L'infirmière Magazine n° 352 du 01/10/2014

 

E-SANTÉ

ACTUALITÉ

DU CÔTÉ DES… COLLOQUES

VALÉRIE HEDEF-CAPELLE  

La télémédecine influence l’exercice des professions de santé sous bien des aspects. L’université d’été de la e-santé, à Castres cet été, a interrogé la place des infirmières dans ce champ de la santé, dont le déploiement reste limité.

En matière d’objets connectés, la France innove. En témoigne, par exemple, la semelle co-développée par le Gérontopôle du CHU de Toulouse et le Laboratoire d’analyse et d’architecture des systèmes (LAAS-CNRS) afin de détecter les premiers signes de la dépendance. Une innovation parmi d’autres, dévoilée lors de ce rendez-vous castrais annuel de la e-santé, qui a rassemblé près de 600 participants.

Prédominance hospitalière

Dans le domaine de la télémédecine aussi les initiatives se multiplient, de-ci de-là, sur le territoire national. Près de 331 dispositifs de télémédecine étaient recensés fin 2012, essentiellement pour des actes de téléconsultation et de télé-expertise ; 169 sont opérationnels.

Si la prédominance du secteur hospitalier subsiste, 30 % des projets impliquent désormais le secteur ambulatoire et près de la moitié font l’objet d’une contractualisation avec l’ARS et d’un conventionnement entre les acteurs. C’est le cas de la téléconsultation bucco-dentaire qui a été développée au CHRU de Montpellier (voir ci-dessous) et qui est actuellement expérimentée auprès de 800 patients ayant des difficultés d’accès à un chirurgien-dentiste : principalement des résidents d’Ehpad, des personnes handicapées résidant en maison d’accueil spécialisée et des détenus. Avec cette nouvelle pratique médicale à distance, les infirmières vont devoir « se former véritablement au numérique pour être compétentes et accepter, aussi, la nouvelle expertise des malades 3.0 », ainsi que l’a souligné Martine Baurin, infirmière responsable de la formation des infirmiers pour la Croix-Rouge française, lors de la table ronde intitulée « Loeliginfirmière au cœur de la télémédecine ».

La fin du face-à-face ?

Leur relation avec le patient sera bousculée, notamment pour celles exerçant sur les plates-formes de téléconseils, qui devront alors « faire le deuil du face-à-face avec le patient », a averti Lydie Canipel, la secrétaire générale de l’Association nationale de télémédecine (1). De plus, avec sa dimension intrinsèque de travail collectif et collaboratif, la télémédecine va inévitablement faire évoluer le binôme médecin/ infirmière, renforçant, selon Lydie Canipel, « le rôle d’expert du médecin » tout en élevant « tout le monde en efficience ».

Passer d’une logique d’expérimentation à une réelle logique de déploiement, tel est aujourd’hui l’enjeu de la e-santé hexagonale, qu’il s’agisse des objets connectés ou des actes de télémédecine. Dans cette révolution en cours, les infirmières sont appelées à jouer un rôle de coordination de tout premier plan.

1- À noter le 7e congrès européen de la SFT-Antel : Formez-vous à la télémédecine, Paris Eurosites Georges V, 21-22 novembre 2014. Renseignements : http://www.congres-antel.com ; contact@antel.fr.

TÉLÉMÉDECINE

Le projet « e-dent » récompensé

Permettre le diagnostic à distance grâce à une caméra qui utilise la lumière fluorescente pour détecter les dégradations dentaires de manière très précoce, c’est l’objectif du projet « e-dent », qui s’est vu décerner le trophée Télémédecine 2014 lors de l’université d’été. L’infirmière joue un rôle primordial dans cette téléconsultation, réalisée dans une salle de soins dédiée ou au chevet des patients selon leur état de santé. « C’est elle qui va être formée à l’enregistrement des vidéos nécessaires pour le diagnostic par le chirurgien-dentiste », a expliqué le Dr Nicolas Giraudeau, coordonnateur du projet. « Près de 150 patients du CH d’Uzès ont déjà été vus dans le cadre de cette téléconsultation. Une infirmière a d’ailleurs été presque exclusivement recrutée pour cela dans cet établissement, très actif sur le projet », a précisé le Dr Giraudeau. Les infirmières ont toutes reçu une formation préalable à l’utilisation de la caméra et au vocabulaire spécifique à l’odontologie. À noter : l’aide financière apportée par l’ARS Languedoc-Roussillon (110 000 euros) permet de les rémunérer pour leur temps passé à réaliser cet acte ou à faire de l’éducation thérapeutique de l’hygiène bucco-dentaire, soit une demi-heure par patient.