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POINT SUR
Bénignes, les angines évoluent le plus souvent favorablement, même en l’absence de traitement antibiotique. L’antibiothérapie n’est justifiée que dans certaines angines bactériennes dont on sait qu’elles peuvent entraîner des complications si elles ne sont pas traitées.
L’angine est une inflammation aiguë d’origine infectieuse de l’oropharynx, prédominant au niveau des amygdales.
Les signes cliniques communs à toutes les angines sont les douleurs de la gorge, spontanées et/ou provoquées par la déglutition et l’augmentation de volume, plus ou moins importante, des amygdales palatines. La fièvre est souvent présente, d’intensité variable.
On distingue différents types d’angines, que l’on classe selon l’aspect de l’oropharynx. Les plus fréquentes (90 %) sont les angines érythémateuses (angines « rouges ») et les angines érythémato-pultacées (angines « blanches »).
Elles sont généralement d’origine virale. Dans les angines bactériennes, le germe le plus fréquemment retrouvé est le streptocoque bêta-hémolytique du groupe A (SGA), principalement chez l’enfant (entre 5 et 15 ans). Les complications des angines sont rares mais lorsqu’elles surviennent, elles sont graves et essentiellement dues au SGA : il s’agit surtout du phlegmon périamygdalien. Le rhumatisme arti-culaire aigu (RAA) et la glomérulonéphrite aiguë sont devenus rares en France métropolitaine.
À savoir : la scarlatine (rare) est due à un streptocoque du groupe A sécrétant une toxine immunogène. Touchant surtout les enfants, elle se manifeste par une angine rouge, une fièvre élevée, des douleurs abdominales, des vomissements. L’antibiothérapie est nécessaire pour éviter les complications (dont le RAA). Il est recommandé de traiter l’entourage.
L’examen clinique identifie une angine rouge ou blanche (voir infographie) mais ne suffit pas à lui seul pour établir le diagnostic d’une angine virale ou bactérienne. La réalisation d’un test de diagnostic rapide (TDR) sur un prélèvement de gorge est recommandée de manière systématique, sauf dans deux situations : chez l’enfant de moins de 3 ans (angine généralement d’origine virale), chez l’adulte lorsque le contexte évoque plutôt une infection virale (pas ou peu de fièvre, présence d’une toux, d’un enrouement ou d’une rhinorrhée…). À l’inverse, une fièvre importante, la présence d’adénopathies (ganglions) sensibles à l’examen, l’absence de toux sont en faveur d’une angine à SGA. Interprétation du test : un TDR positif confirme l’étiologie d’une angine à SGA et justifie la prescription d’une antibiothérapie. Un TDR négatif, chez un sujet sans facteur de risque de RAA, écarte la présence du SGA. En présence d’un facteur de risque du RAA (antécédent personnel de RAA, âge compris entre 5 et 25 ans associé à la notion de séjours en région d’endémie de RAA ou à des conditions sociales ou sanitaires défavorables ou à des antécédents d’épisodes multiples d’angines à SGA), la mise en culture du prélèvement pharyngé est recommandée.
Seule l’angine à SGA justifie une antibiothérapie. L’objectif est de limiter la dissémination du SGA à l’entourage, de prévenir les complications (locorégionales et RAA) et de raccourcir la durée des symptômes.
Les traitements antibiotiques de courte durée sont privilégiés pour favoriser l’observance. L’amoxicilline orale (Clamoxyl) pendant six jours constitue le traitement de première intention. Des céphalosporines sont indiquées en cas d’allergie à la pénicilline sans contre-indication aux céphalosporines : céfuroxime axétil (Zinnat), céfotiam hexétil (Taketiam, Texodil) ou cefpodoxime proxétil (Orelox). Le traitement dure quatre à cinq jours selon les molécules. En cas d’allergie aux bêtalactamines (antibiotiques précédents), un macrolide est indiqué : azithromycine (Zithromax), clarithromycine (Naxy, Zeclar), josamycine (Josacine), télithromycine (Ketek), pristinamycine (Pyostacine).
Le paracétamol est le traitement à visée antalgique/ antipyrétique de référence. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et les corticoïdes ne sont pas indiqués : ils pourraient même favoriser les complications suppuratives locorégionales. Il est recommandé de boire régulièrement (la sécheresse de la muqueuse accentue la douleur), de sucer des bonbons ou des pastilles (qui augmentent la sécrétion salivaire). Les traitements locaux (pastilles ou collutoires) contribuent également à soulager la gêne.
L’angine est une pathologie contagieuse qui se transmet par les sécrétions oropharyngées. Le risque de contagion disparaît 48 heures après le début de l’antibiothérapie.
Il repose sur le drainage de l’abcès couplé à une antibiothérapie adaptée aux germes retrouvés dans la ponction. Un traitement parentéral est souvent nécessaire (difficulté ou impossibilité de déglutir).
La mononucléose infectieuse, dû au virus d’Epstein-Barr, est une angine pseudo-membraneuse touchant l’adolescent et l’adulte jeune. La fatigue est importante, la fièvre souvent peu élevée. La prise de bêta-lactamines peut déclencher une éruption cutanée (10 % des cas) qui n’est pas une réaction allergique. Le diagnostic est orienté par la formule sanguine et confirmé par le MNI Test (recherche des anticorps). Le traitement est symptomatique (repos et antipyrétiques). En cas de gêne respiratoire liée au volume des amygdales, des corticoïdes sont prescrits.
L’herpangine (réalisant le syndrome main-pied– bouche, qui affecte surtout le jeune enfant) et la primo-infection herpétique se caractérisent par une angine vésiculeuse. Le traitement est symptomatique.
L’angine de Vincent et l’angine syphilitique sont des angines ulcéreuses et nécrotiques (présence d’une ulcération souvent unilatérale recouverte d’un enduit nécrotique). L’angine de Vincent se voit surtout chez l’adulte jeune avec une mauvaise hygiène bucco– dentaire : l’antibiothérapie doit être débutée rapidement car il existe un risque de complications, et des soins dentaires doivent être effectués. L’angine syphilitique, souvent peu douloureuse, nécessite également une antibiothérapie et la recherche d’autres infections sexuellement transmissibles associées. Le partenaire doit être traité. La diphtérie (exceptionnelle du fait de la vaccination obligatoire) réalise une angine à fausses membranes potentiellement mortelle. C’est une maladie à déclaration obligatoire qui impose l’isolement du patient, un traitement antibiotique et une sérothérapie, ainsi que l’examen de son entourage.
PAR NATHALIE BELIN, AVEC LA COLLABORATION DU DR MARTINE FRANÇOIS, SERVICE ORL, HÔPITAL ROBERT-DEBRÉ, PARIS
→ Environ 9millions d’angines sont diagnostiquées chaque année en France.
→ Pic d’incidence : chez l’enfant entre 5 et 15 ans. Rare chez l’adulte et l’enfant de moins de 3 ans.
→ 60 à 90 % (selon l’âge) des angines sont d’origine virale et ne nécessitent donc pas d’antibiothérapie.
→ Le streptocoque bêta-hémolytique du groupe A est le germe le plus fréquemment impliqué dans les angines bactériennes (20 % des angines tous âges confondus).
→ Afssaps, « Antibiothérapie par voie générale en pratique courante dans les infections respiratoires hautes », 2005. www.afssaps.fr, onglet Dossiers thématiques, Antibiotiques, Pneumologie ORL.
→ Société française d’oto-rhinolaryngologie et de chirurgie de la face et du cou, « Amygdalectomie de l’enfant, Recommandations pour la pratique clinique », 2009. www. orlfrance.org, onglet Recommandations.