SECTEUR PRIVÉ
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Rentabilité en berne, déficits, conflits sociaux… Le secteur privé va-t-il mal ? Bilan, côté fédération et côté syndicats.
Mon sentiment ? Un mélange d’inquiétude et de lassitude. Et une pointe d’espoir. » Commentant le rapport sectoriel publié le 5 juin par la Fédération des cliniques et hôpitaux privés de France (FHP), qu’il préside, Jean-Loup Durousset ne mâche pas ses mots. Selon lui, le secteur, qui représente un tiers de l’activité hospitalière française, est en difficulté. Le chiffre d’affaires des 1 128 cliniques et hôpitaux privés s’élève à 12,9 milliards (hors honoraires médicaux) en 2010, en hausse de 3 % par rapport à 2009. « Mais, souligne-t-il, ce bon résultat est nuancé par une baisse de la rentabilité. En 2010, elle s’élevait à 1,9 % du chiffre d’affaires, contre 2,3 % en 2009. » La situation de certains établissements est préoccupante : 28 % étaient en déficit fin 2010, contre 23 % en 2009 ; un chiffre qui atteint 35 % pour les cliniques spécialisées en médecine, chirurgie et obstétrique (MCO), ce qui « conduit à s’interroger sur la pérennité de près d’un tiers des cliniques françaises à plus d’un an », note le rapport.
Jean-Loup Durousset dénonce la quasi-absence de revalorisation des tarifs hospitaliers depuis quatre ans, alors que les charges continuent à augmenter (+ 3 % en 2010). « En dépit d’une progression contenue des charges salariales, les charges d’exploitation ont progressé plus vite que le chiffre d’affaires », explique-t-il, pointant les charges immobilières, de carburant, d’énergie… « Cela fait cinq ans que je m’évertue à expliquer au ministère qu’il faut donner aux établissements les moyens de retrouver du dynamisme. » Jugeant que « les exigences normatives vont bien au-delà du souci de sécurité des patients », Jean-Loup Durousset parle innovation. « En chirurgie ambulatoire, par exemple, a-t-on toujours besoin d’une infirmière pour cinq malades ? Pour une coloscopie, cela ne me paraît pas évident », plaide-t-il. Il se dit pourtant optimiste, même si les déclarations de la nouvelle ministre de la Santé, entendant « redonner ses lettres de noblesse au service public hospitalier », ont fait grincer quelques dents à la FHP.
Côté syndicats, l’inquiétude du président de la FHP laisse de marbre. « D’ailleurs, le rapport ne nous a toujours pas été officiellement présenté », remarquent Anne Taquet, secrétaire générale de l’UFSP CGT
1– UFSP CGT : Union fédérale de la santé privée CGT.
2– UNSFO : Union nationale des syndicats Force ouvrière de la santé privée.
Mobilisation du personnel, appui des élus d’arrondissement, projet de reprise soutenu par l’ARS et le personnel… Rien n’y a fait. Le 14 juin, le couperet est tombé : la fermeture, au 27 juin, du centre médico-chirurgical de Vinci, dans le XIe arrondissement de Paris, a été prononcée. « Un véritable gâchis, qui aurait pu être évité », estime Hamadi Guella, infirmier et délégué du personnel FO, qui rappelle que la clinique employait 167 salariés et 80 médecins, et qu’elle était la dernière maternité du XIe (1 800 naissances/an).
Placée en liquidation judiciaire le 1er mars, la clinique, créée en 1970 et gérée depuis 2007 par le groupe Access médical santé (AMS), affichait un déficit cumulé d’environ 6 millions d’euros. « Une mauvaise santé financière, avec accumulation des impayés de loyer, due à des erreurs de gestion, à des investissements insuffisamment réfléchis », regrette Nacer Maza, délégué syndical FO.
Intransigeance
Un projet de reprise existait, porté par le groupe Docte Gestio, qui garantissait la poursuite de l’activité et de l’essentiel de l’emploi. « Le projet a buté sur l’intransigeance de la SCI propriétaire des murs, explique Julien Pontier, directeur de cabinet de Patrick Bloche (PS), maire du XIe. Cette SCI a réclamé des garanties exorbitantes. Puis, elle a tout simplement annoncé qu’elle refusait de négocier avec Docte Gestio. » Le sentiment d’impuissance domine. Mêlé d’inquiétude : après la fermeture de la maternité de Saint-Antoine, celle de la clinique de Vinci est très préoccupante pour la prise en charge des grossesses dans l’Est parisien, souligne Julien Pontier.
E.D.