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LE POINT SUR
L’érythème fessier est la dermatose la plus fréquente chez le nourrisson. Elle touche particulièrement les enfants de 6 mois à 1 an, avec une prévalence de 30 à 50 %. Bénin au départ, l’érythème fessier peut s’aggraver si l’on ne prodigue pas des soins appropriés.
L’érythème fessier du nourrisson – ou dermite du siège – est une irritation de la peau située dans la région recouverte par une couche. Elle peut apparaître au bas de l’abdomen, sur les fesses, les organes génitaux ou dans les replis cutanés des cuisses et des fesses.
L’érythème fessier résulte d’un ou plusieurs facteurs liés au port de couches :
→ Le frottement des couches contre la peau. Le port de vêtements trop serrés peut aussi contribuer à l’irritation.
→ L’occlusion chronique : elle favorise l’hyperhydratation cutanée et la macération, ce qui peut aboutir à une altération de la fonction barrière de l’épiderme. La peau est alors plus vulnérable aux frictions et sa perméabilité aux substances irritantes est accrue. Elle est également exposée à une prolifération bactérienne ou mycosique (staphylocoques dorés, candida albicans). En outre, une couche mal adaptée, trop serrée ou trop petite aggrave l’effet occlusif.
→ Les urines et les selles : l’urée contenue dans les urines est transformée en ammoniaque au contact des uréases fécales, provoquant l’alcalinisation du pH cutané et l’accroissement de la perméabilité cutanée.
L’exposition aux fèces, contenant des enzymes digestives (protéases et lipases) réactivées par l’augmentation du pH, peut léser directement la peau et augmenter la sensibilité à d’autres irritants tels que les sels biliaires. Le pH des selles très acides, comme lors des diarrhées, provoque souvent un érythème.
→ Les irritants physiques ou chimiques :
– Un manque ou un excès d’hygiène locale peut accentuer l’érythème fessier.
– L’application de certains produits de toilette au caractère caustique peut induire des dermites d’irritation.
– Le tissu de la couche peut être allergisant.
→ Facteurs divers : les infections digestives ou urinaires, les épisodes fébriles, les poussées dentaires ou encore les otites jouent un rôle déclenchant en majorant le risque d’infection et d’inflammation du siège du nourrisson.
Le diagnostic est guidé par le type de lésion (érythème associé à des pustules, des squames, une vésicule, une ulcération, des nodules) et sa topographie initiale (localisation aux plis ou aux convexités).
→ Les érythèmes des convexités : la dermite en W est l’atteinte la plus fréquente chez le nourrisson, particulièrement entre 6 et 12 mois du fait de frottements plus importants en station assise.
→ Les érythèmes péri-orificiels : ils siègent autour de l’anus, du méat urinaire ou de la vulve chez la petite fille. Ils correspondent à l’extension d’une pathologie urinaire, gynécologique ou digestive d’origine infectieuse ou parasitaire.
→ Les érythèmes des plis : il peut s’agir soit d’une atteinte secondaire due à l’extension d’un érythème péri-orificiel, soit d’une atteinte primitive. Cette dernière peut être liée à la macération (la peau du fond des plis est érythémateuse et peut s’éroder), à une infection à candida albicans ou dermite en Y (atteinte des plis inguinaux et interfessiers) ou à une dermite séborrhéique. Cette dernière commence dans les trois premiers mois de vie. Appelée aussi maladie de Leiner-Moussous, elle associe une dermite squameuse du cuir chevelu et du visage à une atteinte du siège.
→ Les érythèmes diffus du siège, formes compliquées ou prolongées des atteintes précédemment citées. La dermite dite en culotte est une atteinte érythémateuse de tout le siège. Son apparition rapide est liée à l’application accidentelle d’un produit caustique. Si l’installation est plus lente, cela marque l’extension d’un érythème fessier, quelle que soit son origine.
Afin d’éviter l’érythème fessier, il convient de :
– Se laver les mains avant et après chaque change.
– Utiliser des couches bien absorbantes et adaptées à la taille de l’enfant, les changer fréquemment et rapidement après l’émission d’une selle. Ne pas trop les serrer.
– Éviter les vêtements ou sous-vêtements trop serrés.
– En cas d’utilisation de couches lavables, ne pas mettre de culotte en plastique par-dessus. Choisir une lessive hypoallergénique et éviter l’ajout de substances irritantes.
– Nettoyer les fesses du nourrisson de haut en bas, du plus propre au plus sale. Utiliser un savon doux pour la toilette quotidienne et lors des changes avec selles. Bien rincer. Pour les changes d’urines, de l’eau suffit. L’utilisation de carrés de coton à usage unique permet d’assurer une meilleure hygiène.
– Sécher soigneusement en insistant sur les plis. Ne pas frotter, mais tamponner.
→ Afin de stopper l’évolution de l’érythème, outre les mesures préventives déjà citées, il convient de :
– Glisser éventuellement des couches jetables en coton dans le change habituel pour renforcer l’absorption et éviter le contact avec la cellulose contenue dans les couches, potentiellement allergène. Changer la marque des couches si les rougeurs persistent.
– Laisser les fesses du nourrisson à l’air le plus souvent possible.
– Supprimer les produits pouvant contenir des substances chimiques irritantes ou allergisantes. Produits de toilette parfumés ou alcoolisés et lingettes sont à éviter. Il est également déconseillé d’utiliser les produits contenant de l’acide borique, de l’amidon, du camphre, de l’iode, de la lanoline, du phénol ou des sels de mercure.
– Ne pas appliquer de pommades occlusives.
– Ne pas utiliser de talc ou de fécule de maïs : le talc peut provoquer des problèmes respiratoires chez le nourrisson. Lorsqu’il est mouillé, il s’agglutine en petits grains qui irritent la peau. Quant à la fécule de maïs, elle peut favoriser les infections à levures.
– Administrer un antalgique (paracétamol) si besoin.
→ Si la peau est au stade de simples rougeurs : appliquer une crème pour le change à base d’oxyde de zinc, de sulfate de cuivre (pâtes à l’eau) ou de dexpanthénol. L’oxyde de zinc est astringent, antiseptique, isolant et absorbant. Les pâtes à l’eau neutralisent les enzymes agressives des selles. Il existe également des soins cicatrisants.
→ Si la peau est lésée (érythème fessier suintant) : utiliser un antiseptique à visée asséchante, incolore de préférence, pour ne pas masquer l’évolution des lésions. En cas de surinfection bactérienne ou mycosique, une crème antibiotique ou antifongique sera prescrite. En cas de candidose buccale ou digestive associée, un antimycosique par voie orale sera prescrit.
La consultation médicale s’avère nécessaire en cas d’apparition de complications (voir infographie).
→ Le liniment oléo-calcaire utilisé par beaucoup de mamans est un mélange d’huile d’olive et d’eau de chaux (hydroxyde de calcium). Ce produit ne nécessitant pas de rinçage est intéressant pour nettoyer les fesses des nourrissons car il a des propriétés protectrices et émollientes. Cependant, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé déconseille fortement les préparations de liniment oléo-calcaire fabriquées à la maison, un cas de brûlures ayant été rapporté chez un nourrisson de 3 semaines. De plus, certains liniments peuvent contenir des huiles essentielles non adaptées à l’usage pédiatrique. Le liniment oléo-calcaire prêt à l’emploi est stabilisé et répond à des bonnes pratiques de fabrication nécessaires à la production d’un tel mélange.