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LE POINT SUR
Anodine dans la plupart des cas, la toxoplasmose peut être redoutable chez la femme enceinte, pour le fœtus, et chez les patients immunodéprimés. Elle est présente sous tous les climats.
Maladie parasitaire due à Toxoplasma gondii, elle se contracte le plus souvent par l’ingestion d’aliments souillés (viandes, fruits, légumes) ou par les mains sales. Ce protozoaire existe sous trois formes :
→ les œufs (oocystes) éliminés dans les déjections du chat et qui contaminent les aliments ;
→ les kystes, qui sont des formes encapsulées non pathogènes et qui restent à l’état latent dans le tissu nerveux et les muscles des hommes et des animaux ;
→ les formes végétatives (tachyzoïtes), qui sont les formes de multiplication active.
La toxoplasmose peut évoluer sous trois formes cliniques :
→ la toxoplasmose acquise : elle peut être asymptomatique ou associer de la fièvre, une adénopathie et de la fatigue. Cette forme évolue dans 80 % des cas vers une guérison spontanée ;
→ la toxoplasmose congénitale, transmise au fœtus lors du passage transplacentaire du parasite (dans 30 % des cas). In utero, cette forme entraîne des fœtopathies graves ou des décès. Chez le nouveau-né, elle est asymptomatique dans 80 % des cas, mais elle peut s’exprimer sous forme d’encéphalite, de calcifications cérébrales, de choriorétinite, mais aussi sous forme d’atteintes viscérales.
Chez l’enfant, il existe des formes retardées : crise convulsive, retard psychomoteur, choriorétinite.
→ la toxoplasmose de l’immunodéprimé, qui survient lors de la réactivation des formes kystiques logées dans les muscles, le tissu nerveux et les yeux. Elle entraîne des encéphalites, des choriorétinites et des atteintes viscérales.
Il est réalisé grâce à la sérologie et à la biologie moléculaire. Cet examen est obligatoire lors du bilan prénuptial et en début de grossesse. S’il est séronégatif, il doit être renouvelé mensuellement tout au long de la gestation. En cas de séroconversion pendant ce temps-là, il est nécessaire de réaliser une étude du liquide amniotique pour mettre en évidence une toxoplasmose fœtale. Si celle-ci est avérée, une échographie sera réalisée chaque mois afin d’observer d’éventuelles lésions fœtales.
Lors de la naissance d’un bébé, l’imagerie médicale permettra d’évaluer les lésions neurologiques et la présence de calcifications cérébrales.
Chez la personne immunodéprimée, on utilise les examens d’imagerie pour localiser les atteintes, et l’on peut rechercher les anticorps antitoxoplasme dans l’humeur aqueuse.
Les traitements et leur réussite sont légèrement différents selon la forme clinique de la maladie. Ils peuvent être curatifs, mais aussi prophylactiques pour éviter la reviviscence de la forme kystique chez l’immunodéprimé. Le toxoplasme étant un parasite intracellulaire, les produits doivent diffuser de façon importante dans les cellules.
Actuellement, il existe peu de médicaments ayant l’indication validée dans le traitement : spiramycine (Rovamycine); antifoliniques : pyriméthamine (Malocide); sulfamides (Adiazine, Bactrim). Il existe une association sulfadoxine et pyriméthamine (Fansidar). D’autres molécules efficaces mais non validées dans le traitement sont utilisées hors autorisation de mise sur le marché lorsqu’il y a intolérance aux molécules de référence (macrolides, clindamycine, télithromycine, dapsone, tétracyclines, atoquavone, cytokines et immunomodulateurs), uniquement chez les patients immunodéprimés.
Le plus souvent asymptomatique, la toxoplasmose ne nécessite pas de traitement. Lorsque les signes cliniques persistent, la spiramycine (macrolides) peut être prescrite.
→ Chez la femme enceinte, lorsqu’il y a séroconversion, il faut instaurer un traitement à base de spiramycine (9 MUI/j) pour limiter les risques de transmission au fœtus, à poursuivre tout au long de la grossesse. Si l’amniocentèse est positive, les médicaments prescrits sont la pyriméthamine, la sulfadoxine ou la sulfadiazine. L’interruption de grossesse n’est envisagée qu’en cas de lésions fœtales.
→ Chez le nouveau-né, après la mise en évidence clinique et sérologique, un traitement par pyriméthamine et sulfamide sera nécessaire pendant un an.
En cas de reprise à l’âge adulte, sous forme de choriorétinite, un traitement à base de pyriméthamine et de sulfamides sera instauré.
→ Chez la personne immunodéprimée, un traitement curatif à base de pyriméthamine et de sulfadiazine sera mis en place.
→ Apparition de troubles digestifs et de manifestations cutanées quel que soit le traitement.
→ Modifications de la formule sanguine imposant une surveillance tous les 8 à 15 jours et nécessitant, le cas échéant, la suspension du traitement.
Les médicaments antifoliniques créant des carences en acide folique, il est nécessaire d’en apporter une supplémentation régulière. Lors d’un traitement par Malocide, il est important de surveiller et de favoriser la diurèse en absorbant deux litres de liquide alcalin par jour (Vittel, Contrex, Évian).
Lors d’un traitement par Adiazine, boire un litre et demi d’eau par jour pour éviter la formation de cristaux urinaires. Ne pas boire de thé, qui empêche l’absorption de fer alimentaire. Ne pas s’exposer au soleil, pour éviter le risque de photosensibilisation.
Sur le plan psychologique, le diagnostic d’une toxoplasmose chez la femme enceinte génère une grande inquiétude. La crainte de transmettre le parasite au fœtus empêche de poursuivre la grossesse de façon sereine.
TOUS NOS REMERCIEMENTS AU PR HERVÉ PELLOUX, PARASITOLOGIE-MYCOLOGIE INSTITUT DE BIOLOGIE ET PATHOLOGIE, CHU DE GRENOBLE
En France, la séroprévalence de la toxoplasmose est de 45 % dans la population générale. Chez la femme en fin de grossesse, elle est de 54 %, avec une répartition inégale selon les régions de France : basse prévalence dans les régions Est et Centre-Est, moyenne dans le Centre-Ouest, et supérieure à la moyenne dans le Nord-Ouest et le Sud. Lorsque la mère est séropositive au toxoplasme, la transmission au fœtus se fait dans 30 % des cas, en général 4 à 8 semaines après la colonisation placentaire. La toxoplasmose congénitale représente 1 à 2 cas sur 1 000, ce qui entraîne 700 à 1500 cas par an.
Il est vivement conseillé à la femme enceinte non immunisée et à la personne immunodéprimée de :
→ se laver les mains et de se brosser les ongles avant les repas et après avoir manipulé de la viande crue ou des légumes souillés par la terre ;
→ de laver les légumes, les fruits et les plantes aromatiques ainsi que le plan de travail ;
→ de bien faire cuire les viandes, d’éviter d’utiliser le four à micro-ondes ;
→ d’utiliser des aliments congelés car les kystes ont été détruits ;
→ d’éviter de manipuler la litière des chats ; le cas échéant, il faut utiliser des gants.
Certains aliments sont à éviter pendant la grossesse : viandes crues ou peu cuites, marinées, fumées ; les charcuteries crues ; les légumes et les fruits non pelés ; le lait de chèvre cru ; les fruits de mer.
Les personnes les plus touchées par la toxoplasmose seront celles souffrant d’un déficit important en lymphocytes T : les séropositifs au VIH, les patients greffés de moelle, les personnes souffrant d’un cancer ou de syndrôme lymphoprolifératif. Le traitement par cortico-thérapie ou chimiothérapie cancéreuse peut être un facteur favorisant la survenue de la toxoplasmose.