L'infirmière Magazine n° 317 du 15/02/2013

 

FORMATION CONTINUE

LE POINT SUR

L’acné est une dermatose chronique très fréquente chez l’adolescent. Sa prise en charge, qui s’effectue au long cours, inclut des topiques antiacnéiques et, selon le cas, une antibiothérapie par voie générale. L’isotrétinoïne ne s’utilise qu’en cas d’échec du traitement ou d’acné sévère.

LA PATHOLOGIE

L’acné est une maladie inflammatoire chronique du follicule pilo-sébacé. Survenant à la puberté, elle évolue par poussées et régresse spontanément, dans la majorité des cas, vers l’âge de 20-25 ans. Une acné peut aussi apparaître à l’âge adulte : elle est favorisée par l’application de cosmétiques inadaptés (gras ou occlusifs), une hyperandrogénie (en lien avec certaines pathologies ovariennes ou surrénaliennes, ou sans lien avec une pathologie), la prise de certains traitements (corticoïdes, anticancéreux, progestatifs, certains antiépileptiques, lithium, antithyroïdiens).

Trois principaux facteurs sont impliqués dans l’apparition de l’acné : une hyperséborrhée (sous l’influence des androgènes), une kératinisation anormale du follicule pilo-sébacé et une inflammation liée à la prolifération de Propionibacterium acnes, bactérie saprophyte de la peau.

Diagnostic clinique

Deux types de lésions

→ Lésions rétentionnelles, constituées par les comédons (secondaires à la dilatation du follicule pilo-sébacé). On distingue les comédons ouverts (points noirs) et les comédons fermés (microkystes ou points blancs).

→ Lésions inflammatoires, liées à l’inflammation des microkystes sous l’action de P. acnes. Ces sont les papules (lésions en relief), les pustules (à contenu purulent) et les nodules (lésions plus profondes). On classe une acné selon le type de lésions principales (rétentionnel, inflammatoire ou mixte) et selon sa sévérité (en tenant compte de l’importance des lésions, de l’atteinte du tronc, de la durée d’évolution).

→ Localisations : les lésions se situent surtout au niveau des zones riches en glandes sébacées : le visage (front, nez, joues) et le tronc (partie antérieure du thorax, épaules, dos).

Deux formes sévères

L’acné conglobata (ou acné nodulaire), très inflammatoire, survient surtout chez l’homme entre 20 et 30 ans. Les lésions incluant nodules, kystes et abcès sont souvent responsables de cicatrices définitives.

L’acné fulminans, forme aiguë fébrile et nécrosante, associée à des arthralgies, survient chez des patients de sexe masculin.

Complications

Les cicatrices, parfois définitives, sont la principale complication à long terme. Elles sont favorisées par la manipulation des lésions, la présence de nodules mais, surtout, un retard de traitement.

Les formes sévères ou même modérées peuvent entraîner un handicap psychosocial important.

LA PRISE EN CHARGE

Le traitement médicamenteux est généralement long, alternant traitements d’attaque et traitements d’entretien. Le traitement d’attaque (par voie locale et, éventuellement, par voie générale, selon la sévérité) est habituellement poursuivi trois mois avant que l’on puisse juger de son efficacité (sauf pour l’isotrétinoïne, prescrite sur une durée plus longue). Un traitement d’entretien (anti-acnéiques locaux) est ensuite recommandé.

Acné minime

Le traitement fait appel à des antiacnéiques locaux.

→ Les rétinoïdes (adapalène, trétinoïde) sont privilégiés en cas d’acné à prédominance rétentionnelle ou mixte.

→ Le peroxyde de benzoyle est indiqué en cas d’acné à prédominance inflammatoire.

→ Les traitements peuvent être combinés, si besoin : rétinoïde + peroxyde de benzoyle ou rétinoïde + antibiotique local ; ou une référence associant les deux classes thérapeutiques (type Erylik) ou peroxyde de benzoyle + rétinoïde. Les antibiotiques locaux ne sont pas employés seuls (risque de résistance bactérienne).

→ À savoir :

– Les traitements locaux peuvent être débutés à faible concentration pour limiter les effets indésirables (rougeurs, irritations…). Ceux permettant une seule application par jour (le soir) sont privilégiés pour favoriser l’observance. En cas d’irritation importante, on espacera le traitement (1 jour sur 2 ; 1 jour sur 3).

– Rétinoïdes et peroxyde de benzoyle sont photo-sensibilisants.

– La microchirurgie (extraction des comédons et des microkystes) est recommandée en complément du traitement médicamenteux dans l’acné rétentionnelle.

Acné modérée

→ Dans les acnés plus étendues (thorax) ou dans les formes d’évolution prolongée, une antibiothérapie par voie générale est associée au traitement local durant 3 mois (essentiellement doxycycline ou lymécycline).

→ La minocycline, soumise à une prescription hospitalière, n’est pas recommandée en première intention (risque d’atteintes auto-immunes et de manifestations graves d’hypersensibilité). L’érythro-mycine est indiquée en cas de contre-indication aux cyclines.

→ À savoir :

– Les cyclines sont photosensibilisantes. Elles s’avalent avec un grand verre d’eau, à distance du coucher, pour éviter les ulcérations œsophagiennes (rare).

– Le gluconate de zinc (Rubozinc…) est souvent proposé en alternative aux cyclines durant la période estivale ou en cas d’acné prépubertaire (contre-indication des cyclines) ou de grossesse.

Acné sévère

→ En cas d’échec de ces traitements ou en cas d’acné sévère, l’isotrétinoïne orale (au moins 0,5 mg/kg/jour en traitement d’attaque et jusqu’à une dose cumulée de 100 à 150 mg/kg) est indiquée.

→ En cas de poussée inflammatoire sévère lors du premier mois de traitement, notamment si les lésions rétentionnelles sont nombreuses, un traitement par corticothérapie générale peut être prescrit à faible dose (20 mg/J) pendant 3 à 4 semaines.

→ À savoir :

– L’isotrétinoïne est un médicament photosensibilisant (par diminution de la couche cornée) et tératogène. Chez les femmes, ses modalités de prescription et de délivrance sont très strictes, conditionnées par l’utilisation d’un carnet de patiente portant des mentions obligatoires : méthode de contraception utilisée, date et résultat du test de grossesse (systématique chaque mois).

– La survenue de signes de dépression durant le traitement doit être rapidement signalée au médecin.

– Des douleurs musculaires ou articulaires sont très fréquentes./

– L’association de l’isotrétinoïne aux rétinoïdes par voie orale (cyclines…) est contre-indiquée (risque d’hypertension intracrânienne).

CONSEILS

Hygiène et soins

→ Une toilette douce du visage est recommandée dans tous les cas pour ne pas aggraver les lésions : elle se fait à l’aide d’un nettoyant sans savon (syndet), qui respecte le pH acide de la peau (pH d’environ 5,5). L’alcool, les antiseptiques, le savon, les nettoyants contenant des acides de fruits ou encore les exfoliants sont à proscrire car trop irritants (risque de séborrhée réactionnelle). La manipulation des lésions est déconseillée (risque de cicatrices). Le topique antiacnéique s’applique le soir. Le matin, l’application d’un soin hydratant non comédogène est recommandée pour atténuer les irritations dues au traitement local.

→ Sous isotrétinoïne : le traitement induit une sécheresse cutanée et des muqueuses importante. Pour y remédier, des soins relipidants (visage, corps) sont à conseiller (Ictyane H.D., Xérial 5…), ainsi qu’un collyre suppléant lacrymal en cas de port de lentilles (si nécessaire, il faut stopper le port des lentilles). Les épilations à la cire sont déconseillées durant le traitement.

→ Une photoprotection est indispensable en cas d’exposition au soleil en raison du risque d’aggravation des lésions (quelques semaines après l’exposition), de l’effet photosensibilisant de la plupart des traitements et du risque de pigmentation irréversible des cicatrices.

SOURCES UTILES

→ Recommandations de bonnes pratiques. Traitement de l’acné par voie locale et générale, Afssaps, novembre 2007.

→ « Isotrétinoïne orale. Renforcement du programme de prévention des grossesses et rappel sur la survenue éventuelle de troubles psychiatriques ». Afssaps, mai 2009.

→ www.therapeutique-dermatologique.org Dossier « Acné », Beylot C., août 2012.

→ Sites Internet pour ados : http://www.fils antejeunes.com