L'infirmière Magazine n° 279 du 15/05/2011

 

ÉDITORIAL

Révoltant, il n’y a pas d’autre mot pour qualifier la solution miracle imaginée par la direction de l’HAD à l’AP-HP pour « remplacer » les quelque 70 infirmières et infirmiers qui ont usé de leur droit de retrait (voir notre actu p. 6). Ils s’estiment exposés à des risques lors de la préparation des produits de chimiothérapie ? Qu’à cela ne tienne ! Faisons appel aux infirmières libérales, qui, elles, n’ont pas de droit de retrait à faire valoir ! Ou comment briser un mouvement d’une ampleur inédite – le droit de retrait est rarissime – en recourant au privé et en faisant fi de la santé des soignants… Cet épisode s’est déroulé peu avant la Journée mondiale pour la sécurité et la santé au travail, organisée le 28 avril dernier, où il était question de « promouvoir et mettre en place une culture de la santé et de la sécurité dans une économie mondialisée ». Il serait grand temps que le milieu hospitalier fasse sienne cette proposition. Il y a urgence ! L’enquête menée par la CFDT (voir p. 8) auprès de 40 000 personnels paramédicaux, si elle ne révèle rien de neuf, a le mérite de braquer momentanément les projecteurs sur la dégradation des conditions de travail à l’hôpital. Outre un sentiment de détresse inquiétant, la centrale syndicale pointe, dans son étude, une organisation médicale très critiquée par les infirmières et les aides-soignantes : non-prise en compte de la charge de travail, non-respect des temps de pause…

C’est donc bien une « culture de la santé et des conditions de travail » qu’il faudrait insufler du haut en bas de la hiérarchie hospitalière. Car le bien-être des salariés est étroitement corrélé à celui des patients et à leur sécurité (voir notre dossier p. 14). Mais comment rendre un minimum effective la prise en compte de la santé et des conditions de travail dans la gouvernance de l’hôpital ? Dans les grandes entreprises cotées en Bourse, l’évaluation des agences de notation sur leur responsabilité joue, dans une certaine mesure, un rôle contraignant. Dans les établissements hospitaliers, la démarche de certification HAS, qui englobe la responsabilité sociétale, en est encore à ses balbutiements et se concentre sur les aspects environnementaux. Une voie à exploiter, donc, en attendant une hypothétique mobilisation des professionnels.