Le projet de loi de santé fait la part belle à la prévention. Si le rôle des infirmières dans la lutte contre le tabagisme et les grossesses non désirées est reconnu, l’élargissement de leurs compétences en matière de vaccination n’est pas au programme.
La future « loi relative à la santé » prend forme. Après une phase de concertation, le projet de loi a été transmis cet été au Conseil d’État. Le texte, diffusé par l’APM, est composé de 54 articles répartis en quatre titres principaux
grandes orientations
Afin de développer les stages en milieu extra-hospitalier, le code de la Santé publique, qui limitait l’exercice dérogatoire de la profession infirmière par les étudiants aux seuls établissements et services agréés, sera modifié. Ils pourront « réaliser des actes », pris en charge par l’Assurance maladie, dans les structures de soins ambulatoires et les cabinets libéraux. Plusieurs catégories de professionnels se verront attribuer de nouvelles compétences : pour mieux prévenir le risque de grossesse non désirée, les sages-femmes seront autorisées à pratiquer l’IVG médicamenteuse, tandis que les infirmières scolaires pourront délivrer la contraception d’urgence sans « condition de détresse ». Suivant une autre préconisation du plan Cancer 3, les IDE seront désormais habilitées à prescrire des substituts nicotiniques.
Mais, en matière de vaccination, la future loi de santé n’est pas à la hauteur des attentes de la profession. Afin de « faciliter l’accès à la vaccination » en diversifiant « l’offre de proximité », le projet de loi rend possible la pratique de la vaccination… par les pharmaciens d’officine, sur prescription. Déplorant « un glissement de compétences préjudiciable pour les infirmières », le Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil) rappelle que selon le Code civil, « seules les professions médicales et, par délégation, les IDE, sont autorisées à porter atteinte à l’intégrité du corps humain ». « La future loi de santé oblige donc à un remaniement total des textes en vigueur », alors que les infirmières libérales peuvent « mettre très rapidement leurs 57 100 cabinets (contre 22 635 pharmacies) à la disposition de la population ». « Une telle mesure est-elle fondée sur le seul souci d’améliorer la santé publique » ou motivée par des « velléités corporatistes à la recherche de nouvelles rentes » ?, s’interroge l’Ordre national des infirmiers, qui, comme le Sniil et l’Inspection générale des finances (voir article ci-contre), réclame un élargissement de la vaccination par les IDE. Depuis 2008, elles sont habilitées à vacciner sans prescription contre la grippe – hors primo-injection – les patients de plus de 65 ans et les personnes atteintes d’une pathologie à risque.
Lors de la concertation, le Sniil et l’ONI ont soulevé une autre objection. La ministre proposait, en effet, de permettre à l’IDE, « sous la responsabilité d’un médecin », d’assurer des actions de prévention des comportements à risque en matière de sexualité. Rappelant que celle-ci « a déjà toute autorité pour agir seule dans ce domaine » « depuis plusieurs décennies », les deux organisations ont, semble-t-il, obtenu la suppression de cette disposition, qui ne figure pas dans le texte transmis au Conseil d’État. Le projet de loi devrait être présenté ce mois-ci en conseil des ministres, pour un examen au Parlement début 2015.
1- Renforcer la prévention et la promotion de la santé, faciliter au quotidien les parcours de santé, innover pour garantir la pérennité de notre système de santé, renforcer l’efficacité des politiques publiques et la démocratie sanitaire.
2- Voir l’article paru dans L’Infirmière Magazine n° 348.
En consacrant « le service public hospitalier » (SPH), la ministre de la Santé veut tourner la page de la loi HPST de 2009. Les « missions de service public » font place à des « garanties » : accueil de tous, permanence des soins, délai de prise en charge « raisonnable », égal accès à des soins de qualité et absence de dépassements d’honoraires. En dehors des hôpitaux publics, le SPH pourra être assuré par les établissements privés… si l’ARS donne son aval. Un « retour à un hospitalitalo-centrisme rétrograde », selon la Fédération de l’hospitalisation privée, qui s’inquiète de voir le secteur exclu des autorisations d’activités, d’équipements lourds et des financements.