L'infirmière Magazine n° 281 du 15/06/2011

 

CONDITIONS DE TRAVAIL

JURIDIQUE

Un salarié ou un fonctionnaire ne doivent pas hésiter à dénoncer des faits constitutifs de harcèlement moral. Sans perdre de vue qu’ils répondent à une définition assez précise.

Ce que dit la loi

Le Code du travail comme le statut de la fonction publique définissent le harcèlement moral comme des agissements répétés « ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du travailleur, ainsi que d’altérer sa santé physique ou mentale ou bien de compromettre son avenir professionnel ».

Cette même définition est encore reprise par le Code pénal, qui fait du harcèlement moral un délit passible d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

L’auteur des faits

La personne à l’origine du harcèlement peut être aussi bien un supérieur hiérarchique qu’un collègue, ou encore un subalterne.

Les agissements constitutifs de harcèlement moral

Les agissements constitutifs de harcèlement moral sont tellement divers et variés qu’il est impossible, évidemment, d’en dresser une liste exhaustive. Il importe donc de savoir les reconnaître.

– Il doit d’abord s’agir de faits répétés : un acte isolé, même s’il a pu causer du tort au salarié ou au fonctionnaire, ne pourra pas être qualifié de harcèlement moral. Il n’est en revanche pas nécessaire que ces faits durent depuis longtemps.

– Ces agissements doivent engendrer, pour le travailleur, une dégradation de ses conditions de travail : par exemple, le fait de travailler dans un climat de tension, peu propice à l’accomplissement, par le salarié ou le fonctionnaire, de ses tâches, ou celui d’être affecté dans un local inadapté à un exercice professionnel correct.

– Ces agissements doivent également porter atteinte à la dignité du travailleur : brimades, dénigrements, mises à l’écart, ou encore sanctions injustifiées sont autant d’actes de nature à constituer un harcèlement moral.

– Une personne est également victime de harcèlement moral lorsque ses droits sont bafoués : il peut s’a­gir, par exemple, d’un salarié qui se verrait systématiquement refuser l’octroi d’un matériel essentiel à son activité professionnelle. Évoquons aussi l’interdiction faite à un salarié ou à un fonctionnaire de fréquenter un endroit pourtant accessible aux autres travailleurs (ex : le restaurant d’entreprise).

Notons que des faits peuvent être considérés comme constitutifs d’un harcèlement moral par les tribunaux alors que leur auteur n’avait pas l’intention de nuire. Les juridictions ont notamment admis que certaines méthodes de gestion qui occasionnent, pour les travailleurs, des agissements répétés de nature à entraîner une dégradation des conditions de travail puissent être à l’origine d’un harcèlement moral. À l’inverse, lorsque des agissements sont justifiés par une cause objective, ils ne peuvent justifier une plainte pour harcèlement moral (ex : rétrogradation à titre de sanction disciplinaire).

Mesures de prévention

La loi a prévu un certain nombre de mesures visant à empêcher ou à faire cesser les faits de nature à constituer un harcèlement moral. Par exemple, le Code du travail impose à l’employeur de prendre toutes les mesures nécessaires afin de prévenir les actes de harcèlement moral, et lui attribue l’obligation de préserver la santé physique et mentale des employés. Le règlement intérieur de l’établissement doit rappeler que le harcèlement moral est interdit, et le comité d’entreprise tout comme le CHSCT (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) doivent veiller au respect de ce règlement dans l’établissement.

Ne pas rester passif

La personne qui commet des faits de harcèlement moral se rend coupable d’une faute grave qui justifie une sanction disciplinaire. Un salarié ou un fonctionnaire ne doit pas hésiter à informer sa hiérarchie du harcèlement qu’il subit. Il pourra aussi assigner son employeur en justice, devant les juridictions civile (salariés) ou administrative (fonctionnaires) afin d’obtenir des indemnités, voire, s’il le désire, une réintégration au sein de l’établissement lorsqu’il a fait l’objet d’un licenciement injustifié. Il doit alors prouver les faits qui laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral.

À SAVOIR

Important

→ Toute mesure prise par un supérieur doit être justifiée et proportionnée au but légitime recherché, sous peine d’être constitutive d’un fait de harcèlement moral.

Il convient de préciser que la personne harcelée moralement ou celle qui témoigne en sa faveur sont protégées par la loi : toute sanction prise à leur encontre pourra être annulée par les tribunaux.

TEXTES DE RÉFÉRENCE

→ Article L. 1152-1 du Code du travail, qui concerne les salariés du secteur privé.

→ Article 6 quinquiès du titre I du statut général de la fonction publique, relatif aux fonctionnaires.

→ Article 222-33-2 du Code pénal.

→ Article L. 1152-4 du Code du travail.

→ Article L. 4121-1 du Code du travail.