L'infirmière Magazine n° 352 du 01/10/2014

 

RESPECT DE LA VIE PRIVÉE

JURIDIQUE

ME GENEVIÈVE BELTRAN  

Le respect de la confidentialité des informations personnelles du patient est un droit reconnu à ce dernier. Le corollaire de ce principe est celui du droit à l’anonymat qui ne pourrait être limité que dans l’intérêt même du patient.

Le Code de la santé pu­bli­que prévoit que toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations le concernant (art. L. 1110-4 du CSP). Le corollaire de ce principe est celui du droit à l’anonymat pour le pa­tient. Toute personne hospitalisée a ainsi la possibilité de demander à ce que sa présence à l’hôpital reste privée et ne soit pas divulguée. De plus, divers cas juridiques peuvent se présenter dans lesquels l’identité de la personne n’est pas connue.

L’accouchement sous X

Lors d’un accouchement dans un établissement de santé (public ou privé conventionné), toute femme peut demander le secret de son admission et de son identité. Au-cu­ne pièce d’identité ne peut lui être demandée et aucune enquête ne peut être menée (article L 222-6 du Code de l’aide sociale et des fa­milles). Elle a cependant la possibilité de donner son identité sous pli fermé, et laisser des renseignements sur sa santé et celle du père, les origines de l’enfant et les circonstances de sa naissance. Ceux-ci seront alors conservés par le président du conseil général, qui pourra les transmettre au Conseil national d’accès aux origines personnelles (CNAOP) à la demande de celui-ci.

Les patients toxicomanes

En application de l’article L 3414-1 du CSP, les toxicomanes qui se présentent spontanément dans un dispensaire ou dans un établissement de santé, afin d’y suivre un traitement, peuvent, s’ils le demandent expressément, bénéficier de l’anonymat lors de leur admission. L’ali­néa 2 de cet article précise que « cet anonymat ne peut être levé que pour des causes autres que la répression de l’usage illicite de stupéfiants ».

Le don d’organes

Selon les lois « bioéthique » de 1994 révisées en 2004, le don d’organes est anonyme. Cela signifie que le nom du donneur ne peut être communiqué au receveur, et celui du receveur à la famille du donneur. La famille du donneur peut seulement être informée des organes et des tissus prélevés, ainsi que du résultat des greffes. Cette règle de l’anonymat ne s’applique bien évidemment pas au prélèvement d’organes sur une personne vivante en vue d’un don à son entourage proche. S’agissant du don du sang, l’article L 1221-7 du CSP indique que « le receveur ne peut connaître l’identité du donneur, ni le donneur celle du receveur. Il ne peut être dérogé à ce principe d’anonymat qu’en cas de nécessité thérapeutique ». Dans un avis(1), le Conseil d’État a rappelé que la transfusion sanguine « s’effectue dans l’intérêt du receveur et relève des principes éthiques du bénévolat, de l’anonymat des dons et de l’absence de profit ».

Quant au don de gamètes, là aussi, le couple receveur et le donneur ne connaissent pas leurs identités. Rappelons qu’en cas de décès d’un patient, son anonymat ne peut persister : l’hôpital a donc l’obligation d’informer les autorités de police de ce décès.

Les centres de dépistage

L’anonymat est aussi l’un des principes qui régissent les activités des consultations de dépistage anonyme et gratuit (CDAG) pour le VIH et celles des Centres d’information, de dépistage et de diagnostic des infections sexuellement transmissibles (CIDDIST). Il con­siste pour la personne qui consulte à ne pas avoir à révéler son identité et, pour la structure et son personnel médical et paramédical, à ne pas l’exiger. Ce principe a pour but de faciliter la démarche de dépistage volontaire et les de­mandes d’information concernant le VIH et les IST, et d’éviter la stigmatisation des personnes concernées. Le médecin peut lever l’anonymat lorsque l’intérêt de la personne testée l’exige, à la condition de recueillir son consentement exprès, libre et éclairé (arrêté du 8 juillet 2010).

1- CE, Avis 5/7 SSR 27/10/2000.

À SAVOIR

L’article L 2311-5 du CSP impose l’anonymat dans tous les cas de dépistage ou de traitement de maladies transmises par voie sexuelle.

Pour les autres types de consultations, informations ou prescriptions ainsi que pour la délivrance à titre gratuit de médicaments ou de produits contraceptifs, la loi n’apporte aucune précision mais les patients peuvent expressément en faire la demande.

LES TEXTES DE RÉFÉRENCE

→ Art. L. 1110-4 du CSP

→ Art. L 1221-7 du CSP

→ Art. L 2311-5 du CSP

→ Art. L 3414-1 du CSP

→ Art. L 3121-2 et L 3121-2-1 du CSP

→ Art. L 222-6 du Code de l’aide sociale et des familles

→ Lois de bioéthique 94-548 du 1er juillet 1994

→ Lois de bioéthique 94-653 du 29 juillet 1994

→ Lois de bioéthique 94-654 du 29 juillet 1994

→ Arrêté du 8 juillet 2010 fixant les conditions de la levée de l’anonymat dans les consultations de dépistage anonyme et gratuit et dans les Centres d’information, de dépistage et de diagnostic des infections sexuellement transmissibles

→ La charte du patient hospitalisé