psychiatrie
Dossier
Non-stigmatisation, travail avec les proches, réhabilitation sociale... L'HAD en psychiatrie comporte de nombreux points forts soulignés par de multiples expériences.
L'hospitalisation à domicile (HAD) propose une intervention régulière, intensive, et coordonnée du personnel hospitalier au domicile du patient. Elle permet d'observer et de soutenir le patient dans son environnement familier et de préprarer sa réhabilitation sociale. Si les soignants des unités d'HAD se montrent convaincus de la justesse de leur mode d'intervention pour la majorité des patients qu'ils suivent, ce type de prise en charge présente également des limites.
L'hospitalisation à domicile, expérimentée en médecine générale dès les années 1950, fait ses débuts en psychiatrie dans les années 1970 avec l'apparition des secteurs. Depuis, les textes réglementaires se sont succédé (cf. encadré), qui en dessinent assez nettement les contours. Cette prise en charge, coordonnée par le médecin de l'unité, s'appuie largement sur l'implication des infirmières. En complément de ces visites, le médecin psychiatre, un psychologue ou d'autres membres de l'unité se déplacent également à domicile. Le patient peut à tout moment entrer en contact téléphonique avec l'unité, et un relais est organisé vers les structures adéquates, hors des heures de prise en charge. L'HAD en psychiatrie permet d'éviter, de raccourcir ou de prolonger un séjour à l'hôpital. Elle favorise la réadaptation sociale du patient, ce qui constitue en soi un facteur thérapeutique. Elle s'intègre dans la pratique de réseau. Pour le moment, elle n'est mise en oeuvre que par des établissements de santé publique ou privés reconnus d'utilité publique.
Lors de son admission, on explique au patient les modalités de sa prise en charge, et son adhésion est sollicitée. La durée, la nature, la fréquence des interventions dépendent de son état, de ses besoins et de l'orientation prise par l'équipe hospitalière. La durée de prise en charge peut varier de quinze jours à un an. Ainsi, l'équipe du Service de soins intensifs intégrés dans la cité (SIIC) de l'Établissement public de santé mentale (EPSM) de Lille assure des interventions courtes centrées sur l'urgence. Un psychiatre et une infirmière interviennent dans les vingt-quatre heures après l'appel téléphonique, et l'admission est prononcée dès la première visite.
Pour l'unité d'HAD infanto-juvénile de Denain, tournée vers la psychothérapie, trois visites d'observation à domicile et une consultation avec la psychiatre ou la psychologue de la structure sont nécessaires avant d'établir le projet de soins. La prise en charge en HAD est ensuite évolutive. Ce sont les observations, lors des visites à domicile, les discussions et l'interaction avec le patient qui réorientent les interventions. Le changement dans le cadre de l'HAD est impulsé par le médecin coordinateur de l'unité.
L'HAD permet d'observer le patient dans son cadre de vie et d'interagir directement avec lui. La tenue d'une maison ou d'un appartement informe sur l'état d'une personne qui vit seule. L'intervention à domicile est aussi un moyen de surveiller la bonne prise de médicaments. C'est la raison pour laquelle les interventions des infirmières de l'unité d'HAD de l'EPS de Ville-Évrard, qui ont lieu deux fois par jour en début de prise en charge, s'effectuent le plus souvent en binôme : l'une est plus dans l'observation, tandis que l'autre se concentre sur l'entretien infirmier.
Les soignants parlent avec la personne de son état de santé, écoutent ce qui la préoccupe et ce qui la fait souffrir. Les difficultés de la vie quotidienne, ou liées à la prise du traitement sont également abordées. « Nous essayons d'amener le patient à un discours plus cohérent, explique Franck S, infirmier à Ville-Évrard. Il arrive que les patients soient dispersés dans leurs propos. Nous rassemblons les éléments et les remettons en ordre. Cela les rassure. » Les intervenants changent au fil des visites afin d'éviter transfert, contre-transfert, ou clivage. La proximité qu'induit la visite à domicile exige du professionnel une vigilance constante pour garder la bonne distance thérapeutique. La vigilance est l'un des maîtres mots de l'intervention à domicile. François Joly, infirmier au SIIC de Lille, s'enthousiasme : « Nous devons sans cesse évaluer au mieux l'état du patient. Certaines personnes que nous suivons ne pourraient pas être suivies à domicile dans d'autres secteurs. Nous devons prodiguer un soin précis et rapide. Nous sommes les yeux et les oreilles du médecin. » Dès que l'infirmier observe une évolution de l'état du patient, il en réfère au médecin psychiatre d'astreinte. Ces échanges se font par téléphone, mais si une incertitude subsiste, le médecin gagnera lui aussi le domicile.
Les patients se sentent réconfortés d'être soutenus chez eux. François Joly est persuadé des bienfaits de l'HAD : « J'ai travaillé auparavant dans un service d'hospitalisation à temps complet. Je m'aperçois qu'une part importante de mes patients d'alors auraient pu éviter une prise en charge en secteur fermé. Et cela aurait été préférable pour eux. C'est rassurant d'être chez soi. Et nous assurons un accompagnement poussé, au plus proche. »
À l'HAD infanto-juvénile de Denain, les visites sont assurées une fois par semaine par deux « intervenantes principales ». Il s'agit de membres de l'équipe : infirmière psychiatrique, infirmière puéricultrice, psychomotricienne ou éducatrice. Deux fois par mois, une « intervenante psy » se rend chez les familles. Les premières sont au coeur de la situation familiale et soutiennent pères et mères dans leurs fonctions parentales en travaillant la problématique du lien psychique, affectif, éducatif et social. Elles apportent avec elles un sac contenant des jeux, qui faciliteront l'interaction entre l'enfant, ses parents et les professionnelles. « Si des mères ont elles-mêmes été victimes de maltraitance, elles pourraient reproduire ce qu'elles ont vécu, explique Sylvie Specq, infirmière psychiatrique. Quand nous avons repéré ce qui se joue, nous faisons tout pour les aider à mobiliser leurs propres compétences pour sortir de cette logique, apprendre d'autres manières d'être. Je me souviens de cette maman très dure avec sa fille ; quand elle lui brossait les cheveux, cela laissait des marques. J'avais apporté des tampons et des enveloppes pour jouer avec la petite fille. Un peu plus tard, je me suis aperçu que la mère tamponnait ses propres enveloppes de Winnie l'ourson. Elle se retrouvait alors en situation de petite fille et vivait le plaisir du jeu. C'est ce qui permet ensuite de se mettre à la place de son enfant, de mieux le comprendre, lui et ses besoins. » En complément, ces intervenantes travaillent en atelier avec le jeune patient, au local de l'unité.
Lors de la prise en charge des patients adultes, l'HAD met en place un travail avec les familles. Ce point est fondamental, puisque le contexte environnemental affectif et social est déterminant pour l'évolution de l'état du patient. Ici encore, l'observation des interactions familiales, beaucoup plus spontanées que dans un milieu médical, est riche d'enseignements. Les interventions à domicile instaurent une plus grande proximité avec la famille et un travail avec elle. Les proches formulent plus facilement à domicile questions et appréhensions. Franck S, infirmier de l'unité d'HAD de Ville-Évrard, souligne l'importance du dialogue avec la famille : « Nous leur expliquons ce que l'on fait et pourquoi on le fait. Nous les informons également sur la maladie de leur proche. » Les entretiens avec la famille s'avèrent également précieux pour dissiper malaises et incompréhensions. « Cela nous permet, explique Dina Sakh, psychiatre à l'EPS de Ville-Évrard, d'expliquer à la famille qu'une personne n'est pas paresseuse mais déprimée. Ou bien, quand certains se plaignent que leur proche ne veut pas passer la soirée avec eux devant la télévision, nous leur faisons comprendre que c'est son trouble psychotique qui lui fait fuir le petit écran. »
L'HAD en psychiatrie participe au travail de réhabilitation sociale du patient. Le fonctionnement en réseau peut alors s'avérer fondamental. Qu'il s'agisse de tenir mieux en ordre son logement ou de retrouver le contact avec la ville, la personne prise en charge peut formuler son besoin d'aide. Si elle est assez autonome pour le faire, elle effectuera les demandes nécessaires auprès des services sociaux. Si c'est impossible, l'infirmière l'aidera à faire les démarches pour qu'une assistante sociale ou une auxiliaire de vie puisse intervenir à domicile. Si une jeune maman semble présenter des troubles dans sa relation avec son enfant, le soignant de l'HAD évoquera cette situation avec des professionnels de la petite enfance (PMI, ASE) lors de réunions pluri-professionnelles. C'est avec ceux-ci que la meilleure décision sera prise : dans les cas les plus graves, le bébé peut être placé transitoirement. En fin de prise en charge, l'infirmière prendra contact avec une homologue de ville afin d'anticiper et de préparer la prise de relais.
À l'EPSM de Lille, les patients qui suivent une HAD se voient proposer de participer à différentes activités thérapeutiques organisées par le secteur. Pratiques artistiques et sportives, activités manuelles ; le choix est large et peut satisfaire tous les goûts. Une quarantaine de lieux accueillent ces ateliers, dont certains, dans un souci de mixité et de non-stigmatisation, sont également fréquentés par des personnes qui ne sont pas prises en charge par le secteur. Ces activités seront poursuivies après la sortie de l'HAD. Ici encore, il s'agit de préparer l'avenir.
Pour les HAD infanto-juvéniles, la possibilité d'établir un Projet Personnel Scolaire permet à l'enfant de suivre une scolarité qui prend en compte ses particularités mais qui, en même temps, l'aide à sortir du cadre de la prise en charge. L'occasion pour lui de montrer ce qu'il sait faire, sans que l'on se concentre sur ses troubles. À Denain, des activités sont mises en place pour sortir la famille de son environnement habituel. Ainsi, suite aux effets thérapeutiques constatés lors de sorties en groupe, un atelier mère-enfant a été mis en place. Il a lieu tous les mois, autour du projet de la fabrication d'un jeu. « Cela fonctionne très bien, estime Sylvie Specq. C'est un temps de vacances, et les mères entre elles s'apportent beaucoup. Elles se donnent des conseils par rapport à leur relation avec leur enfant. Elles sont beaucoup plus directes que nous. Cela a des effets thérapeutiques très bénéfiques. »
Le contact avec la médecine de ville est également établi. En cas d'affection somatique, les infirmières font appel à des médecins de ville et accompagnent le patient à leur cabinet s'il n'est pas en mesure de faire ces démarches lui-même. Le SIIC lillois, par essence ouvert sur la ville, implique le médecin traitant tout au long de l'HAD. Dès la première visite, à laquelle il peut participer, le médecin de ville notifie la prise en charge. Il est ensuite informé des évolutions des interventions à domicile et est sollicité s'il faut modifier le traitement. Cela assure un bon suivi du patient à l'issue de son hospitalisation. Il est même prévu, à terme, de mettre en place à Lille un dossier médical partagé avec la médecine de ville.
Par ailleurs, le travail en réseau favorise la prévention. Située dans une région particulièrement touchée par le chômage, l'unité d'HAD infanto-juvénile de Denain prend souvent en charge des familles à problèmes multiples. Dans la majorité des cas, celles-ci ne font pas appel aux structures de la psychiatrie de secteur. Il s'agit d'aller vers les familles. L'équipe de l'HAD tient au moins une fois par mois une réunion avec des services extérieurs, pédiatres, personnel des PMI, ou des écoles qui viennent leur présenter des situations familiales préoccupantes. Les membres de l'unité sont également en contact régulier avec le personnel des PMI et des UTPAS (Unités territoriales de prévention et d'action sociale). Grâce à ces contacts fréquents, les situations nécessitant une HAD sont repérées.
Les soignants des unités apprécient les surprises que leur réservent les interventions à domicile et qui sont autant de situations où leurs capacités d'adaptation sont sollicitées. Ils insistent sur l'intérêt de la non-stigmatisation inhérente à l'HAD. Ils estiment qu'en général cette prise en charge donne de bons résultats : une autonomisation de la personne et une orientation vers une prise en charge ambulatoire, plus légère. Une étude effectuée à Ville-Évrard (cf. encadré) semble confirmer cette tendance. De leur côté, les responsables insistent sur la nécessité d'un personnel bien formé, réactif et expérimenté pour mener à bien ce type de prise en charge. Le médecin chef de service de l'HAD infanto-juvénile de Denain veille à ce que le personnel de l'unité entretienne ses compétences. Un système original a été instauré, qui offre des formations complémentaires d'abord aux dernières arrivées dans le service. Ce qui permet notamment de diversifier les ateliers proposés par l'unité : poney, travail sur la musique, sur le corps, ou avec l'eau. La sortie de ce type d'hospitalisation est décidée quand la situation du patient est stabilisée ou quand il paraît clair que l'HAD n'est pas, ou n'est plus, la solution adaptée. Dans tous les cas, le patient ou sa famille restent pris en charge par le secteur et par le médecin de ville.
L'HAD trouve ses limites quand un patient ou une famille ressent les interventions à domicile comme une intrusion, une remise en cause trop importante, ou tout simplement une gêne. Les professionnels de l'HAD, notamment dans les prises en charge longues, sont régulièrement confrontés à l'épreuve de la porte close. Dans ce cas, il peut arriver, assez exceptionnellement, que les soignants de Ville-Évrard appellent les pompiers pour les patients dont ils craignent un passage à l'acte. Dans d'autres situations, si le patient n'a pas ouvert lors de la première visite, d'autres passages seront envisagés dans la journée. Au besoin, les visites seront espacées (sur prescription médicale) si la présence quotidienne des soignants au domicile paraît trop pesante pour le patient. L'absence du patient à son domicile signifie également que celui-ci n'est tout simplement plus prêt à être suivi en HAD. Grâce au dialogue avec les partenaires du secteur, une solution plus adaptée est envisagée. « Cela a été le cas pour un patient qui ne cessait d'alterner HAD et CMP (Centre médico-psychologique, ndlr), sans succès, relate Dina Sakh. Nous nous sommes aperçu qu'il avait besoin qu'on l'aide à prendre son traitement, mais que l'intervention à domicile ne lui convenait pas. Nous avons alors mis en place un dispositif plus souple : il passe tous les jours prendre son traitement au CMP. À présent, cela fonctionne très bien. »
Ces difficultés sont également rencontrées par l'équipe de Denain. Quand la famille est en rupture de soins, il s'agit de tenter, quoi qu'il arrive, de garder le lien. « Même si les familles manquent les rendez-vous, nous maintenons le calendrier, précise Gisèle Delattre, éducatrice de jeunes enfants. Nous continuons à les appeler avant un rendez-vous, même si cela fait un moment que nous ne parvenons plus à les rencontrer. Nous leur rappelons ainsi que nous pensons à eux. Nous sommes persuadées que cela a des effets thérapeutiques : ils existent toujours, ils comptent pour nous, même s'ils sont absents. »
Il peut s'avérer que l'HAD ne fasse pas ses preuves quand la prise en charge nécessite une coupure avec la famille ou quand celle-ci s'avère trop défaillante. Si l'organisation du secteur l'autorise, on fait appel à l'accueil familial thérapeutique. Le SIIC de Lille suit ainsi douze personnes hébergées dans dix familles. Un environnement familial temporaire et cadrant est susceptible de débloquer des situations. Par la suite, le patient pourra éventuellement être dirigé vers un logement autonome.
Une partie des HAD se termine par une admission en hospitalisation à temps plein. Certains patients, certaines pathologies, nécessitant le cadre de l'hôpital. Yves Canneva, président de l'Unafam, rappelle que « l'hôpital conserve un rôle de contention irremplaçable. Quand les gens vont très mal, ils ne peuvent pas rester à domicile. Il est nécessaire de les maintenir dans un lieu de calme, dont les murs représentent une protection ».
Enfin, l'HAD laisse sceptique une partie des professionnels qui estiment que le suivi volontaire en ville est la meilleure alternative à l'hospitalisation.
La question économique concernant l'HAD n'est pas véritablement tranchée. En moyenne, en psychiatrie, l'hospitalisation à domicile est facturée de deux à trois fois moins cher que l'hospitalisation à temps plein. La prise en charge à domicile évitant les frais de restauration et d'hébergement. C'est la raison pour laquelle l'HAD, d'une manière globale, est mise en avant dans les plans de santé publique. Récemment, la ministre de la Santé s'est déclarée favorable au lancement d'une nouvelle étude pour comparer les coûts réels de l'HAD avec ceux de l'hospitalisation à temps complet.
Les professionnels des structures d'HAD en psychiatrie attendent un texte apportant une réglementation et une évaluation précises. Un document est en cours d'élaboration au ministère. Mais avec les difficultés suscitées par la mise en place de la valorisation à l'activité en psychiatrie, une tarification claire risque de se faire attendre. Plusieurs établissements intéressés par l'ouverture d'une unité d'HAD sont freinés par l'absence de réglementation et d'un cadre économique clairs. Les établissements de Lille et de Ville-Évrard ont créé leur unité en fermant des lits d'hôpital, ce qui peut faire passer l'HAD pour un danger pour l'hospitalisation à temps plein. Pourtant, la coexistence de ces deux structures au sein du secteur paraît tout à fait réalisable, et même bienvenue. Il est certain que l'achèvement d'une réglementation de l'HAD facilitera l'ouverture de nouvelles structures, ce qui permettra d'approfondir les connaissances sur les meilleures indications pour ce type de prise en charge.
Franco Basaglia, psychiatre italien, est le père de la loi 180 de 1978 qui a programmé la fermeture des asiles en Italie et prôné un réaménagement des soins psychiatriques tourné vers une réhabilitation sociale du malade mental. Après avoir fermé l'hôpital psychiatrique de Trieste en 1980, il developpe une offre de soins en santé mentale découpée par district géographique représentant des bassins de population. Des centres de santé mentale ouverts 24 heures sur 24 accueillent les patients au plus près de chez eux. Des soins et visites à domicile sont aussi organisés pour une partie des patients. Des services de prise en charge de la toxicomanie, des problèmes de démence des personnes âgées, d'hébergements protégés et de réhabilitation sociale, viennent compléter l'offre de soins sur chaque territoire. La police est également sensibilisée et intervient, si besoin, de manière adéquate. Cette nouvelle organisation des soins a été un succès, bien que des différences existent encore selon les régions et la culture de chacune.
Olivia est prise en charge en HAD depuis trois jours, et le restera jusqu'à son hospitalisation à temps plein dans un service spécialisé ; sa mère s'inquiétait de sa perte de poids. Livrée à elle-même en attendant que sa mère rentre du travail, Olivia accueille la soignante avec un sourire teinté de tristesse. « Je peux les appeler quand je veux. Cela me fait du bien de pouvoir parler à quelqu'un d'autre qu'à mes parents. » Dans le salon, « Un dîner presque parfait » passe à la télévision. L'infirmière a repéré la bonne odeur de la soupe préparée par la jeune fille, et lui demande sa recette. Celle-ci se sent moins stressée depuis qu'elle connaît la date de son admission à l'hôpital, mais ses angoisses l'assaillent toujours quand elle pense à l'alimentation et au baccalauréat. « Cela me rassure que les gens du service me rendent visite, comme le psychiatre hier et surtout les infirmiers. Ils viennent régulièrement, cela veut dire qu'ils sont compétents. Ils sont présents. Cela prouve qu'ils s'intéressent à la personne. Et ici, je suis plus à l'aise pour parler que dans un bureau. »
Du fait de l'absence d'une réglementation précise et unifiée, ce réseau n'a pas été constitué. L'équipe de Ville-Évrard, qui a été la première en Ile-de-France à voir son dispositif validé par le Comité régional pour l'organisation sanitaire et sociale (CROSS), accueille régulièrement en observation les membres d'autres établissements. De son côté, l'EPSM de Lille participe à deux réseaux internationaux d'échanges d'expériences.
Contacts à Ville-Évrard : Patricia Pichard, p.pichard@epsve.fr ;
à Lille : Nicolas Daumerie, ndaumerie@epsm-lille-metropole.fr
L'article 4 de la loi hospitalière du 30 décembre 1970 pose les principes généraux de l'HAD : « Les services des centres hospitaliers peuvent se prolonger à domicile, sous réserve du consentement du malade ou de sa famille, pour continuer le traitement avec le concours du médecin traitant. » Un des textes fondateurs du secteur, le décret 86-602 du 14 mars 1986, souligne dans son article 9 que : « La prévention, le diagnostic et les soins sont assurés notamment à la résidence des patients ». L'arrêté du même jour, relatif aux équipements et aux services de lutte contre les maladies mentales, précise que les services d'HAD « organisent des prises en charge thérapeutiques à domicile, associées s'il y a lieu à des prestations d'entretien nécessitées par l'état de dépendance du patient ». La circulaire de la DHOS (Direction de l'hospitalisation et de l'organisatin des soins) du 4 février 2004 aborde notamment les modalités de l'HAD en psychiatrie. Elle stipule que « dans un contexte de graduation des soins, l'HAD se caractérise par une intensité, une continuité, une coordination et une structuration des soins correspondant au rôle et aux objectifs qui lui incombent ».
L'unité d'HAD de Ville-Évrard a réalisé une enquête pour les patients qu'elle a pris en charge de 1999 à 2004. Parmi les chiffres les plus significatifs :
- 340 personnes ont été prises en charge durant cette période ;
- Plus des deux tiers des patients souffraient de psychoses au sens large ;
- Un quart des patients était sous mesure de protection juridique ;
- Les femmes ont été prises en charge 2,6 fois plus que les hommes ;
- 67 % des personnes prises en charge vivaient seules ;
- En fin d'HAD, 71 % des patients ont été orientés en CMP.