L'infirmière Magazine n° 348 du 01/07/2014

 

PORTES OUVERTES

ACTUALITÉ

DU CÔTÉ DES… ÉTABLISSEMENTS

CHARLIE VANDEKHERKOVE  

Une trentaine d’établissements participants, 60 conférences, 200 animations : l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris organisait, le 14 juin, une journée découverte dédiée au public.

Visite d’une biberonnerie ou d’un bloc opératoire, déjeuner en blanc avec les soignants, puis conférence sur le cœur artificiel… Samedi 14 juin, de 11 h à 17 h, les Franciliens ont pu arpenter les couloirs des principaux hôpitaux de l’AP-HP, à la recherche du programme parfait. En une journée « Portes ouvertes » inédite, destinée aussi bien aux usagers qu’aux professionnels, l’hôpital public a révélé des infrastructures dans lesquelles, d’ordinaire, pénètre seule une poignée de privilégiés. Ainsi, au second étage de l’hôpital Saint-Antoine, dans une zone à accès restreint située au bout d’un dédale de couloirs, se trouve l’unité de préparation des anticancéreux. Chaque jour, 150 à 200 préparations injectables et individuelles y sont élaborées par une équipe pluridisciplinaire qui réunit médecin, pharmacien, préparateur et infirmière. Alors que la journée commence, une étudiante en médecine et deux patients viennent suivre l’élaboration d’une chimiothérapie avec le Dr Anne-Christine Joly, pharmacienne hospitalière responsable de cette unité conçue fin 2011. En temps normal, seuls les professionnels y entrent. Ce matin-là, les visiteurs doivent rester en dehors des enceintes stériles mais peuvent découvrir, grâce à des vidéos, toutes les étapes de la préparation et apercevoir les différentes salles qui composent ce service depuis le couloir vitré longeant la structure. « C’est très important pour moi qu’il y ait des patients dans le public aujourd’hui, pour que nous leur montrions notre implication, explique le Dr Joly. Nous sommes à mi-chemin entre le semi-industriel et le manuel. Nôtre tâche est très précise car chaque préparation est individuelle. »

Temps forts

Sur le site de Port-Royal, à l’hôpital Cochin, un bloc opératoire a attiré une foule curieuse tout au long de la journée. « Alors que nous avions prévu 30 visiteurs, explique le Dr Jean-François Regnard, chef du service de chirurgie thoracique, nous en avons eu 70 ! » L’originalité de ce bloc, construit en novembre 2012, tient à sa conception : trois salles ont été créées dans une extension reliée au bâtiment principal par une passerelle et reposant sur des pilotis. En deux nuits, onze modules métalliques et une passerelle, acheminés d’Allemagne, ont été assemblés par des grues. « Le camion qui transportait la passerelle a mis trois heures à entrer dans Cochin en marche-arrière, se souvient le Dr Regnard, amusé. Mais ce n’est pas tant son architecture que le bloc lui-même qui attire les visiteurs. C’est un endroit mystérieux, qui impressionne. » Alain, 65 ans, a fait le déplacement depuis la région parisienne avec sa femme et son fils. « Je voulais être chirurgien mais, au lieu de cela, j’ai été fonctionnaire de police », ironise-t-il pour expliquer son intérêt. Le couple a entendu parler de cette journée dans la presse mais regrette que l’information n’ait pas mieux circulé.

Dommage, en effet, que le nouvel Institut E3M, centre de référence en endocrinologie, maladies métaboliques et médecine interne de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, ait attiré si peu de monde. Ici, rien de spectaculaire mais une rencontre émouvante avec Jean-Luc Loiseau, organisateur d’un tour de France à pied pour lutter contre le surpoids et l’obésité. Le but était « de dépasser le symptôme. Une partie de nous en a besoin, une autre veut être libre. Nous avons les ressources en nous. Il faut savoir comment les mobiliser », explique-t-il. Autre mo­ment de convivialité, l’initiation à la cuisine diététique, suivie d’une dégustation. « Nous montrons aux patients comment adapter des recettes. C’est de la cuisine pour tout le monde, pas de la cuisine régime », explique Mireille Claudel, aide-soignante. Ces ateliers s’adressent à des patients souffrant de différents troubles. « Le regroupement, au sein de l’Institut E3M, de six spécialités [dont la diabétologie, l’endocrinologie, les maladies de la thyroïde, ndlr] a vocation à créer du lien entre ces dernières et à offrir un vrai parcours de soin », commente Nadia Allagui, cadre de santé.

Des usagers déjà présents

Malgré une fréquentation inégale d’un site à l’autre, peut-être due aux horaires restreints ou à la distance entre les animations, les visiteurs sont venus en nombre pour découvrir EOS, installé à Cochin depuis deux ans. Ce système de radiographie, dont très peu d’établissements sont encore équipés, permet de réduire les doses d’irradiation de huit à dix fois par rapport à une radio conventionnelle. Haut de plusieurs mètres, il accueille le patient debout. Et permet de réaliser des clichés simultanés du corps entier, de face et de profil, et une reconstruction de ces clichés en 3D.

« On ne pensait pas qu’il y aurait tant de monde, explique Stéphane Chagrin, manipulateur-radio qui assure la visite, mais cela intéresse les gens. En revanche, beaucoup de visiteurs sont des usagers déjà présents dans l’hôpital », précise le jeu-ne homme. À l’image de cette mère de famille, venue rendre visite à sa fille hospitalisée, et qui en a profité pour faire un dépistage gratuit du diabète. Même son de cloche pour Claude, 62 ans, qui travaille dans l’administration de l’établissement et a été informé de l’opération en interne : « Je n’ai pas eu le temps de tout voir, mais il faudrait renouveler l’expérience tous les ans. »

TROIS QUESTIONS À FRANÇOISE ZANTMAN DIRECTRICE DES SOINS

« Rappeler notre rôle de service public »

Quel était l’enjeu de ces portes ouvertes ?

→ L’idée était de partager avec le grand public l’ensemble des facettes de nos activités et de recevoir ses questions dans une optique de transparence et d’échange de connaissances. Nous voulions rappeler notre rôle de service public hospitalier, à la fois d’excellence et de proximité.

Comment cette journée a-t-elle été mise en place ?

→ Certains hôpitaux se sont organisés en interne, et ont choisi eux-mêmes leurs manifestations. Chacun s’est surtout positionné en fonction de ses appétences et de ses disponibilités, sur la base du volontariat. Ensuite, en fonction de nos principales préoccupations pour répondre aux besoins des usagers, nous avons choisi trois thèmes : la solidarité avec un proche malade, prévenir et vivre avec la maladie et enfin, mieux vivre grâce au progrès médical.

Pourquoi organiser cette opération maintenant ?

→ L’AP-HP traverse une période tout à fait particulière. Nous sommes en pleine élaboration du nouveau plan stratégique 2015-2019. Il aboutira à un livre blanc et comprendra à la fois un projet médical, social et professionnel. C’était le bon moment pour faire découvrir toutes les facettes de notre hospitalisation.

PROPOS RECUEILLIS PAR C.V.