SILENCE, ON SOIGNE ! - L'Infirmière Magazine n° 333 du 15/11/2013 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 333 du 15/11/2013

 

RÉANIMATION

ACTUALITÉ

DU CÔTÉ DES… ÉTABLISSEMENTS

Même si les soignants en ont l’habitude, travailler dans un environnement bruyant peut entraîner des risques pour les patients. Le CH de Rangueil (Toulouse) a trouvé le moyen de diminuer le niveau sonore dans le service de réanimation.

Facteur de stress pour les patients, leurs visiteurs et même le personnel, le niveau sonore qui règne généralement au sein d’un service de réanimation peut également engendrer une augmentation des risques. À l’occasion du déménagement dans des locaux neufs du service de réanimation polyvalente où ils exercent, Guillaume Decormeille et Cédric Baron, infirmiers à l’hôpital de Rangueil (CHU de Toulouse), ont participé à la mise en place d’un ensemble de procédés diminuant le bruit de façon très sensible. Une initiative présentée au Salon infirmier, en octobre, devant une salle comble de soignants tout ouïe.

Alarmes lumineuses

« Au sein de notre ancien service, le niveau sonore pouvait atteindre 100 décibels, alors que l’OMS préconise 60Db le jour et 40 la nuit », témoignent les infirmiers, avant de se réjouir des résultats obtenus, parfois inférieurs aux recommandations. Pour y parvenir, tout a été passé au crible. À commencer par les alarmes sonores, boutées hors des chambres et réservées aux couloirs et au PC de surveillance. « Et encore, ajoutent les soignants, nous les avons limitées à un système de bip beaucoup moins bruyant. » Afin de pouvoir tout de même bénéficier d’un niveau de sécurité optimal dans les chambres, les moniteurs ont été placés à hauteur des yeux des soignants. De cette manière, les infirmiers ou les médecins n’ont pas à lever la tête pour les contrôler. Car, par souci de calme, ce sont des alarmes lumineuses qui sont installées au lit des malades, allant du jaune au rouge, avec une variation du rythme de clignotement selon la gravité de l’alerte. Les chambres étant fermées par des portes occlusives, aucun son ne passe des couloirs aux chambres.

Mais, le vrai changement se situe dans le réglage affiné et régulier des alarmes. « Une alarme bien réglée, c’est un patient en sécurité », tel est le leitmotiv de Guillaume Decormeille et Cédric Baron. Un élément essentiel, qui relève de la compétence soignante. D’ailleurs, lors de la semaine d’intégration des nouveaux infirmiers arrivant dans le service, ceux-ci suivent une formation particulière dans ce domaine. « Il ne s’agit pas de régler les alarmes des patients en arrivant dans le service, puis de les laisser telles quelles pendant douze heures », précisent-ils. L’idée est de s’adapter tout au long de sa journée ou de sa nuit de travail à l’état du malade, aux événements et aux soins pratiqués. Par exemple, chez un patient en train de passer d’une sédation profonde à une sédation plus légère, voir se mettre en route les systèmes d’alerte à chacun de ses mouvements serait contreproductif. De même, lors de certains soins amenés à faire réagir une personne malade, l’infirmier pourra couper temporairement les alarmes. Et de présenter un autre exemple : « Chez un patient dont la tension artérielle est habituellement très élevée, régler les moniteurs sur une pression artérielle classique pourrait être dangereux en cas de chute brutale. » Le regroupement des scopes affichant dans les couloirs les paramètres essentiels de quatre ou cinq chambres à la fois participe également à la diminution des bruits.

Moins de stress

« Lorsque le brouhaha est permanent, une sorte de banalisation de l’alarme sonore s’installe, qui n’est pas propice à la sécurité des patients. Désormais, le moindre son prend toute sa signification », insistent les infirmiers. « Il n’a pas été simple de s’adapter à cette culture du silence. Dans notre ancien service, tout se faisait à l’oreille », témoignent-ils. Lors d’une enquête réalisée après cette réorganisation, l’immense majorité des patients, des visiteurs et du personnel a confirmé la diminution du stress par rapport à l’ambiance d’un service classique.

Guillaume Decormeille et Cédric Baron assurent des formations dans d’autres services de réanimation afin d’aider le personnel à réduire le niveau sonore environnant. Ils y enseignent toutes sortes d’astuces applicables partout, même dans les services peu modernisés, comme l’adaptation de panneaux sur la tête de lit des patients, ce qui permet de diminuer l’intensité des bruits perçus.