L'infirmière Magazine n° 331 du 15/10/2013

 

ÉDITORIAL

Coïncidence étonnante ! Alors que le travail du dimanche dans le commerce du bricolage fait l’objet d’actions en justice et suscite un vif débat, la Commission européenne vient tout juste d’épingler la France pour non-respect de la directive sur le temps de travail des médecins hospitaliers de 2003. Il était temps !, direz-vous. Les praticiens hospitaliers (PH) sont censés ne pas dépasser, en moyenne, 48 heures par semaine sur une période de référence de 13 semaines, et bénéficier de repos compensatoires après des heures supplémentaires la nuit. Un droit qui n’est pas respecté, tout comme les conditions requises par la directive permettant aux PH de travailler plus de 48 heures(1). Cet avis de la commission ne peut que ravir l’intersyndicat national des internes (INSNI), qui avait révélé, dans une enquête de septembre 2012, des cadences et des horaires intenables : une amplitude horaire de 60 heures de travail hebdomadaire, jusqu’à 80 heures dans certaines spécialités comme la chirurgie ou l’anesthésie ! Dans la majorité des cas, le repos de sécurité ne serait pas respecté, et 25 % des internes reconnaissaient avoir commis une erreur médicale due au non-respect du temps de repos. Cette sommation de la Commission européenne, qui donne deux mois à la France pour décider des mesures à prendre pour se conformer à la directive, arrive à point nommé pour soutenir les urgentistes grévistes. Dommage que la commission ne s’attaque qu’au temps de travail des médecins et ignore celui des infirmières, concernées, elles aussi, par les problèmes d’organisation, de sous-effectif, de changements de planning intempestifs, et les heures supplémentaires (sans toujours avoir droit à une rémunération améliorée ou à des récupérations). Reste que le recours à ces dernières est un moyen, pour certaines, d’arrondir les fins de mois difficiles. Dans le monde hospitalier comme dans la grande distribution, concilier liberté de travailler et droit du travail n’est pas simple, surtout lorsqu’il faut y ajouter la sécurité des patients.

1– Le médecin ne peut être contraint d’effectuer des heures au-delà de 48 heures, par exemple. Selon la Commisssion, les règles de mesure du temps de travail des PH ne sont pas claires, ce qui conduit, dans la pratique, à un dépassement.