La ministre de la Santé a présenté les « grandes orientations » de son projet de loi, censé « transformer le quotidien de millions de Français ».
Ce texte ne sera ni un nouveau grand mécano institutionnel, ni une loi de santé publique, où les objectifs se comptent par dizaines », prévient Marisol Touraine. Le 19 juin, la ministre présentait les « grandes orientations » de sa future loi de santé devant une salle comble de journalistes et de représentants des secteurs sanitaires et médico-sociaux. Pour le « détail des mesures », il faudra patienter jusqu’à la transmission du texte au Conseil d’État, prévue cet été, voire jusqu’à sa présentation en Conseil des ministres, en septembre. L’examen à l’Assemblée nationale est attendu pour le début d’année 2015.
S’inscrivant dans la droite ligne de la Stratégie nationale de santé, définie en septembre dernier, la future loi devra « transformer, réorienter dans la durée le système de santé » pour garantir un accès pérenne à tous les Français. Se nourrissant des propositions issues de 160 débats régionaux, auxquels ont participé près de 25 000 personnes, elle reposera sur quatre piliers : la prévention, l’innovation, le parcours de soins et les droits des patients. La loi instaurera, ainsi, les actions de groupe et rendra obligatoire la représentation des usagers dans les agences nationales de santé.
La ministre compte faire de la prévention l’« un des socles de notre politique de santé ». Si la France peut s’enorgueillir d’indicateurs de santé publique « encourageants » (longue espérance de vie, baisse de la mortalité liée aux maladies cardiovasculaires…), elle doit faire face aux défis que représentent le vieillissement de la population et l’augmentation de la prévalence des maladies chroniques et des affections de longue durée - 9 millions de Français sont concernés. « De fortes inégalités existent », pointe la ministre : « En CM2, les enfants d’ouvriers sont 10 fois plus touchés par l’obésité que les enfants de cadres. C’est parmi eux que se recruteront les futures victimes de la “diabésité”. » Parmi les mesures envisagées : instauration d’un parcours éducatif de santé, définition du cadre d’expérimentation des salles de consommation à moindre risque, généralisation des tests rapides d’orientation diagnostique pour le VIH, mise en place d’un logo renseignant sur la qualité nutritionnelle des produits alimentaires industriels, lutte contre le tabagisme et l’alcoolisation excessive et désignation d’un médecin traitant (généraliste ou pédiatre) pour les moins de 16 ans. La délivrance de la contraception d’urgence par l’infirmière scolaire sera facilitée grâce à la suppression de la « condition de détresse » exigée.
Proximité, parcours et égalité seront les maîtres-mots du service public territorial de santé que veut construire Marisol Touraine. Pour améliorer l’accès aux soins, la ministre compte généraliser le tiers-payant chez le médecin d’ici 2017, mettre en place un numéro d’appel unique dans chaque département pour orienter les patients vers la garde de ville et créer un portail web qui fera office de « GPS santé ». La loi devra faciliter la coordination entre ville et hôpital par la remise, le jour-même de la sortie du patient, d’une lettre de liaison. Le dossier médical sera relancé, les modes de rémunération repensés. Encore meurtri par les restructurations qui se sont succédé ces dernières années, l’hôpital sera ménagé par la future loi : le service public hospitalier sera « rénové », l’intérim médical contrôlé grâce au plafonnement des salaires, les groupements hospitaliers de territoire, permettant de mutualiser certaines activités (système d’information, achats…) seront obligatoires. Par ailleurs, le service public territorial comportera un volet propre sur la santé mentale ; une « mission de psychiatrie de secteur » sera reconnue.
Le projet de loi permettra l’excercice de pratiques avancées des professions paramédicales. « Le métier d’infirmière clinicienne sera reconnu par voie réglementaire », a précisé Geneviève Fioraso, ministre de l’Enseignement supérieur. Les sages-femmes participeront à la prise en charge de l’IVG médicamenteuse. Côté formation, la ministre de l’Enseignement supérieur est revenue sur la « licence Santé », dont la création avait été annoncée par Marisol Touraine lors du Salon infirmier de 2013. Jean-François Girard, président du pôle de recherche et d’enseignement supérieur Sorbonne-Paris Cité, s’est vu confier une mission sur les modalités de mise en œuvre de ce socle commun de formation, qui vise à « rapprocher les différents parcours professionnels » et développer des passerelles. « Il y aura un avant et un après, promet Marisol Touraine. Ce texte transformera le quotidien de millions de Français. » Mais il faudra encore attendre un peu…