PSYCHIATRIE
ACTUALITÉ
DU CÔTÉ DES… ÉTABLISSEMENTS
À Dijon, 30 patients psychiatriques chroniques bénéficient d’une prise en charge spécifique dans un espace chaleureux, où leur individualité est préservée.
L’Unité de soins et d’accompagnement long personnalisé (Usalp) de Dijon (Côte-d’Or), conçue pour améliorer le quotidien de patients psychiatriques chroniques, vient de fêter ses deux ans. « Cette structure bénéficie d’un soutien financier et humain, avec 30 patients encadrés, de jour, par 18 soignants », présente Sophie Tripogney, cadre de santé. Les onze infirmiers et sept aides-soignants de l’unité sont tous des volontaires. « Quand l’hôpital a ouvert cette section, j’ai aussitôt postulé », raconte Ingrid Mameaux. Cette jeune femme, issue « de générations d’infirmières », travaillait auparavant au pavillon d’entrée du centre hospitalier de La Chartreuse (également à Dijon), où elle se sentait « prise dans le tourbillon des soins d’urgence et cliniques, des entrées et des sorties. J’ai eu envie de m’investir davantage auprès des patients chroniques ». Des patients qui nécessitent un suivi permanent, sans que cela soit ressenti comme un échec. Parmi les pathologies représentées, différentes psychoses – dont la schizophrénie et la psychose infantile, des états délirants chroniques…
L’Usalp est une unité fermée où les soignants s’impliquent régulièrement dans l’organisation de fêtes et de sorties adaptées à chaque type de patient – en individuel ou en groupe, avec ou sans accompagnement. Diverses activités quotidiennes s’y déroulent également. Durant sa séance multimédia, Sidi Ouedraogo, infirmier psychiatrique, aide ainsi Zamela à rédiger une page d’écriture. « Les patients sont libres de participer ou non. L’ordinateur développe la maîtrise des gestes, la concentration, diverses capacités cognitives, analyse le soignant. Je suis devenu davantage pédagogue ! J’aime ce relationnel, qui nous permet de nous exprimer différemment. »
Ingrid Mameaux, elle, a suivi une formation « marionnettes ». « Les patients inventent l’histoire des personnages qu’ils créent. C’est étonnant de voir où ils nous entraînent. J’ai, par exemple, découvert qu’une personne très déficitaire était capable d’imagination. Une autre, autocentrée, s’est mise à parler d’autre chose que d’elle-même. C’est une autre forme d’accompagnement, différente du soin. »
Une art-thérapeute et une ergo-thérapeute interviennent aussi, à équivalence d’un temps plein. « En psychiatrie, l’ergothérapie n’est pas basée sur du fonctionnel ou des protocoles de rééducation, expose ainsi Marion Quenot, ergothérapeute. Elle est plus relationnelle, plus créative. Les objets fabriqués par les patients ont du sens : ils parlent de leur histoire, voire de leur souffrance, de leur délire… S’exprimer avec les mains, et non par la parole, est libérateur. »
Cette dynamique d’activités motive les infirmiers, leur évitant de s’enfermer dans un quotidien répétitif épuisant. « Ils parlent beaucoup entre eux de manière informelle, lors des relèves et au cours des synthèses hebdomadaires avec les médecins et les psychologues », assure Sophie Tripogney. Les soignants constatent qu’en leur laissant du temps, certains patients arrivent à progresser. « Par exemple, après un séjour thérapeutique en gîte, l’un des patients a demandé de pouvoir participer aux activités piscine. D’autres ont moins d’angoisses, et même, s’ouvrent davantage vers l’extérieur. »
La bonne connaissance de chaque malade aide, en outre, à repérer les signes avant-coureurs de violence, ce qui permet de prévenir les passages à l’acte. Disposant de deux chambres d’apaisement, l’Usalp n’est d’ailleurs volontairement pas conçue pour gérer une crise grave. Dans ce cadre créateur de liens et stable – avec peu d’entrées –, une seule patiente a dû quitter les lieux. Un résultat encourageant.