Même pas peur ! - L'Infirmière Magazine n° 255 du 01/12/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 255 du 01/12/2009

 

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Des chercheurs brésiliens se sont attaqués aux réticences des soignants face au risque suicidaire chez les patients.

Au brésil, la formation infirmière initiale n'inclut aucun enseignement sur le suicide. À moins de se spécialiser en psychiatrie, les soignantes se trouvent donc démunies face aux patients à tendances suicidaires. Ce déficit de ressources professionnelles, parfois à l'origine d'un véritable malaise, n'est pourtant pas une fatalité, comme le montrent les résultats d'une étude menée dans l'État de São Paulo et présentée lors du 25e congrès de l'Association mondiale pour la prévention du suicide.

filet de protection

Après avoir connu, en peu de temps, quatre suicides dans ses locaux, l'hôpital général de Campinas a décidé d'agir. « Nous avons posé un filet de protection au premier étage du hall central et décidé d'apporter une formation aux infirmières », explique Neury Botega, psychiatre coordinateur de cette étude publiée en 2007 (encadré ci-dessous).

Le but était de voir si un cours de prévention du suicide (six heures délivrées en deux séances hebdomadaires) pouvait améliorer durablement l'attitude des personnels soignants face au risque suicidaire. Un questionnaire soumis à 255 infirmières une fois avant et deux fois après (à trois et six mois) avoir suivi la formation a révélé des progrès significatifs.

Trois catégories de propositions, auxquelles les participants devaient répondre s'ils adhéraient ou non, mesuraient l'attitude soignante dans ses dimensions cognitive (par exemple : « Je me sens capable de détecter un patient en danger »), affective (« Je préfère ne pas avoir affaire à un patient qui a tenté de se suicider ») et comportementale (« La vie est un don de Dieu, seul Lui peut la reprendre »).

cours pérennisé

Six mois après la formation, les progrès des participantes en matière de confiance en elles face aux patients se maintenaient. Depuis, le cours s'est pérennisé à Campinas et a essaimé dans d'autres villes brésiliennes telles que Porto Alegre et Belo Horizonte. Un regret toutefois : observé à trois mois, le recul de la crainte d'aborder la question du suicide avec un patient, de peur de l'induire, ne se maintient pas à six mois.

Questions à Neury Botega, psychiatre « Nous sommes partis de la pratique »

Pourquoi avoir ciblé les infirmières pour cette formation ?

Les infirmières, qui vivent au contact des patients, sont les professionnelles idéales pour tirer le meilleur profit de cette initiative, pour elles-mêmes et pour les patients dont elles s'occupent.

Comment avez-vous élaboré le questionnaire ?

Nous avons formé trois groupes de 25 infirmières et les avons fait parler à bâtons rompus du suicide en général et du risque suicidaire chez leurs patients. L'enregistrement et l'analyse de ces heures de conversation ont fait émerger la vingtaine de propositions qui composent le questionnaire. Nous ne voulions pas quelque chose de théorique, mais que ça parte de la pratique professionnelle des infirmières.

En quoi consiste le cours ?

Nous abordons l'impact du suicide en termes de santé publique, les tabous dans la relation soignant-patient suicidaire, les désordres psychiques associés au suicide comme la dépression, l'alcoolisme, le délire. Nous acquérons des techniques basiques d'entretien et nous apprenons à évaluer le risque.