RESPONSABILITÉ PÉNALE
JURIDIQUE
Victimes d’erreurs de la part des soignants, certains patients ne se satisfont pas d’une action en réparation devant le tribunal civil ou administratif et saisissent le juge pénal.
Le Code pénal sanctionne, bien entendu, les atteintes à la personne les plus graves, parmi lesquelles les atteintes à la vie, dont l’homicide involontaire, et les atteintes à l’intégrité physique, telles les blessures involontaires. Certains comportements sont réprimés, également, parce qu’ils mettent en danger la vie d’autrui.
L’article 223-1 du Code pénal vise « le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement », puni d’un an de prison et de 15 000 euros d’amende. À titre d’illustration, la Cour de cassation a jugé que le fait, pour un chirurgien, de ne pas être assisté, pendant les opérations qu’il pratique, par des personnes qualifiées constitue une mise en danger d’autrui au sens de l’article 223-1 du Code pénal. La Haute Juridiction vise l’article 12 du décret 2002-194 du 11 février 2002 relatif aux actes professionnels et à l’exercice de la profession d’infirmier et énonce que « seuls peuvent assister le chirurgien, au cours d’une opération, des infirmiers diplômés ou en cours de formation ». Elle rejette le pourvoi du chirurgien, condamné pour tromperie, mise en danger de la vie d’autrui et blessures involontaires, à quatre ans de prison, dont trois fermes, 75 000 euros d’amende et une interdiction définitive d’exercer. (Cass Crim 18 mai 2010). En revanche, la Cour de cassation a censuré la décision condamnant à dix-huit mois d’interdiction d’exercice de son métier un infirmier qui avait injecté au patient des doses supérieures à celles prescrites, au motif qu’il n’avait pas été constaté de lien direct et immédiat entre la faute commise et les complications susceptibles de mettre en danger la vie du patient. (Cass Crim 6 octobre 2009).
Un autre texte vise les risques causés à autrui. Il s’agit de l’article 121-3 du Code pénal, qui, après avoir rappelé, dans son alinéa 1, qu’en matière pénale, il n’y a point de crime ou de délit sans l’intention de le commettre, indique que, « toutefois, il y a délit en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s’il est établi que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait ». Dans le milieu hospitalier, des infirmières référentes ont été condamnées alors que les auteurs des erreurs d’injection de produit étaient des élèves infirmières qu’elles encadraient et qui étaient poursuivies pour homicide involontaire. Huit mois de prison avec sursis pour celle qui a « laissé administrer une substance dangereuse à un patient, hors de sa présence et sans s’être assurée qu’elle (l’élève infirmière) connaissait le mode opératoire, (l’infirmière référente) a commis une faute caractérisée ayant exposé le patient à un risque d’une particulière gravité qu’elle ne pouvait ignorer » (Cass Crim 26 juin 2001, pourvoi 00-87816). Dans une autre espèce, ont été condamnés pour homicide involontaire un médecin, pour avoir établi une prescription erronée, et l’infirmière qui l’a exécutée, respectivement à douze et dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis. La Cour retient que « la prévenue, qui n’a pas accompli les diligences normales que ses compétences ainsi que le pouvoir et les moyens dont elle disposait lui permettaient d’assurer, a commis une faute de négligence et d’imprudence entretenant un lien de causalité certain et direct avec le dommage » (Cass crim 1er avril 2008, pourvoi 07-81509).
L’élève infirmière est habilitée à exercer la profession et est responsable des actes qu’elle réalise. Cependant, il ne faut pas oublier que l’infirmière référente qui l’encadre peut voir sa propre responsabilité engagée pour ne pas avoir évalué correctement les capacités de l’élève, vérifié qu’elle a compris ou surveillé les actes accomplis.
Dans l’affaire emblématique dite de l’hôpital Trousseau, l’AP-HP a été condamnée ainsi que huit agents de l’hôpital (directeur des soins, chef de service, interne, infirmières et aides-soignantes), à la suite du décès, en 1999, d’un enfant de 20 mois, à des peines allant de trois à six mois de prison avec sursis et des amendes allant de 1 000 à 10 000 €. Les agents étaient poursuivis pour homicide involontaire. Était, en outre, reprochée à la cadre infirmière, à l’interne, aux infirmières et aux aides-soignantes une mise en danger d’autrui sur le fondement de l’article 121-3 du Code pénal.