L'infirmière Magazine n° 325 du 15/06/2013

 

FORMATION CONTINUE

FICHE TECHNIQUE

Examen pratiqué dans les situations évocatrices d’une pathologie cardio-vasculaire, l’ECG peut être réalisé par un infirmier. Mais les résultats seront obligatoirement interprétés par un médecin

En 2008, 37 700 décès coronariens se sont produits en France, selon les statistiques nationales de l’InVS. C’est la deuxième cause de décès. On estime à 1 810 000 le nombre de personnes ayant une cardiopathie ischémique, et à 780 000 celui des personnes déclarant un antécédent d’infarctus du myocarde. On peut donc supposer que tout infirmier(e) sera confronté(e) un jour à un patient présentant une douleur thoracique dont l’examen de référence est, et reste l’électrocardiogramme (ECG).

Quand faut-il faire un ECG ?

• Les situations qui doivent faire suspecter une origine cardio-vasculaire et amener à réaliser un ECG sont :

– une douleur thoracique, quelle que soit sa forme (constriction, douleur en pointe, en coup de poignard…), associée ou non à une douleur irradiante dans la mâchoire ou le bras gauche ;

– une douleur épigastrique ;

– une détresse respiratoire chez un insuffisant cardiaque connu ou suspecté ;

– une douleur thoracique, même faiblement ressentie chez un diabétique ;

– le malaise d’une personne traumatisée.

• La liste est non exhaustive, et un contexte évocateur d’une pathologie cardio-vasculaire doit faire réaliser un ECG de façon systématique.

Un infirmier peut-il pratiquer cet examen ?

• Le Code de la santé publique, qui régit la profession infirmière, stipule, dans l’article R. 4311-2, que « les soins infirmiers, préventifs, curatifs ou palliatifs (…) ont pour objet (…) de concourir à la mise en place de méthodes et au recueil des informations utiles aux autres professionnels, et notamment aux médecins, pour poser leur diagnostic et évaluer l’effet de leurs prescriptions ».

• L’article R. 4311-5 précise que relèvent du rôle propre infirmier : « la surveillance des fonctions vitales et le maintien de ces fonctions par des moyens non invasifs et n’impliquant pas le recours à des médicaments ».

• Selon l’article R. 4311-7, les enregistrements simples d’électro-cardiogramme sont soumis à prescription médicale.

• L’article R. 4311-10, dans son 3e alinéa, dispose que, dans le cas précis des épreuves d’effort ou d’emploi de médicaments modificateurs, « l’infirmier ou l’infirmière participe à la mise en œuvre par le médecin » de l’enregistrement de l’électrocardiogramme.

• Un protocole de soins d’urgence peut comprendre, conformément à l’article R. 4311-14, la réalisation d’un ECG par un infirmier hors présence médicale, selon des critères d’inclusion et d’exclusion face à une situation d’urgence. Cet examen peut être conduit conjointement à d’autres gestes techniques dans l’attente de l’arrivée du médecin.

En quoi consiste-t-il ?

L’ECG se traduit par un trait sur un papier millimétré, qui représente l’activité électrique du cœur. Chez un cœur sain, l’onde de dépolarisation suit un circuit immuable : dépolarisation du nœud sinusal, entraînant la contraction des oreillettes ; puis dépolarisation auriculo-ventriculaire, qui précède la contraction des ventricules par le faisceau de His et le réseau de Purkinje ; et, enfin, un temps de repolarisation.

Est-il difficile à réaliser ?

• La réalisation d’un ECG est un geste techniquement facile mais qui demande beaucoup de rigueur. En effet, si la pose d’électrodes sur une poitrine paraît aisée, encore faut-il les mettre au bon endroit et dans le bon ordre.

• L’ECG se pratique sur un patient en décubitus dorsal, au repos physique, respirant normalement et ne parlant pas. Sur le schéma ci-dessous figurent la position, le numéro et la couleur de chaque électrode.

Comment s’assurer qu’il est bien fait ?

Un ECG est bien réalisé lorsque, pour un rythme sinusal :

– entre chaque complexe, la ligne iso-électrique est plate et non micro-voltée ;

– toutes les dérivations sont présentes ;

– hormis prescription médicale spéciale, la vitesse du papier est de 25 mm/sec et l’amplitude de 1cm/mV ;

– l’examen ne fait pas de grande vague (cela est lié à la respiration ; il faudra refaire l’examen en apnée);

– l’identité, la date et l’heure, voire la circonstance (douleur, avant ou après traitement) sont des données imprimées ou écrites sur le document.

Et après l’examen ?

L’infirmier n’a pas le droit d’interpréter les résultats, mais certains signes doivent alerter et entraîner une lecture immédiate par un médecin.

Que voit-on sur un ECG normal ?

La normalité d’un ECG se caractérise par une succession de déflections positives ou négatives. La première déflection est l’onde P, elle correspond à la dépolarisation et à la contraction des oreillettes. Après un petit « silence » (le segment PR), apparaît l’onde (ou complexe) QRS, correspondant à la dépolarisation et à la contraction des ventricules. Enfin, après un nouveau « silence » (le segment ST), apparaît l’onde T, correspondant à la repolarisation et à la relaxation des ventricules. Avant une nouvelle onde P, l’on observe un silence électrique, c’est le repos complet du cœur (voir shéma P. 43).

Quels signes doivent alerter ?

Les signes avant-coureurs :

– une bradycardie ou une tachycardie ;

– l’absence d’onde P, une ligne de base inexistante (en dehors de parasites) s’apparentant à une fibrillation ou à des « toits d’usine », et des ondes P pas toujours devant un QRS ;

– un espace PR qui s’allonge au cours des cycles ;

– des QRS qui prennent une forme différente à chaque cycle, qui sont élargis ou très fins ;

– un sus ou sous-décalage du segment ST ;

– une onde T pointue, symétrique et ample. Une onde T négative (sauf en V1, voire en D3 et aVF).

Conclusion

Examen simple à réaliser, l’ECG peut s’intégrer facilement dans un protocole infirmier de soins d’urgence en l’absence d’un médecin. Il sera mené en fonction de critères d’inclusion dans le cadre, notamment, d’une douleur thoracique non traumatique. La lecture et l’interprétation de l’ECG demandent beaucoup de rigueur, un savoir en terme de physiopathologie et une certaine expérience de lecture. Si certains infirmiers savent détecter les signes principaux des anomalies de l’ECG, pour tous les autres, il faudra se référer au médecin pour interpréter l’examen.

Bibliographie

→ http://www.invs.sante.fr/fr/Dossiers-thematiques/Maladies-chroniques-et-traumatismes/Maladies-cardio-vasculaires/Les-cardiopathies-ischemiques

→ Code de la santé publique, quatrième partie : Professions de santé ; Livre III : Auxiliaires médicaux ; Chapitre 1er : Exercice de la profession ; Section 1 : Actes professionnels