FORMATION CONTINUE
PRISE EN CHARGE
Si l’infirmière veille au respect des bonnes pratiques d’injection, de conservation et de traçabilité, elle est aussi en mesure de repérer les effets indésirables dus aux vaccins. Grâce à son suivi, elle contribue à améliorer la couverture vaccinale de la population.
L’infirmière est habilitée à pratiquer les scarifications et injections destinées aux vaccinations ou aux tests tuberculiniques (article R. 4311-7 du Code de la santé publique). Toute vaccination nécessite une prescription médicale qui, sauf urgence ou protocole préalablement établi par un médecin, est écrite, qualitative et quantitative, datée et signée, sauf pour le vaccin antigrippal, qui bénéficie, sous conditions, du dispositif d’injection simplifié en relais des médecins depuis 2008. En effet, à l’exception de la première injection, l’infirmière est habilitée à pratiquer l’injection du vaccin antigrippal saisonnier sans prescription médicale aux assurés concernés par une prise en charge de l’assurance maladie : personnes âgées de plus de 65 ans et/ou atteintes de certaines pathologies (asthme, BPCO, insuffisance cardiaque grave…). Malgré une liste élargie en 2011 des bénéficiaires de ce dispositif simplifié, les jeunes de moins de 18 ans et les femmes enceintes en sont toujours exclus. La vaccination peut également être pratiquée par tous les médecins et par les sages-femmes pour certains vaccins de la mère et du nouveau-né. Elle est un acte qui doit être consenti par le patient.
À savoir : la vaccination contre la fièvre jaune ne peut être effectuée que dans un centre de vaccination antiamarile (liste des centres sur www.sante.gouv.fr). La vaccination contre la rage en cas de contamination possible (morsure) doit être réalisée dans un centre antirabique spécialisé (liste des centres sur www.pasteur.fr).
Il est important, en premier lieu, de bien contrôler l’identité du patient pour ne pas faire d’erreur et assurer ainsi une bonne traçabilité.
→ Les contre-indications « vraies » et définitives à la vaccination sont rares. Il s’agit essentiellement des antécédents de troubles neurologiques ou de réaction allergique grave suite à une première injection du vaccin. Les vaccins vivants sont atténués en cas d’immunodéficience (VIH…).
→ Certaines situations contre-indiquent temporairement la vaccination : infections aiguës avec fièvre (report d’une à deux semaines en général), traitement à base d’immunoglobulines ou de produits sanguins (délai de quelques mois), poussée allergique en cours, notamment eczéma étendu chez les enfants, dermatoses étendues évolutives.
→ Prudence chez les femmes enceintes : les vaccins vivants sont généralement contre-indiqués. Les autres bénéficiant de peu de données, une consultation s’impose.
→ Prudence chez les allergiques : s’assurer que la personne n’a pas rencontré d’allergies à l’un des constituants, en particulier les antibiotiques (néomycine, kanamycine, streptomycine). Dans le cas des allergies à l’œuf, il faut distinguer les vaccins qui ne contiennent que des traces de protéines d’œuf, pour lesquels le risque est quasi nul (vaccins préparés sur culture de fibroblaste de poulet, comme le ROR), de ceux qui en contiennent de façon avérée, cultivés sur œuf embryonné de poule (grippe, fièvre jaune). Dans ce cas, une consultation est préférable ainsi qu’une surveillance lors de l’injection, avec à disposition un traitement d’urgence.
→ Prudence avec les patients sous anticoagulants ou souffrant d’un trouble de la coagulation (risque hémorragique).
Les vaccins doivent être conservés à l’abri de la lumière dans leur emballage d’origine, entre 2 et 8 °C, au milieu du réfrigérateur et non dans la porte, où la température varie davantage. La stabilité et l’efficacité du vaccin en dépendent. Par exemple, le vaccin de la rougeole perd 90 % de son efficacité après deux mois à température ambiante. Ils ne doivent en revanche jamais être congelés. Le délai entre le domicile et le cabinet ne pose pas de problème ; il est cependant utile de conseiller d’utiliser des pochettes isothermes. Si la chaîne du froid a été interrompue plusieurs heures, contacter le fabricant pour connaître la conduite à tenir.
– Se laver les mains.
– Porter des gants.
– Désinfecter la peau au site d’injection avant vaccination à l’aide d’alcool ou d’un antiseptique.
– Attendre le séchage complet avant injection, l’excédent pouvant inactiver certains vaccins vivants.
– Ampoules, flacons et/ou seringues préremplies.
– Date de péremption.
Les vaccins sont généralement présentés sous forme de lyophilisat et solution à reconstituer ou de seringue préremplie. S’assurer de la dissolution complète ou de la bonne mise en suspension de la poudre dans le solvant avant l’injection et utiliser immédiatement. Les seringues préremplies présentent généralement une bulle d’air qui ne doit pas être purgée avant injection (pour administrer la totalité du produit et éviter ainsi les sous-dosages), mais remontée du côté du piston (orienter la seringue en ce sens).
La grande majorité des vaccins sont administrés par voie sous-cutanée (SC) ou intramusculaire (IM), parfois intradermique, mais jamais intravasculaire.
La piqûre se fait dans la région du deltoïde, en pinçant la peau, l’aiguille inclinée à 45°. C’est la voie recommandée pour les viraux (rougeole, oreillons, rubéole…) et une option possible pour certains vaccins polyosidiques non conjugués. Elle est recommandée chez les hémophiles ou les personnes sous anticoagulants (saignements moindres). Exercer une pression locale pendant au moins cinq minutes.
La piqûre s’effectue avec un angle d’attaque de 90° au niveau du deltoïde ou de la face antéro-latérale de la cuisse (nourrisson). On ne recommande pas l’injection dans la fesse, où l’épaisseur du tissu graisseux peut provoquer une injection intragraisseuse, moins efficace, ou des paralysies sciatiques. Cette voie est préférée dans les vaccinations pour lesquelles elle assure une meilleure réponse (hépatite B, grippe). Chez les hémophiles et les personnes sous anticoagulants, si cette voie est nécessaire, faire un point de contact fort et prolongé.
Cette pratique est réservée au vaccin BCG. L’injection avec un angle d’attaque de 10 à 15 ° au niveau de la face externe du bras est délicate, encore plus chez les jeunes enfants. On utilise des aiguilles de 0,4 à 0,5 mm de calibre, de 10 mm de long et à biseau court et des seringues subdivisées en centièmes de millilitres adaptées aux très petits volumes. Dès pénétration du derme (environ 2 mm), exercer sur le piston une ferme pression, car la sensation de résistance est normale. Apparaît alors au point d’injection un œdème de quelques millimètres de diamètre en « peau d’orange ». Cette voie est aussi utilisée pour un vaccin grippal pas encore commercialisé en France (Intanza).
On utilise des vaccins oraux (contre la poliomyélite ou les rotavirus) et la voie nasale (vaccin antigrippal Fluenz).
Les aiguilles généralement fournies avec la boîte sont adaptées en taille calibre et biseau au type d’injection. Le biseau doit être long pour les injections IM et SC, court en intradermique. Tenir compte de l’âge du patient et de sa corpulence, une aiguille plus longue pouvant être choisie pour une personne forte.
Pour assurer la traçabilité et certifier la vaccination, tout professionnel doit la consigner dans le carnet de vaccination du patient ou sur un certificat de vaccination qui lui est remis. Les renseignements qui doivent y figurer sont : le nom, l’âge, la date, la marque du vaccin, son numéro de lot de fabrication, le nom et la signature de la personne qui a vacciné.
→ D’un même vaccin : l’intervalle est en moyenne d’un ou 2 mois, délai nécessaire pour initier des défenses immunitaires spécifiques. Il n’y a jamais intérêt à le raccourcir, car la réponse immunitaire serait diminuée. Le délai entre primo-vaccination et rappels s’appuie sur les données expérimentales propres à chaque vaccin.
→ De plusieurs vaccins en points d’injection différents : en cas d’administration de vaccins inactivés avec un vaccin vivant atténué, l’intervalle entre les doses n’a pas d’importance. En revanche, si l’on administre deux vaccins vivants atténués, il faut le faire de façon simultanée ou bien respecter un intervalle de quatre semaines au moins sous peine de diminuer la réponse immunitaire (ROR, fièvre jaune, varicelle).
Les effets indésirables reconnus imputables aux vaccins sont généralement limités et d’assez courte durée (24 à 72 heures). On distingue ainsi :
→ Les effets locaux : rougeur, tuméfaction, douleur au point d’injection, suivant les vaccins (ex. : 10 % des vaccinations contre l’hépatite B, 40 % des vaccinations contre les méningocoques C) ;
→ Les effets généraux : fièvre, généralement inférieure à 39 °C, et céphalées, prises en charge par un antalgique/antipyrétique. À noter : ces réactions apparaissent en général 24 à 48 heures après l’injection. Dans le cas du vaccin rougeole/oreillons/rubéole, le pic fébrile, parfois accompagné de plaques rouges, est observé chez environ 10 % des enfants, mais environ 7 à 12 jours après l’injection. La fièvre, rarement supérieure à 39 °C, doit être surveillée, notamment chez le jeune enfant, chez qui le risque est l’apparition de convulsions fébriles.
→ Les allergies : le plus souvent, il s’agit de rougeurs et de démangeaisons cutanées généralisées. Une réaction de type anaphylactique, rare, est aussi possible : elle apparaît, en général, dans les trente minutes suivant l’injection, sous la forme d’une éruption type urticaire, un œdème du visage, une éventuelle détresse respiratoire, une hypotension pouvant évoluer vers un état de choc.
Le vaccin est soumis aux mêmes règles de pharmacovigilance que tout autre médicament. Tout professionnel de santé ayant eu connaissance d’un effet indésirable grave ou inattendu susceptible d’être dû à un vaccin doit le déclarer au Centre régional de pharmacovigilance (CRPV) dont il dépend. Les fiches de déclaration standard Cerfa peuvent être commandées directement auprès des CRPV ou bien téléchargées sur le site de l’ANSM, www.ansm.sante.fr.
Quand un patient n’est pas à jour de ses vaccinations, il est possible de lui proposer un rattrapage. Deux règles à connaître :
– chaque dose compte, une vaccination initiée ne doit pas être recommencée depuis le début, mais juste complétée par les doses qui manquent ;
– quand plusieurs doses sont nécessaires, un intervalle de quatre semaines au moins (parfois trois) est nécessaire entre deux doses d’un même vaccin ;
– les règles de rattrapage à suivre en transition entre ancien et nouveau calendrier vaccinal 2013 sont répertoriées dans le tableau « Calendrier de rattrapage 2013 des vaccinations », paru en même temps que le nouveau calendrier dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) n° 14-15 du 19 avril 2013 (téléchargeable sur le site www.invs.fr).
Seule une démarche informative et éducative basée sur des connaissances solides permet de sensibiliser à l’intérêt d’atteindre de bonnes couvertures vaccinales. Le guide des vaccinations 2012 (voir Savoir plus ci-contre) propose ainsi aux professionnels de santé une démarche éducative. On peut saisir toutes les opportunités pour aborder le sujet avec les patients : soins d’une brûlure/blessure (« Êtes-vous à jour dans votre vaccination contre le tétanos ? »), approche de l’hiver (« Pensez à la vaccination contre la grippe ! »)…
Il convient aussi d’explorer le point de vue des patients. Il s’agit, si le patient n’est pas à jour, de comprendre pourquoi. « Quelque chose vous chagrine dans la vaccination ? », « Pensez-vous être protégé contre les maladies évitables par les vaccins ? » sont des questions qui permettent au patient d’exprimer des réticences (« J’ai peur des effets indésirables… », « On ne sait pas comment c’est fabriqué… ») ou son manque d’intérêt (« À mon âge, c’est inutile… »). En cas de réticences, il faut argumenter en apportant des éléments validés : les vaccins sont élaborés avec le même soin que tout autre médicament, des dizaines de contrôles sont effectués… S’il s’agit d’un manque d’intérêt : rappeler les bénéfices de la vaccination, les risques éventuels de la maladie, l’enjeu d’une couverture suffisante dans la population… Des documents d’information (voir Savoir plus ci-contre) pourront être remis.
La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) estime, selon un rapport sur l’état de santé de la population (2009-2010), que plus de 50 % des adultes n’ont plus aucun document sur lequel seraient reportées leurs vaccinations. Les patients sont de plus rebutés par la complexité du calendrier vaccinal et finissent souvent par ne plus se faire vacciner du tout. L’infirmière peut leur apporter son aide :
→ La méthode papier : il faut s’aider des traces des vaccinations précédentes, les comparer aux recommandations actuelles, et déterminer quels vaccins sont à faire et à quel moment. Un carnet de vaccination individuel à remplir et à conserver peut être téléchargé gratuitement sur www.semaine-vaccination.fr, rubrique Documents et outils.
À savoir : en cas de doute sur des vaccins antérieurs ou des antécédents, certaines sérologies peuvent être réalisées afin d’éviter des revaccinations obligatoires.
→ Le carnet de vaccination électronique : conçu à l’initiative du groupe d’experts d’étude en préventologie (GEP), le carnet de vaccination électronique ou CVE peut être rempli via Internet. Une fois validé par un professionnel de santé, il a un caractère tout aussi légal que les carnets/certificats « papier ». Sécurisé par mots de passe, il permet de gérer les carnets de vaccination de toute la famille, d’éviter les pertes d’informations, d’obtenir des conseils personnalisés pour chacun en fonction des caractères physiologiques et pathologiques et d’être prévenu des prochains vaccins et rappels à effectuer.
→ Expliquer le geste et son intérêt, s’il peut le comprendre.
→ Réconforter l’enfant, qui peut être tenu par un parent.
→ Le distraire par une histoire, un jeu, une chanson…
→ Donner un peu d’eau sucrée aux nourrissons juste avant le geste, une tétine ou le sein durant le geste (effet antalgique).
→ Féliciter l’enfant après le geste.
À savoir : les patchs contenant des anesthésiques locaux type Emla préviennent la douleur liée à l’effraction cutanée, mais pas la douleur liée à l’injection du produit. Par mesure de prudence, on ne les utilise pas avec le vaccin vivant atténué BCG, car les propriétés antibactériennes des anesthésiques locaux pourraient diminuer l’efficacité du vaccin.
→ Tous les vaccins obligatoires ainsi que la majorité de ceux qui sont recommandés sont pris en charge à 65 %, sauf :
– le vaccin contre la grippe, délivré gratuitement contre un bon de prise en charge aux plus de 65 ans, à certains malades chroniques (asthme, insuffisance cardiaque…), séjournant dans un établissement médico-social… ;
– le vaccin combiné rougeole/oreillons/rubéole, pris en charge à 100 % de 12 ? mois à 17 ans révolus.
→ L’injection est remboursée à 70 % si c’est le médecin qui vaccine, ou à 60 % si c’est une infirmière sur prescription médicale. Pour certaines affections de longue durée, l’injection peut être prise en charge à 100 %, notamment celle de la grippe.
À savoir : certaines vaccinations peuvent être pratiquées gratuitement dans les centres départementaux.
Source : Ameli.fr.
→ Hépatite B et sclérose en plaques
Suite à de nombreuses études, les données épidémiologiques, cliniques et expérimentales de nombreux pays n’ont pas permis, à l’heure actuelle, d’apporter la preuve d’un lien causal entre la vaccination contre l’hépatite B et l’apparition de maladies auto-immunes, en particulier la sclérose en plaques.
→ Myofasciite à macrophages et aluminium
De nombreux vaccins contiennent des adjuvants à base de sels d’aluminium, qui peuvent persister longtemps dans les macrophages rassemblés autour des fibres musculaires et donner lieu à une lésion microscopique nommée « myofasciite à macrophages ». À ce jour, les éléments disponibles indiquent que, bien que l’aluminium vaccinal puisse persister au site d’injection pendant des années (« tatouage vaccinal »), cela n’est pas associé à une maladie systémique diffuse (associant des symptômes type myalgies, fatigue…) (Lire aussi p. 9).