L'Infirmière Magazine n° 261 du 01/06/2010

 

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Les infections du site opératoire n'ayant pas livré tous leurs secrets, les chercheurs mènent l'offensive sur plusieurs fronts.

Lors du Forum international de chirurgie aseptique, à La Villette, les 26 et 27 mars, de nouvelles perspectives de recherche ont été dégagées. Alain Lortat-Jacob, chirurgien orthopédiste à l'hôpital Ambroise-Paré de Boulogne-Billancourt (92), a souligné que les efforts pour limiter la contamination directe pendant l'opération montraient à présent leurs limites.

Alors que les procédures se complexifient, on semble buter sur un « taux incompressible d'infections ». Le Pr Lortat-Jacob a insisté sur la différence entre contamination et infection : « Une chirurgie sans contamination est un mythe. Par contre, le but d'une intervention chirurgicale est d'opérer des choix compatibles avec l'équation d'Altemeier ». Celle-ci prend en compte le rapport entre la virulence des germes et la résistance de l'hôte. Les scientifiques n'expliquent pas la première, il reste donc à travailler sur le deuxième élément. Le chirurgien a rappelé que les travaux de Kluytmans prouvent que les malades s'infectent aux germes dont ils sont eux-mêmes porteurs. Pour lui, il est fondamental que la recherche porte sur l'adhérence bactérienne.

Prophylaxie à la carte

Jean Carlet, médecin-réanimateur et consultant, a commenté, pour sa part, les récents travaux sur la génétique bactérienne : ils montrent que 70 % à 80 % des infections du site opératoire sont liées au même germe que celui porté dans le nez en préopératoire. Le cheminement des germes reste mal connu : la voie hématogène est une hypothèse séduisante. Jean Carlet a pointé l'urgence à travailler sur la relation entre la colonisation préopératoire dans différents sites et l'infection postopératoire : « Cela permettrait d'élaborer une prophylaxie à la carte, qui pourrait s'affiner dans les dix années à venir. »

Vers des prothèses plus sûres

Autre question soulevée lors du forum, l'infection des prothèses. Véronique Migonney, responsable du Laboratoire des biomatériaux et polymères de spécialité (université Paris-13), a rappelé ce chiffre : 1,5 % des prothèses articulaires sont infectées. Pendant l'intervention chirurgicale, une course de vitesse a lieu entre les cellules du patient et les bactéries. Celles-ci développent ensuite un biofilm les protégeant des macrophages de l'hôte. Le laboratoire travaille sur la greffe de polymères bioactifs qui jouent un effet inhibiteur sur les protéines de liaison, indispensables à la colonisation des germes. Ces polymères semblent faire leurs preuves : ils peuvent se greffer sur tous types de surface. Les travaux récents de l'équipe de Véronique Migonney ont démontré qu'in vivo, ces matériaux ont un effet inhibiteur dans 90 % des cas.