-respiratoires, voire décès). La consultation pré-anesthésique a pour but de limiter ces risques.

De rares lésions dentaires, neurologiques, traumatiques (luxation, voire fracture) ont été enregistrées.

> Comment se déroule le traitement ?

Une consultation d'anesthésie a lieu avant le début du traitement. Le médecin anesthésiste vous examine et si votre état de santé le nécessite, il demande des examens complémentaires.

Le traitement comporte plusieurs séances, d'une dizaine de minutes chacune.

Les séances sont renouvelées 2 ou 3 fois par semaine et leur nombre total varie de 4 à 20 environ, en fonction de l'amélioration de votre état de santé.

Les séances se déroulent en présence d'un médecin anesthésiste, d'un médecin psychiatre et d'un(e) infirmier (ière).

À chaque séance, vous êtes anesthésié : il s'agit d'une anesthésie générale de quelques minutes. Le médecin anesthésiste vous injecte aussi un médicament destiné à relâcher vos muscles. Vous recevez de l'oxygène jusqu'à votre réveil. Votre tension artérielle, votre électrocardiogramme et parfois votre électroencéphalogramme sont enregistrés durant la séance.

Au cours d'une séance, vous ne percevez aucune sensation particulière. Vous ne sentez pas l'administration du courant et vous n'avez aucune douleur.

A votre réveil, vous ne vous souvenez pas du déroulement de la séance. Il se peut que vous vous sentiez confus. En général, cette confusion disparaît au bout d'une heure environ. Vous pouvez éprouver un mal de tête durant la journée et parfois ressentir quelques nausées.

Des troubles de la mémoire peuvent être observés chez certains patients. Ces troubles concernent la mémoire des événements récents et parfois la mémoire des événements du passé : dates, noms, adresses ou numéros de téléphone. La plupart du temps, ces troubles disparaissent après quelques jours ou quelques semaines. Exceptionnellement, ils peuvent persister plusieurs mois.

Après les premières séances et en fonction de votre état de santé, votre médecin peut vous proposer de poursuivre votre traitement par des séances ambulatoires. Vous aurez alors la possibilité de venir de chez vous pour la séance et de retourner à votre domicile après celle-ci. Si cela est votre cas, des précisions complémentaires vous seront fournies en temps utile.

Sachez toutefois que vous devrez être obligatoirement accompagné.

> Pourquoi vous a-t-on proposé l'ECT ?

Après un examen approfondi de votre état de santé, les avantages et les inconvénients de l'ECT ont été comparés à ceux des autres traitements possibles. L'ECT vous a été proposée parce qu'il est nécessaire d'agir très rapidement, et habituellement pour l'une ou l'autre des raisons suivantes :

- votre traitement par médicaments n'a pas été ou n'est plus suffisamment efficace ;

- votre organisme n'a pas supporté les traitements par médicaments ;

- les médicaments sont contre-indiqués dans votre cas ;

- l'ECT a été efficace pour vous lors d'une situation identique dans le passé.

Si vous souhaitez des précisions ou d'autres informations, n'hésitez pas à les demander.

L'ensemble de l'équipe soignante sera toujours disponible pour en parler avec vous et avec votre entourage si vous le désirez.

Source : Anaes, conférence de consensus d'avril 1997