DOSSIER
MISE EN ŒUVRE
La démarche d’ETP a pour objectif l’acquisition de compétences par le patient en vue de l’amener à plus d’autonomie dans la gestion de sa situation de santé. La relation pédagogique instaurée dans le cadre d’une ETP doit permettre au patient d’exprimer ses connaissances et ses besoins à toutes les étapes du programme.
Le professionnel de santé présente les bénéfices que le patient peut tirer de l’ETP pour la gestion de sa maladie, mais aussi les contraintes occasionnées en termes de temps et de disponibilité. La loi prévoit que le patient, qui doit donner un consentement écrit, a toute liberté de refuser la proposition ou de la reporter. Il peut aussi interrompre une démarche en cours à tout moment, il pourra bénéficier du programme ultérieurement.
Certaines réticences à s’engager dans un programme sont liées à la faible gêne occasionnée par une affection peu symptomatique (diabète, HTA, asthme…) ou à une attitude passive du patient, dans l’attente d’une prescription médicamenteuse. Ce dernier risque aussi d’assimiler la proposition d’ETP aux conseils répétés qu’il a déjà reçus sans réussir à les appliquer. Le professionnel doit alors évaluer la faisabilité du projet pour chacun. Il repère les obstacles et les changements que le patient est prêt à consentir.
Le diagnostic éducatif est indispensable pour identifier les besoins et les ressources du patient. Point de départ d’une relation de partenariat avec lui, il peut se résumer au travers des réponses aux interrogations suivantes : Qui est le patient ? Qu’a-t-il ? Que sait-il ? Que croit-il ? Que fait-il ? Quel est son projet ?
Il porte sur :
– ce que le patient connaît de sa maladie et de sa survenue, des signes d’alerte médicaux et de la conduite à tenir, les numéros de téléphone à appeler en cas d’urgence…
– les facteurs de stress et de vulnérabilité du patient : état émotionnel (peur, colère, anxiété…), handicap physique, sentiment d’insécurité, fragilité due à l’avancée en âge ;
– les ressources sociales du patient : réseau social ou isolement, problèmes relationnels, en particulier dans la famille ;
– les facteurs socio-environnementaux : dépression, image de soi dévalorisée, situations de précarité ou de risque social, incapacité due à la maladie, vieillissement, perte d’emploi…
– les compétences du patient et ses éventuels problèmes d’apprentissage : difficultés de lecture et/ou de compréhension de la langue, handicap sensoriel…
Comme l’ensemble du programme d’ETP, ce premier entretien individuel doit favoriser l’implication du patient et soutenir sa motivation. Il va lui permettre de s’approprier le programme, en tenant compte de ses propres demandes, de son expérience et de son savoir-faire. Les priorités d’apprentissage et de changement sont négociées et hiérarchisées avec lui.
Le diagnostic éducatif est régulièrement actualisé, systématiquement lors de la survenue de tout événement nouveau concernant le patient et son environnement (changement de situation personnelle, aggravation de la maladie…). « Les données recueillies lors de ce premier entretien vont évoluer dans le temps en fonction des événements de la vie. La prise en charge sera adaptée. Les événements qui interfèrent avec le cours “normal” de la maladie sont soit des ruptures thérapeutiques ou des hospitalisations dont on va rechercher les causes, soit des difficultés dont le patient nous fait part de lui-même », observe Amélie Boireau, dans le cadre de l’insuffisance cardiaque.
Individuelles ou collectives, animées par un ou plusieurs intervenants, elles ont pour but la mise en œuvre d’un programme personnalisé. Chaque patient doit acquérir les compétences qui lui sont nécessaires.
Dans les séances collectives, les patients sont réunis en fonction de leurs objectifs éducatifs. Les ateliers en groupe sont propices au partage des expériences et des savoir-faire de chacun. Ils présentent aussi l’avantage de rompre l’isolement du patient, ce qui favorise son implication dans la démarche d’éducation. La durée des séances et la taille du groupe doivent permettre au professionnel de bien connaître chaque patient, qui vient chercher des réponses à sa situation. Les échanges entre les participants sont aussi l’occasion de mettre au jour des problématiques qui n’ont pas été détectées lors du diagnostic éducatif.
Par leur participation, les patients soulèvent des difficultés qui, parfois, n’avaient pas été perçues par les professionnels. Dans le cadre d’un programme destiné aux patientes traitées pour un cancer du sein mis en place par le Centre de lutte contre le cancer Paul-Strauss de Strasbourg (voir encadré p. 38), les premières sessions ne comportaient pas d’intervention d’un neuropsychologue. « Un suivi psychologique individuel étant proposé à toutes les patientes dès l’annonce du diagnostic, nous n’avions pas envisagé une nouvelle approche psychologique dans les premiers programmes d’ETP, explique Francine Pfeil-Thiriet, cadre de santé et coordinatrice du programme. Or, au cours des ateliers, les patientes se plaignaient de troubles cognitifs tels que des pertes de mémoire ou des difficultés de concentration, qui perdurent six à dix-huit mois après la fin de la chimiothérapie. Le programme a été adapté et enrichi des interventions d’une psychologue et d’un neuropsychologue. »
Ils permettent une meilleure approche de la réalité de la vie du patient et une progression adaptée à son rythme. Le professionnel reçoit le patient en face-à-face, éventuellement accompagné d’un membre de son entourage, pour une durée moyenne de 30 à 45 minutes. Les séances individuelles sont privilégiées lorsqu’en fin de programme, l’évaluation des acquisitions montre que le patient n’a pas suffisamment intégré certains points. « Si l’évaluation individuelle, à l’issue du parcours, n’est pas satisfaisante, on propose au patient une reprise des entretiens individuels », précise l’infirmière de l’École du cœur de Pontoise.
Considérée comme un acte de communication entre le soignant et le patient, l’évaluation individuelle des compétences acquises par le patient est proposée au minimum à la fin de chaque programme. Elle peut aussi être suggérée à tout moment de la prise en charge, si le soignant le juge nécessaire pour anticiper des difficultés, ou si le patient la demande. « On mène une évaluation à la fin du parcours d’ETP. Auparavant, des évaluations avaient lieu à la fin de chaque atelier, mais les patients trouvaient ça un peu lourd, un peu trop scolaire », remarque Amélie Boireau.
→ Compléter le programme, si nécessaire : à l’issue du programme, le professionnel vérifie que les acquisitions sont suffisantes pour que chaque patient améliore la gestion de sa maladie. L’évaluation permet donc une actualisation du diagnostic éducatif initial et une nouvelle proposition d’ETP, complémentaire : soit un suivi régulier pour maintenir les compétences ou les actualiser ; soit un suivi approfondi pour compléter l’ETP initiale.
→ L’auto-évaluation du patient : l’évaluation individuelle en fin d’ETP ne consiste pas en un jugement externe des compétences acquises par le patient. Grâce au dialogue avec le professionnel, ce dernier acquiert la capacité d’évaluer ses connaissances sur sa situation de santé.
→ Compétences plutôt que connaissances : « On évalue les connaissances du patient par le biais d’un questionnaire, même si ce sont surtout ses compétences à faire le lien entre les acquis de l’ETP et leur mise en application dans sa vie avec la maladie qui font la différence », constate Amélie Boireau. Pour cette évaluation, l’infirmière utilise des cas concrets sous forme de mises en situation en lien avec la maladie. La personne choisit entre plusieurs réponses. « On demande au patient de choisir la réponse qui lui paraît la plus adaptée, mais, surtout, celle qu’il apporterait lui-même en situation. » Grâce aux compétences acquises, le patient est plus efficace dans la prise en charge de sa maladie. « On se rend compte que les personnes qui répondent bien aux cas concrets en évaluation finale sont celles qui seront le moins souvent hospitalisées et présenteront le moins d’événements indésirables, ajoute l’infirmière. À la différence des patients qui montrent de très bonnes connaissances face à un questionnaire mais qui ont des difficultés avec les cas concrets. »
Les guides d’entretien adaptés aux spécificités de la maladie et de la population concernée servent de supports. Ils favorisent le dialogue avec le patient. Les questions ouvertes permettent d’accéder à son ressenti. Par exemple : « Parlez-moi de votre consommation de tabac… » Les questions fermées recherchent une précision : « Combien de cigarettes fumez-vous par jour ? » Les équipes utilisent des questionnaires déjà validés ou élaborent elles-mêmes des guides adaptés à leur contexte. Le « Questionnaire de qualité de vie du Minnesota », notamment, est bien connu dans le cadre de l’insuffisance cardiaque. Il évalue la gêne occasionnée par la maladie. Par exemple, à la question : « Au cours des quatre dernières semaines, est-ce que votre insuffisance cardiaque vous a empêché de vivre comme vous l’auriez voulu », le patient cote les 21 réponses proposées de 0 à 5, selon l’intensité constatée :
– en faisant enfler vos chevilles, vos jambes… ;
– en rendant difficiles vos activités habituelles à la maison, au jardin… ;
– En rendant difficiles les relations ou les activités avec vos amis ou votre famille ?
– etc.
Les instruments d’évaluation utilisés dans l’ETP sont, pour la plupart, issus des sciences de l’éducation et de la pédagogie médicale : questions avec réponses de type vrai-faux, QCM (questions à choix multiples), cas cliniques avec QCM… Exemple, le « Questionnaire sur la qualité de vie EORTC QLQ-C30 », qui évalue les capacités des patients à assurer les besoins de la vie quotidienne ou les répercussions de la maladie sur leur état général par des questions du type : « Avez-vous des difficultés à faire certains efforts physiques comme porter un sac à provisions chargé ou une valise » « Avez-vous eu mal » « Avez-vous eu des difficultés pour dormir ». L’utilisation, en fin de parcours, des mêmes questionnaires que ceux utilisés pour le diagnostic éducatif initial permet d’apprécier la progression du patient et l’efficacité du programme d’ETP.
Les techniques et les outils pédagogiques sont élaborés dans le but de favoriser les acquisitions par les patients, mais aussi dans celui de faciliter et de soutenir les interactions dans les séances collectives. Ils sont conformes aux recommandations et adaptés à l’âge et aux besoins du patient. On distingue :
– les techniques pédagogiques : exposé interactif, étude de cas, simulation à partir de l’analyse d’une situation, jeu de rôles, carte conceptuelle, photolangage (voir p. 38) ;
– les outils pédagogiques : supports audio ou vidéo, brochures, représentations d’objets de la vie courante, matériel de soins, jeux…
→ Définition : les cartes conceptuelles découlent des théories sur l’apprentissage et des principes de la psychologie cognitive, qui considèrent la structure des connaissances comme un réseau de concepts reliés entre eux par des liens significatifs. Une carte conceptuelle représente graphiquement ce réseau à partir d’un thème lié à la maladie (voir illustration ci-contre). Également appelée « carte sémantique », « réseau sémantique » ou « cartographie de connaissances », une carte conceptuelle permet de stimuler la compréhension et l’intégration des idées.
C’est aussi un support des interactions entre apprenants et éducateur. Les patients expriment leurs points de vue, répondent aux questions du soignant, partagent des expériences et des témoignages personnels. Ils peuvent, en outre, contester ou approuver les affirmations d’un autre patient, ou interroger le soignant qui anime la séance.
→ Élaboration d’une carte conceptuelle : le soignant inscrit un mot correspondant à un thème lié à la maladie au milieu d’une feuille. Les patients s’expriment sur cette idée et développent les points qu’elle évoque dans leur quotidien. Ils définissent alors les liens qui relient les points qu’ils ont associés au thème central (voir illustration ci-dessous). Par la suite, les personnes vont exprimer de nouveaux concepts ou mots en lien avec les précédents, spontanément ou après une relance du soignant. Par exemple, la question « Comment savez-vous que vous êtes en hypoglycémie » va susciter des réponses comme : « Par un contrôle avec le lecteur de glycémie » ou « par une sensation de malaise ».
Chaque participant choisit parmi des photographies mises à disposition celles qui sont en relation avec son état de santé. Il exprime ainsi un point de vue personnel ou une expérience vécue. Les photographies favorisent une prise de conscience des représentations personnelles, partagées avec l’ensemble du groupe. Méthode d’apprentissage inventée en 1968, à Lyon, par deux psychosociologues, Alain Baptiste et Claire Belisle, le « photolangage », a pris un sens générique dans le vocabulaire des formateurs. Destiné, à l’origine, aux adolescents, pour lesquels la prise de parole n’est pas toujours aisée, le photolangage a vite démontré son efficacité face à des publics d’adultes. On peut constater les bénéfices de l’exercice dès la fin d’une session, et, à long terme, voir que la méthode entraîne des changements de comportement profonds et durables.
Le « Club Cœur et Santé » est une association de patients qui participe aux programmes de l’École du cœur de Pontoise. Amélie Boireau apprécie « l’aide précieuse qu’apportent les témoignages de patients impliqués dans l’association concernant le vécu de la maladie et leur propre cheminement. Les patients en formation entendent un discours différent de celui d’un professionnel de santé, avec qui il y a toujours un décalage ». C’est aussi un apport pour le professionnel : « Certains éléments de la prise en charge ne semblent pas poser de problème alors que les patients soulèvent des difficultés. Cela nous permet de nous remettre en question et de nous rapprocher des attentes des patients ».
Amélie Boireau reconnaît l’intérêt de la présence des proches, qui partagent avec le patient les contraintes de la maladie au quotidien, mais elle émet cependant une réserve : « L’objectif de l’éducation thérapeutique étant l’autonomie du patient, l’accompagnant doit être dans une démarche d’aide, mais il ne faut pas qu’il agisse avec l’idée de faire à la place de celui-ci. Si c’est le cas, nous proposons une première formation pour le patient seul et une autre formation, avec l’accompagnant. »
À l’École du cœur de Pontoise, l’infirmière effectue elle-même le suivi des patients insuffisants cardiaques ou sous traitement anticoagulant. « Lorsque l’évaluation satisfait aux attentes de l’équipe en termes d’acquisition des compétences par le patient, on lui propose un accompagnement minimal de deux séances par an, parallèlement à la prise en charge médicale. Les patients coronariens sont suivis par leur cardiologue de ville, explique Amélie Boireau. Les personnes adhèrent à la démarche et apprécient qu’on ne les lâche pas après le programme d’éducation thérapeutique. D’ailleurs, certaines nous sollicitent pour participer à d’autres programmes. »
Le suivi d’un patient atteint d’une maladie chronique s’inscrit forcément sur du long terme. « Nous accompagnons certains patients depuis plus de dix ans », signale l’infirmière.
9- Apprendre à éduquer le patient – Approche pédagogique, Jean-François d’Ivernois, Rémi Gagnayre, Éd. Maloine, 4e édition, 2011.
Après l’annonce du diagnostic
Le patient s’interroge, à ce moment-là, sur ses compétences à suivre les traitements et les modalités de surveillance. Dans un contexte de fragilité de la personne, le professionnel tient compte de son état émotionnel et de sa fatigue, qui peut l’entraîner à considérer l’ETP comme une charge supplémentaire et insurmontable. La proposition sera réitérée à un moment plus favorable, après le retour à domicile, par exemple.
Après un événement lié à la maladie
Certains incidents révèlent une mauvaise gestion de la situation de santé par le patient. Dans le cas du diabète, un malaise hypoglycémique ou des épisodes d’hyperglycémie prolongés sont des situations qui soulignent l’intérêt d’une prise en charge éducative. Le patient doit apprendre à reconnaître les signes d’alerte, afin d’éviter des conséquences parfois graves.
Après une évolution de la maladie ou du traitement
Lors de l’apparition d’une complication ou de la découverte de facteurs de risque associés (HTA, hypercholestérolémie, tabagisme…), mais aussi à l’occasion d’une modification ou d’une intensification du traitement (passage à l’insuline pour un diabète de type 2, par exemple), des entretiens d’ETP sont proposés.
Depuis octobre 2011, l’hôpital Charles-Foix d’Ivry-sur-Seine (94) a mis en place un programme d’ETP pour aider au sevrage aux benzodiazépines ou des médicaments apparentés.
Le programme s’adresse aux patients âgés qui prennent des médicaments depuis plus d’un mois alors que le traitement ne montre plus forcément d’intérêt. L’objectif est que les personnes acquièrent des méthodes alternatives pour gérer différemment leurs problèmes d’anxiété ou de troubles du sommeil, sans recourir aux médicaments ou en diminuant leur posologie. Les patients très attachés à leurs médicaments envisagent difficilement de renoncer au confort que leur apporte le traitement. « Les patients ne connaissent pas les notions de dépendance et d’accoutumance. Ils sont souvent réticents, même quand on leur explique les risques liés aux effets indésirables des médicaments », observe le Dr Christel Oasi, médecin gériatre, responsable médicale du projet. Françoise Castor, cadre supérieur de santé, précise qu’« il s’agit d’un programme éducatif et non pas d’un programme de sevrage proprement dit, comprenant une prise en charge psychologique ».
Équipe restreinte
Deux infirmières formées à l’ETP prennent en charge les patients avec le Dr Oasi. Elles recueillent les données pour le diagnostic éducatif en entretien individuel à l’aide d’un questionnaire élaboré par l’hôpital. Puis, elles définissent avec les patients des objectifs accessibles. La suite du programme se compose, en alternance, de séances collectives avec les infirmières et de consultations individuelles avec le médecin. Le Dr Oasi explique tout ce qui concerne le traitement médicamenteux, les risques inhérents aux effets indésirables, les notions de dépendance et d’accoutumance. Elle rassure aussi les patients sur la bonne tolérance au sevrage. Les infirmières présentent des méthodes alternatives aux médicaments, telles que l’hygiène de vie et du sommeil, les techniques de relaxation, les exercices de respiration, les massages des mains avec des huiles essentielles et l’utilisation de musiques relaxantes.
Progression
En parallèle, les personnes sont invitées à réduire progressivement leur traitement. La durée du programme respecte les recommandations en matière de délais de sevrage. Sur douze semaines, les posologies de benzodiazépines sont diminuées de 25 % tous les 15 jours. Malgré le peu de recul de ce programme récent, l’équipe d’ETP a évalué à environ 50 % le pourcentage de patients qui arrivent à arrêter ou à diminuer considérablement leur traitement.
L’école de l’atopie
Diagnostic éducatif et objectifs adaptés à chaque patient sont élaborés par un médecin et une infirmière lors d’une première consultation individuelle. Les enfants sont reçus avec les parents, mais, par la suite, ils participent seuls aux ateliers, même si les parents restent impliqués tout au long du parcours. Dans tous les cas, l’équipe doit être vigilante et contrôler la corticophobie des patients, souvent relayée par l’entourage et certains professionnels. Cette crainte d’utiliser une crème contenant de la cortisone est reprise lors des ateliers. « Quelqu’un qui n’a pas confiance en son traitement ne l’applique pas bien, rappelle Catherine Le Fol. La plupart des patients qui nous sont adressés sont insuffisamment traités ».
Un objectif simple
« L’objectif est d’améliorer la qualité de vie des patients », explique l’infirmière. Ces derniers doivent, entre autres, savoir reconnaître les lésions, évaluer l’état cutané, repérer et gérer les crises, adapter le traitement si nécessaire et savoir qui appeler en cas de besoin. « Chez les enfants, l’objectif doit être simple. Il s’agira, par exemple, de rechercher leur accord pour que les parents puissent appliquer une crème tous les soirs. Si le jeune refuse, nous proposons aux parents une nouvelle consultation pour reparler du problème plutôt que de laisser se développer un conflit avec l’enfant », ajoute-t-elle. Les adolescents sont incités à appliquer la crème eux-mêmes. Parfois, l’infirmière négocie une application tous les deux jours pour les plus réticents. « Nous obtenons de bons résultats du fait de notre position extérieure à la famille », commente-t-elle.
La maison brûle
La peau est assimilée à une maison bien construite. « Les images de la peau et de la maison sont affichées en parallèle. Le visuel marche bien chez les adultes comme chez les enfants », constate Catherine Le Fol. Si la peau commence à sécher, c’est que le ciment n’est pas de bonne qualité : il faut appeler le maçon, ce qui revient à appliquer une crème hydratante. L’inflammation de la plaque d’eczéma est comparée à une maison en feu : il faut alors appeler les pompiers et traiter avec une crème anti-inflammatoire. En cas de feu important, d’autres moyens sont nécessaires.
Le suivi
La durée du programme est adaptée aux besoins et aux potentialités des patients. Dans des cas d’eczéma sévère, certains patients sont suivis depuis plusieurs années. Les professionnels de l’équipe d’ETP remettent leurs coordonnées aux participants, « ce qui permet de maintenir un lien, de donner des conseils, mais, surtout, de rassurer », constate l’infirmière.
T. P.
1- Atopie : prédisposition héréditaire à développer des manifestations d’hypersensibilité telles que l’asthme, le rhume des foins, l’urticaire, l’eczéma dit atopique…
2- La dermatite atopique, plus rare chez l’adulte que chez le nourrisson, se manifeste, dès l’âge de 3 mois, par des plaques d’eczéma qui apparaissent sur le visage, puis s’étendent au reste du corps.
En avril 2011, le Centre de lutte contre le cancer Paul-Strauss de Strasbourg (67) a lancé un programme d’ETP pour améliorer la qualité de vie des patientes atteintes d’un cancer du sein.
A l’origine de cette initiative, « le ressenti négatif et le sentiment d’isolement et d’abandon des patientes rapportés par celles-ci six mois après la fin de la radio ou chimiothérapie. Les effets indésirables peuvent perdurer jusqu’à dix-huit mois après la fin du traitement », souligne Francine Pfeil-Thiriet, cadre de santé et coordinatrice du programme. L’équipe s’est donc tournée vers l’éducation thérapeutique pour prolonger la prise en charge des patientes par un programme de trois mois. Le but : améliorer leur qualité de vie et assurer une meilleure réinsertion familiale, sociale et professionnelle. Parmi les premiers ateliers mis en place, l’activité physique, à raison de trois séances par semaine avec un kinésithérapeute. « Le traitement fatigue les patientes, qui se plaignent d’un manque d’entrain, bougent de moins en moins, et prennent du poids », explique Francine Pfeil-Thiriet. D’autant que de nombreuses études démontrent que la prise de poids est un facteur favorisant les récidives. Le choix de démarrer cette activité à 9 heures a été fait par l’équipe pour se rapprocher d’un rythme de travail que les patientes ont perdu. « Cet horaire est très apprécié des participantes, qui reprennent confiance en leurs capacités malgré la fatigue liée au traitement », ajoute la cadre de santé. Les patientes bénéficient aussi de plusieurs ateliers avec une diététicienne. Une socio-esthéticienne aborde les questions relatives aux troubles de l’image corporelle dus à la chimiothérapie : perte des cheveux, des cils et des sourcils, sécheresse de la peau. Tandis qu’une assistante sociale aborde la reprise du travail et des droits des patientes car les employeurs ne comprennent pas toujours qu’elles ne puissent pas reprendre une activité à temps plein immédiatement après les trois mois du leur traitement médical.
Améliorer l’observance
Une gynécologue et une pharmacienne expliquent le traitement hormonal et la gestion des effets indésirables tels que les douleurs articulaires, les bouffées de chaleur ou la fatigue. « Ce traitement doit être maintenu pendant cinq ans. Aujourd’hui, on parle plutôt de sept ans, précise Francine Pfeil-Thiriet. Il est nécessaire de rappeler l’importance de ce traitement pour prévenir le risque de récidive chez certaines patientes qui vont mieux, avec un bon bilan, et ont tendance à arrêter au bout d’un ou deux ans. » C’est le rôle de la pharmacienne. Les personnes sont recontactées un an plus tard pour faire le point.
Des bénéfices immédiats
Malgré le peu de recul, les bénéfices de l’éducation thérapeutique sont perceptibles dans les enquêtes de satisfaction menées en fin de programme. Ainsi, toutes les patientes apprécient les échanges avec des personnes qui connaissent les mêmes difficultés lors des séances collectives. Certaines continuent à se réunir à l’issue du programme pour faire des activités, marcher ou s’inscrire dans une salle de sport.
T. P.