L'infirmière Magazine n° 308 du 01/10/2012

 

INFORMATIONS MÉDICALES

JURIDIQUE

Régulièrement, les autorités judiciaires sollicitent les professionnels de santé pour obtenir des documents médicaux. Quelles sont les règles en matière de transmission de ces informations ?

Les sollicitations orales

Les établissements de santé, et, en particulier, leur service des urgences, sont souvent confrontés à des demandes d’informations concernant des patients faites oralement au motif que l’obtention rapide de ces informations va faciliter les recherches des autorités, notamment dans les affaires urgentes. Les interrogations portent souvent sur la présence physique de telle personne ou sur son horaire de passage. Les autorités considèrent souvent, à tort, que cela ne relève pas du secret médical. Rappelons qu’en vertu de l’article L. 1110-4 du CSP, toute personne prise en charge par un professionnel ou un établissement de santé a droit au respect de sa vie privée et au secret des informations la concernant. Le simple fait qu’une personne est hospitalisée reste, en soi, couvert par le secret. Le personnel ne doit pas se laisser influencer par la qualité de l’auteur de la demande (police ou gendarmerie) et doit refuser de répondre. Dans le cas contraire, il commettrait l’infraction de violation du secret professionnel.

Les réquisitions portant sur des documents

Un officier de police judiciaire (OPJ) peut requérir des documents, de sa seule initiative, en cas d’enquête de flagrance (art. 60-1 CPP), avec l’autorisation du procureur de la République, dans le cadre d’une enquête préliminaire (art. 77-1-1 du CPP) ou sur commission rogatoire (art. 99-3 CPP), par le juge d’instruction, si une information judiciaire a été ouverte. En principe, le secret professionnel ne peut lui être opposé. Cependant, s’agissant de documents médicaux, le code de procédure pénale précise que l’accord du médecin est nécessaire. Par conséquent, les médecins requis ont la faculté – et non l’obligation – de remettre aux autorités compétentes les documents demandés. Quelle que soit leur attitude, remise ou refus, ils n’encourent aucune sanction. La réquisition de documents est souvent abusivement utilisée par certains OPJ.

La perquisition et la saisie des documents médicaux

L’article 56-3 du CPP précise les règles relatives aux perquisitions dans le « cabinet d’un médecin ». La jurisprudence a étendu ce droit de perquisition aux établissements de soins non évoqués dans cet article. Les perquisitions sont effectuées par un magistrat. Si un juge d’instruction est dans l’impossibilité de procéder lui-même à un acte d’instruction, il peut donner commission rogatoire aux officiers de police judiciaire afin de le leur faire exécuter. Les documents saisis sont alors mis sous scellés, qui ne seront ouverts que par un médecin expert de justice. Le médecin ne peut pas s’opposer à la saisie du dossier, mais celle-ci doit se faire en sa présence. En matière médicale, les dossiers, sous forme papier ou informatisés, sont le plus souvent saisis sans qu’il y ait perquisition, ce qui est une procédure non définie par le code pénal. Les saisies se font sur rendez-vous et par un OPJ et non par le magistrat lui-même, en présence du directeur ou de son représentant, du chef de service concerné et d’un membre du conseil de l’Ordre des médecins. La saisie du disque dur de l’ordinateur d’un médecin devrait être réalisée en présence d’un magistrat et non d’un « simple » OPJ, car il peut y avoir, outre des dossiers des patients, des documents personnels.

En résumé, le secret professionnel doit être opposé aux demandes irrégulières, en particulier orales, de renseignements médicaux. Hors le cadre d’une saisie ou d’une réquisition, aucun document ne doit être remis directement à un juge ou à un membre de la police judiciaire.

CONSEIL

En pratique, les documents saisis ne sont restitués, au mieux, qu’après de longues années de procédure, au pire, jamais. Il convient donc de photocopier les documents placés sous mains de justice et d’imprimer le dossier informatisé.

Plusieurs types d’enquête

Il convient de distinguer : l’enquête de flagrance, l’enquête préliminaire et l’information judiciaire. Les objectifs de ces différentes enquêtes ne sont pas éloignés : constater les infractions, rassembler les preuves et rechercher les auteurs. L’enquête de flagrance se distingue de l’enquête préliminaire par son caractère urgent. Elle va concerner un délit ou un crime qui est en train ou vient de se commettre. Une information judiciaire (ou instruction) n’est ouverte par le procureur de la République qu’en cas d’affaire complexe. Elle est confiée à un juge d’instruction, qui pourra faire appel aux services de police ou de gendarmerie.