L'Infirmière Magazine n° 257 du 01/02/2010

 

Fonction publique hospitalière

Juridique

L'autorité hiérarchique dispose d'une grande latitude pour engager des poursuites contre l'un de ses agents. Mais elle doit respecter des règles rigoureuses. Et les droits du fonctionnaire.

Une infirmière hospitalière titulaire ne peut être sanctionnée que pour des fautes constituant une rupture de ses devoirs, à savoir la violation de ses obligations issues de la loi de 1983 et des éléments développés par la jurisprudence (cf. notre numéro de janvier 2010). Si l'autorité hiérarchique dispose d'une très large marge d'appréciation sur l'opportunité des poursuites et le choix de la sanction, elle doit respecter les règles de procédure et la liste précise et limitative des sanctions, et motiver sa décision.

Courriers à l'agent

Quelle que soit la sanction envisagée, un courrier doit être envoyé à l'agent, en recommandé avec accusé de réception. Il indique clairement la décision d'engager une procédure disciplinaire, les faits qui motivent la décision et la faute à laquelle se rattachent les faits, les conséquences de cette faute sur la prise en charge des patients, sur le déroulement et l'organisation des soins ou du service. Il mentionne également le droit de l'agent de consulter l'intégralité de son dossier, de se faire accompagner par un ou plusieurs défenseurs de son choix ou de se faire représenter, ainsi que la date de l'éventuelle convocation devant le directeur. Les sanctions autres que l'avertissement et le blâme nécessitent l'avis du conseil de discipline. Dans ce cas, le courrier précise aussi cette saisine et le droit à la communication du rapport remis au conseil de discipline et des documents qui y sont éventuellement annexés.

Une fois accomplies les formalités d'information, d'engagement de la procédure et d'exercice des droits de la défense, l'établissement adresse à l'agent un nouveau courrier, avec accusé de réception, au moins quinze jours avant la réunion du conseil de discipline. Il indique la date, l'heure et l'endroit où se tiendra le conseil et la liste exhaustive des personnes y siégeant (afin que l'agent puisse exercer son droit de récusation). Il comporte également le rapport introductif, la lettre par laquelle l'agent a été informé de la procédure et le procès-verbal de communication de son dossier.

Pour non-respect du délai de convocation d'un fonctionnaire devant le conseil de discipline, la cour administrative d'appel de Bordeaux, dans un arrêt du 27 novembre 2007, a annulé une sanction de mise à la retraite d'office. L'annulation n'empêche pas l'établissement de réengager une procédure disciplinaire, les juges ne s'étant pas prononcés sur la légalité interne (le bien-fondé de la sanction), mais sur la légalité externe (vice de procédure).

Conseil de Discipline

Avant toute décision, sauf pour un blâme et un avertissement, la commission administrative paritaire doit être consultée. Composée à égalité de représentants du personnel élus et de représentants désignés par l'administration, elle siège en commission restreinte (conseil de discipline) lorsqu'elle est saisie de questions disciplinaires. L'administration lui transmet un rapport circonstancié, lequel indique clairement les faits reprochés (avérés, étayés et incontestables, détaillés, précis, concordants) et les circonstances. Il précise par ailleurs en quoi il y a manquement aux obligations du fonctionnaire.

Le conseil de discipline émet un avis motivé sur les suites qui doivent être réservées, selon lui, à la procédure disciplinaire. Il se base sur le rapport, les observations écrites, les déclarations orales, voire les résultats de l'enquête complémentaire qu'il peut demander s'il ne s'estime pas assez éclairé sur les circonstances. La proposition de sanction est transmise par le président du conseil à l'autorité, qui n'est pas liée par cet avis, et à l'agent. Le conseil de discipline doit se prononcer dans un délai d'un mois à compter du jour où il a été saisi par le rapport de l'autorité ou dans un délai de deux mois s'il a demandé une enquête.

L'autorité informe rapidement l'agent de la sanction. Si celle-ci est plus sévère que celle proposée par le conseil, l'agent dispose d'un mois à compter de la réception de la notification de la décision pour saisir éventuellement la Commission nationale des recours. Un recours gracieux auprès de l'administration et un recours contentieux devant le tribunal administratif peuvent être intentés dans les deux mois suivant la notification de la sanction.

LES TEXTES DE RÉFÉRENCE

- Décret n°2003-655 du 18 juillet 2003 relatif au fonctionnement des commissions administratives paritaires et du conseil de discipline.

- Article 10 du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif aux conditions de saisine de la Commission des recours.

- Article 20 du décret n° 88-981 du 13 octobre 1988 relatif au droit, pour l'agent, l'autorité dont émane la décision ou les mandataires qu'ils désignent à cet effet, de prendre connaissance du dossier soumis à la commission des recours.

À RETENIR

La procédure disciplinaire obéit à des règles très rigoureuses, qu'il s'agisse du formalisme des courriers adressés à l'agent ou de la rédaction du rapport circonstancié, préalable indispensable à l'éventuelle saisine du conseil de discipline. Le non-respect, par l'autorité hiérarchique, des dispositifs prévus par la loi, peut avoir pour conséquence l'annulation d'une sanction par le tribunal administratif.