Hygiène des locaux - L'Infirmière Magazine n° 351 du 15/09/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 351 du 15/09/2014

 

FORMATION CONTINUE

FICHE TECHNIQUE

SYLVIE GERVAISE  

Pour prévenir les risques infectieux, les locaux des structures où des soins sont dispensés doivent être entretenus quotidiennement, en respectant des règles d’hygiène précises, qui doivent être connues de tous.

L’entretien des locaux en milieu hospitalier répond à plusieurs principes généraux(1) :

– l’essuyage/balayage humide afin de ne pas mettre en suspension des particules (contamination de l’air puis des surfaces par redéposition) dans les secteurs à risque infectieux élevé ;

– la programmation et la coordination des tâches d’entretien des locaux et des activités de soins, en respectant les règles d’asepsie progressive (aller du plus propre vers le plus sale).

L’entretien des locaux peut être totalement ou en partie sous-traité à un prestataire. La délégation fait alors l’objet d’un cahier des charges.

Objectif

Le bionettoyage a pour objectif de réduire la contamination microbiologique des surfaces. Il comprend l’évacuation des salissures, le nettoyage (propreté macroscopique) et l’application d’un désinfectant bactéricide, fongicide ou virucide.

Matériel

• Les professionnels chargés de ces tâches doivent porter une tenue adaptée.

• Les équipements doivent être en bon état, conformes aux règles de sécurité et d’ergonomie pour le personnel.

Produits d’entretien

• Les produits d’entretien regroupent les abrasifs, les détergents, les désinfectants, les détergents-désinfectants, les détartrants, les décapants et les produits de protection des sols. Leur modes d’actions sont les suivants :

– Les abrasifs sont constitués de particules non solubles, agressives, qui récurent et agissent par frottement.

– Les savons et détergents nettoient en décollant les salissures et dégraissent. Ils sont utilisés en solution et imposent un rinçage soigneux avant la désinfection. Les détergents ne sont pas normalisés, contrairement aux désinfectants.

– Les décapants libèrent les surfaces des particules qui y adhèrent par action chimique et mécanique.

– Les produits de protection des sols agissent par dépôt sur la surface d’une pellicule protectrice.

• Les désinfectants comme les détergents-désinfectants (nettoyage et désinfection simultanés) ne nécessitent pas de rinçage.

• Un désinfectant contient au moins un principe actif doté de propriétés antimicrobiennes. Le produit doit répondre aux normes de base de bactéricidie. Il peut aussi avoir des caractéristiques répondant aux normes de virucidie, de fongicidie ou de sporicidie.

• Désinfectants :

– halogènes (produits chlorés), soit eau de Javel ou hypochlorite de sodium à la dilution de 1° à 12° chl ;

– extrait de Javel en berlingot de 250 ml dosé à 48° chl ;

– eau de Javel à 12° chl diluée au quart (250 ml d’extrait de Javel + 750 ml d’eau) ;

– eau javellisée à 1,2° chl diluée au 1/10 (500 ml d’eau Javel à 12° chl + 4,5 ml d’eau) ;

– eau de Javel à 3° chl diluée au quart (250 ml d’eau de Javel à 12° chl + 750 ml d’eau) ;

– eau de Javel à 9° chl : pour du propre apparent (surface, linge, objet), 1 verre de 200 ml dans 10 l d’eau ; pour du sale (surfaces, vaisselle), 2 verres pour 10 l d’eau ; pour du très sale (eau usée, déchets, selles), 3 verres pour 10 l d’eau ;

– eau de Javel à 6° chl diluée à 1/2 (500 ml d’eau Javel à 12° chl + 500 ml d’eau) ;

– ammoniums quaternaires ;

– phénols ;

– alcools ;

– amphotères ;

– biguanides ;

– oxydants ;

– aldéhydes.

• Les détergents-désinfectants possèdent en général un bon pouvoir désinfectant mais une faible détergence (normes Afnor) :

– les aldéhydes ne sont pratiquement plus utilisés ;

– les phénols sont utilisés par contact, trempage ou aérosols, dilués dans de l’eau (1/10), pour les cuvettes des toilettes et vidoirs ;

– les ammoniums quaternaires sont utilisés pour la désinfection des surfaces.

– les polyakylamines.

• Il faut noter le cas particulier des détergents-désinfectants agréés pour le contact alimentaire.

Mode d’utilisation

• Pour effectuer un nettoyage désinfectant (action bactéricide), il faut prévoir :

– un chariot de ménage avec 2 seaux de couleurs différentes, un pour les sols et un (ou autre récipient réservé à cet usage) pour les surfaces hautes ;

– un balai trapèze avec papiers pré-imprégnés ou un balai Faubert avec bandeaux UU ou réutilisables. Utiliser un bandeau ou une gaze ou une chiffonnette par pièce, éléments qui ne doivent en aucun cas passer de chambre en chambre ;

– des chiffonnettes de quatre couleurs à usage unique ou lavées quotidiennement : bleues pour l’environnement du patient, le lit, le mobilier ; vertes pour le lavabo et la douche, les paillasses de soins ; rouges ou roses pour les sanitaires ou vidoirs ; jaunes pour l’office alimentaire ;

– des sacs à déchets ;

– de l’eau du robinet à moins de 30°C ;

– une tenue vestimentaire adaptée avec gants de ménage, chaussures fermées et tenue spécifique ou tablier plastifié.

• Les sanitaires sont désinfectés avec l’eau de Javel à 1,2° chl (2 fois par jour).

• Les postes de soins sont nettoyés avec un détergent-désinfectant (2 fois par jour).

• Les offices alimentaires sont nettoyés avec un détergent-désinfectant à usage alimentaire (2 fois par jour).

Déroulement de l’acte

• Réaliser un lavage simple des mains avant et après les tâches d’entretien, revêtir une tenue vestimentaire adaptée et porter des gants de ménage (à usage unique ou lavés entre les chambres).

• Le bionettoyage est effectué en commençant par les locaux les moins contaminés vers les plus sales et du haut vers le bas.

• Les surfaces sont nettoyées avant la désinfection (en présence d’une contamination par liquide biologique, le désinfec­tant peut recouvrir d’emblée le liquide sans qu’il y ait eu de nettoyage au préalable, puis on réalise une procédure de nettoyage suivie d’une désinfection).

• Le nettoyage des surfaces débute par un essuyage humide pour éliminer les salissures et éviter qu’elles ne se remettent en suspension dans l’air. La lavette est repliée au fur et à mesure pour exposer une surface non usagée. Elle est remplacée aussi souvent que nécessaire pour éviter de transférer des germes contaminants et, systématiquement, entre chaque chambre ou chaque lit.

• Pour le nettoyage des sols, le balayage à sec est interdit par un arrêté du 26 juin 1974. Le balayage humide élimine 90 % des poussières en limitant leur suspension dans l’atmosphère. Il s’effectue depuis la partie la plus éloignée de la pièce en longeant le mur et en revenant vers le centre tout en déplaçant le mobilier, accompagné par un mouvement en lacet. Ne pas soulever la semelle du balai, la gaze doit rester en permanence en contact avec le sol. Au seuil de la pièce (en étant dans le couloir), dégager la gaze, la replier, recueillir les salissures à l’aide de la gaze et d’une pelle.

• Signaler que le sol est humide.

Surveillance

• Dans certains établissements, des prélèvements d’air ou de surface sont prévus dans les locaux à risques selon des protocoles validés par les équipes d’hygiénistes.

Évaluation

Les objectifs du bionettoyage sont fixés en fonction du niveau de risque des zones géographiques de l’établissement :

– zone 1, locaux à faible risque (bureaux, halls d’entrée) ;

– zone 2, maternité, services de soins de suite et de réadaptation, soins de longue durée, consultations, crèches, ascenseurs, escaliers… ;

– zone 3, soins intensifs, réanimation, chirurgie, médecine, hémodialyse, radiologie… ;

– zone 4, locaux à très haut risque (bloc opératoire), néonatalogie, service de greffes, de brûlés.

Transmission et traçabilité

La traçabilité est indispensable. Elle permet d’analyser des événements indésirables ou des situations ayant fait l’objet d’une plainte en cas d’infection nosocomiale. On doit pouvoir retrouver quel patient a fréquenté tel local à telle date, quel membre du personnel a réalisé le nettoyage ou le bionettoyage, avec quels dispositifs matériels et de traitement..

1- HAS. Hygiène des locaux.Saint-Denis-la-Plaine : HAS, 23009. www.has-sante.fr (suivre http://petitlien.fr/7f9k).

Recommandations

→ Le personnel en charge de l’entretien des locaux doit être formé aux notions d’hygiène, aux normes, procédures et textes réglementaires.

→ Les produits d’entretien ne doivent jamais être mélangés.

→ Les symboles de risques (toxique, corrosif, inflammable et dangereux) doivent être connus par les professionnels.

→ Les réserves où ces produits sont entreposés doivent être fermées à clé.

→ Ne jamais transvaser des produits d’entretien dans des contenants alimentaires.

→ Respecter les dilutions, le surdosage pouvant être dangereux et le sous-dosage inefficace.

→ Respecter les températures : éviter l’eau chaude qui favorise l’évaporation des produits volatils.

→ Respecter les temps de contact : laisser sécher un produit désinfectant sur la surface. Il ne doit pas être éliminé par rinçage.

→ Lorsqu’une pulvérisation est nécessaire, veiller à la protection des voies respiratoires, des yeux, des mains pour limiter les problèmes d’allergie.

→ Respecter les dates de péremption.