Délicate sortie - L'Infirmière Magazine n° 254 du 01/11/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 254 du 01/11/2009

 

Cancer

Actualités

Santé

Même physiologiquement guéri, « l'ex-cancéreux » demeure fragile.

La vie après le cancer est bien souvent, pour les patients, une « double peine financière », note le Pr Francis Larra (1). Cause de discrimination, la maladie a des conséquences sur la sexualité, la fertilité, et un impact violent sur la qualité de vie : un quart des malades subissent une baisse de revenus, et 24 % d'entre eux vivent sous le seuil de pauvreté. Il devient difficile pour eux d'assurer les soins de suite.

Sur le plan professionnel, après un long éloignement, le retour au monde du travail est difficile. Selon Sylvie Soler, responsable du service social de la caisse régionale de l'assurance- maladie d'Île-de-France, la visite de reprise intervient tardivement dans le parcours du malade. « Il faudrait instituer une visite de pré-reprise, rencontrer le médecin du travail, envisager un temps partiel thérapeutique avec pension d'invalidité... »

Banalisation

La façon de vivre la sortie de la maladie n'est par ailleurs pas toujours comprise par l'entourage. « Le temps psychique n'est pas superposable au temps social ou au temps médical, rappelle Nicole Pélicier, psychiatre, présidente de la Société française de psycho-oncologie (SFPO). Les séquelles peuvent durer pendant un temps impossible à déterminer a priori. Et la banalisation du cancer par l'entourage est très douloureuse pour les patients. » Elle plaide d'ailleurs pour que le deuxième Plan cancer (2009-2013) aide à fournir une aide psychologique pérenne, comme cela a été le cas pour le premier (2003-2007).

« Les chantiers sont nombreux, difficiles et engagent la société tout entière », conclut le Pr Francis Larra, qui lance plusieurs propositions : recenser l'ensemble des difficultés de terrain, faciliter le retour à l'emploi et augmenter l'allocation de perte d'autonomie, coordonner les aides matérielles et financières, apporter un soutien psychologique, ou encore repenser la place du médecin traitant... et interpeller la société.

1- Le Pr Larra, président de la Ligue nationale contre le cancer, s'exprimait dans le cadre des 1res Rencontres annuelles de l'Inca, le 7 octobre dernier.

« Le patient est compétent ! »

« le patient doit, s'il le peut, réinvestir des projets, estime Régine Goinière, membre du comité des malades, des proches et des usagers de l'Institut national du cancer (Inca), et présidente fondatrice de l'association Vivre avec. Il doit pouvoir s'orienter vers des thérapies ciblées sur l'emploi ou encore l'accès à l'assurance de prêt. On ne peut pas parler de vivre avec le cancer tant qu'on n'aura pas traité ces deux problèmes. J'insiste sur les décisions à prendre ensemble. Le mot "aide" ne nous convient pas. Le patient ne doit pas seulement être un témoin propre à émouvoir, mais il doit devenir un partenaire au niveau décisionnel, car il a acquis une compétence spécifique : celle de l'expérience de la maladie. Je propose deux priorités pour le Plan cancer 2009-2013 : que le patient devienne le partenaire incontournable au niveau de l'exécutif pour éradiquer les discriminations sociales. Je propose aussi d'installer un comité de pilotage interministériel pour établir des passerelles entre les professionnels, car nous avons besoin de clarification, de simplification et de coordination. »