GROSSESSE
ACTUALITÉ
DU CÔTÉ DES… COLLOQUES
Pour prévenir les difficultés qui accompagnent souvent les maternités de jeunes filles mineures, il importe d’en connaître les déterminants et les risques.
Chaque année en France, 18 000 grossesses concernent des mineures. Parmi elles, 30 % sont menées à terme – soit 4 500 naissances par an – et 70 % font l’objet d’une interruption volontaire de grossesse, selon un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales daté de février 2010.
« Depuis les années 1970 et la mise en place de politiques de prévention », les cas de grossesse adolescente « sont de moins en moins fréquents », notait cependant Florence Francillon, sage-femme à l’hôpital de Poissy-Saint-Germain-en-Laye (Yvelines) lors d’un colloque début mars
Sur le plan psychosocial, ces maternités sont rarement sans conséquences. D’où la nécessité de demeurer vigilant, de guetter des signaux d’alerte : « Après leur accouchement, de nombreuses jeunes filles sont confrontées à une rupture de formation, à l’endettement, et donc à une certaine vulnérabilité sociale, relève, ainsi, Jacques Michel. Face au départ ou à l’absence du père, il peut y avoir un isolement familial et social important, qui reste à surveiller. » Quand survient une maternité adolescente, on observe en effet que 75 % des unions parentales se terminent par une séparation au bout de cinq ans.
Au niveau obstétrical, en revanche, une enquête réalisée au CHU de Nantes montre que les grossesses de femmes mineures ne présentent pas de risques supérieurs à celles qui surviennent chez des femmes adultes
À noter aussi, l’angoisse de certaines adolescentes, qui vont jusqu’à provoquer une grossesse pour tester leur corps et vérifier qu’elles sont capables d’être enceintes. Sans forcément mesurer les conséquences de l’IVG qui, souvent, s’ensuivra. « On constate aussi qu’il y a dix fois plus de jeunes filles enceintes hors du système scolaire, note, par ailleurs, Florence Francillon. En l’absence de rite scolaire de passage, la grossesse leur permet d’espérer accéder à quelque chose et de passer à l’âge adulte, comme un diplôme le ferait. » S’ajoutent, enfin, des facteurs culturels. « Dans l’imagerie de certaines cultures, l’expérience de l’enfantement purifie », explique, ainsi, Hakima Ait El Cadi, anthropologue. « Dans beaucoup d’endroits encore, la reconnaissance sociale passe par la conjugalité. C’est le fameux “Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants”. Peut-être y aurait-il déjà matière à faire un travail sur les vidéos et les albums illustrés que l’on destine aux petites filles ? »
1– La 3e Journée humanitaire de Gynécologie sans frontières s’est tenue le 4 mars à Paris. Les propos rapportés dans cet article en sont issus.
2– Enquête réalisée de 2003 à 2007 sur 146 dossiers de femmes admises à la maternité du CHU de Nantes.