Le dossier de soins infirmiers se trouve au cœur de la pratique professionnelle : ses fonctions, ses objectifs, son contenu découlent directement du rôle infirmier.
L’article R. 4311.3 du Code de la santé publique précise que (…) l’infirmier est chargé de la conception, de l’utilisation et de la gestion du dossier de soins infirmiers. Une définition générale de ce même dossier est proposée dans le « Guide du service infirmier n °1 », établi en 1985 par le ministère de la Santé : « Document unique et individualisé regroupant l’ensemble des informations concernant la personne soignée, il prend en compte les aspects préventif, curatif, éducatif et relationnel du soin. Il comporte le projet de soins, qui devra être établi avec le patient. Il contient des informations spécifiques à la pratique infirmière. » Cette définition large situe le dossier de soins infirmiers au cœur de l’exercice. Dans les établissements hospitaliers, il fait partie intégrante du dossier médical, dont le contenu est défini dans l’article R. 1112.2 du Code de la santé publique. Notons encore que le support du dossier – papier ou informatisé – est indifférent. L’article 1316-1 du Code civil dispose, en effet, que « l’écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité ».
À l’arrivée de la personne soignée, l’infirmière ouvre le dossier de soins infirmiers. Dès sa prise de fonction et avant chaque intervention, elle en prend connaissance. Elle note, date et signe les résultats des soins infirmiers prodigués au patient, ses observations sur l’évolution de son état de santé et toutes les informations utiles pour sa prise en charge globale. Tout au long du séjour, elle renseigne le dossier, veille à l’exactitude et au respect de la confidentialité des informations, notées par elle-même mais aussi par les intervenants placés sous sa responsabilité (aides-soignants, stagiaires infirmiers…). Il relève de sa responsabilité de vérifier que toutes les observations ainsi que les prescriptions médicales, sont notées, datées et signées par les médecins prescripteurs. Lors de la sortie de la personne soignée, elle établit par écrit une synthèse de la prise en charge infirmière et renseigne la fiche de liaison. Un double de ces documents doit impérativement être inséré dans le dossier de soins, qui fait lui-même partie du dossier du patient.
Des accidents dramatiques ont montré l’utilité de ces transmissions, comme une baisse de poids chez de jeunes enfants atteints de gastroentérite pour lesquels aucun poids de référence n’avait été noté et dont la déshydratation n’a pas pu être découverte à temps (ce qui a entraîné leur décès), ou des baisses progressives de tension chez des personnes opérées dont l’hémorragie interne a été fatale. Outre le détail des éléments, l’auteur et l’heure de la note doivent être spécifiés, ces informations permettant de pouvoir répondre aux questions ultérieures et servant de preuves en cas de contestation. Les magistrats et les experts ont tendance à considérer que « pas noté = pas fait », il est donc nécessaire de retrouver dans le dossier du malade l’ensemble de l’activité de l’infirmière. Les abréviations sont autorisées, à condition qu’on les utilise communément dans le service, et qu’elles témoignent de respect envers la personne et ses proches. Il a déjà été trouvé, dans certains dossiers, des mentions inacceptables sur l’hygiène du patient, sur ses visiteurs…Tout peut être écrit, mais de manière factuelle, et sans commentaire personnel. La création d’un dossier de soins infirmiers répond au souci de disposer d’un outil de travail unique permettant de donner des soins adaptés aux besoins du patient et d’assurer leur continuité, de répondre aux questions des médecins, de disposer, pour tous les acteurs, d’informations écrites, complètes et fiables. Sur le plan juridique, ce dossier constitue une preuve des soins apportés.
Au-delà des considérations médicales et juridiques, il ne faut pas oublier que l’un des lecteurs du dossier peut être le patient ou un membre de sa famille. Il convient donc de faire bien attention à ce que l’on y écrit, et de ne pas y annoter, par exemple, des remarques personnelles qui ne contribuent pas à la prise en charge du patient. Si les paroles s’envolent, les écrits restent.