TIRER LES LEÇONS DES CRISES - L'Infirmière Magazine n° 324 du 01/06/2013 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 324 du 01/06/2013

 

VEILLE SANITAIRE

ACTUALITÉ

DU CÔTÉ DES… COLLOQUES

Bien avant le Coronavirus, des crises sanitaires comme la canicule de 2003 ont mis à l’épreuve les systèmes d’alerte. La journée scientifique de l’InVS a dressé un bilan.

Les systèmes d’alerte les plus performants naissent souvent de crises, de catastrophes et de polémiques », a constaté Georges Salines, directeur du département santé-environnement à l’Institut de veille sanitaire (InVS), lors d’une journée scientifique organisée le 11 avril à Paris. À l’image du plan national canicule mis en place en France après l’été 2003. Un réel dialogue entre tous les acteurs politiques, administratifs, scientifiques, sanitaires, sociaux a été établi. « En 2003, les services d’urgences étaient en pleine informatisation, c’était le moment idéal pour structurer notre recueil de données, organiser les transmissions, réfléchir aux moyens d’alerte », a rappelé Christophe Leroy, chef de service des urgences de l’hôpital Louis-Mourier (AP-HP), à Colombes (Hauts-de-Seine). Les urgentistes ont enclenché une réflexion qui a entraîné la création du réseau Oscour (Organisation de la surveillance coordonnée des urgences). Les hôpitaux qui y participent, représentant 60 % des passages aux urgences, sont dotés d’un dossier médical informatisé qui permet la transmission directe, automatique et confidentielle à l’InVS des informations standards.

Pression

L’épidémie due à la bactérie E. Coli, responsable de 76 décès en Europe en 2011, dont 50 en Allemagne, a souligné la nécessité d’améliorer le « système de notification des événements sanitaires » outre-Rhin, a résumé Gérard Krause, du Robert-Koch Institute de Berlin. Un autre enseignement concerne la communication envers le grand public et à l’intention des autorités sanitaires des pays voisins. « Nous avons subi, très vite, une grosse pression, avec une impatience du public et des médias, envers qui nous n’avions pas fait l’effort d’expliquer nos recherches en cours », poursuit l’épidémiologiste. Beaucoup d’informations ont été divulguées sans avoir été totalement validées. D’où l’incrimination préalable du concombre importé d’Espagne, finalement infirmée après la poursuite des investigations.

Les épidémiologistes assurent également une surveillance de certains indicateurs de santé. Odile Boutou Kempf, de l’InVS, a présenté ses travaux sur l’observation des nano-matériaux. Ces molécules, dont les dangers sont identifiés chez l’animal et qui présentent un risque cancérigène, font désormais l’objet d’une déclaration obligatoire. Mais, beaucoup d’incertitudes persistent quant aux pathologies à surveiller et au nombre de travailleurs exposés. Joëlle Le Moal, quant à elle, travaille sur les données disponibles concernant la baisse de la qualité du sperme, en France comme en Europe. « Quelque chose de très inquiétant se passe actuellement : la qualité spermatique est un indicateur sentinelle de santé ; il peut donc y avoir des enjeux sanitaires au-delà de la procréation », remarque-t-elle. L’avenir dira si ces travaux permettront de prévenir de prochaines crises sanitaires.