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QUESTIONS SUR
« Personne de confiance », « directives anticipées », « obstination déraisonnable »… Le point sur les notions-clés définies par les textes, notamment la loi Leonetti.
La loi Leonetti relative à la fin de vie (2005) précise les notions de « personne de confiance » et de « directives anticipées », développe celle de « décision collégiale » et réaffirme la transparence des décisions dans le cas de fin de vie. Elle renforce les droits du patient, en particulier lorsqu’il n’est plus en mesure de s’exprimer. Elle introduit l’interdiction de toute « obstination déraisonnable ».
La notion de personne de confiance a été introduite dans la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, qui dit que « toute personne majeure peut désigner une personne de confiance qui peut être un parent, un proche ou le médecin traitant, et qui sera consultée au cas où elle-même serait hors d’état d’exprimer sa volonté et de recevoir les informations nécessaires à cette fin. […] Si le malade le souhaite, la personne de confiance l’accompagne dans ses démarches et assiste aux entretiens médicaux afin de l’aider dans ses décisions. Lors de toute hospitalisation dans un établissement de santé, il est proposé au malade de désigner une personne de confiance. […] Cette désignation est valable pour la durée de l’hospitalisation, à moins que le malade n’en dispose autrement ». Elle est donc désignée par le patient, sollicitée lorsqu’il n’est plus en mesure de s’exprimer, mais aussi pour des décisions médicales sur lesquelles le malade en état d’exprimer ses choix s’interroge.
En 2005, parce que cette notion est passée inaperçue jusqu’alors, la loi Leonetti précise que la personne de confiance est informée « si le médecin constate qu’il ne peut soulager la souffrance d’une personne, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qu’en lui appliquant un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d’abréger sa vie ».
La loi indique que « lorsque le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté, le médecin ne peut décider de limiter ou d’arrêter les traitements dispensés sans avoir préalablement mis en œuvre une procédure collégiale. La décision prend en compte les souhaits que le patient aurait antérieurement exprimés, en particulier dans des directives anticipées, s’il en a rédigé, l’avis de la personne de confiance qu’il aurait désignée ainsi que celui de la famille ou, à défaut, celui d’un de ses proches ». « Lorsqu’une personne en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable ne peut s’exprimer, l’avis de la personne de confiance, sauf urgence ou impossibilité, prévaut sur tout autre avis non médical, à l’exclusion des directives anticipées, dans les décisions d’investigation, d’intervention ou de traitement prises par le médecin », précise l’article L. 1111-12.
Malgré plus de dix ans d’existence, ces notions sont mal connues du personnel hospitalier comme des patients et de leur entourage. La personne de confiance est confondue avec la « personne à prévenir ». La question est souvent abordée lors de l’admission, alors qu’il est souhaitable qu’elle le soit lors d’un entretien individuel avec une infirmière maîtrisant le sujet. Celle-ci doit pouvoir donner au patient toutes les informations nécessaires pour qu’il prenne sa décision, répondre à ses questions sans ambiguïté et lui laisser le temps de la réflexion. La nomination d’une personne de confiance n’est pas obligatoire. Elle est valide pour le temps d’une hospitalisation et peut être remise en question par le patient à tout moment. Les soignants ont aussi une mission pédagogique auprès de la personne de confiance, compte tenu de la charge psychologique de cette responsabilité.
En 2002, l’article L. 1111-4 de la loi relative aux droits des malades énonçait qu’« aucun acte médical ou aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment ». Il s’agit alors d’une progression importante des droits du malade. En 2005, la loi précise la place des souhaits du patient, exprimés à travers des « directives anticipées », dans la prise de décision médicale. Ces directives permettent de connaître les souhaits du malade concernant l’arrêt ou la limitation des traitements en fin de vie. Il y est dit que « toute personne majeure peut, si elle le souhaite, faire une déclaration écrite, appelée “directives anticipées”, afin de préciser ses souhaits quant à sa fin de vie, prévoyant ainsi l’hypothèse où elle ne serait pas, à ce moment-là, en capacité d’exprimer sa volonté ».
Ces directives doivent être écrites par la personne, datées et signées, comporter ses noms, prénoms, date et lieu de naissance. Lorsqu’elle ne peut pas rédiger ce document, elle peut faire appel à deux témoins, dont la personne de confiance, si elle en désigne une. Ils attestent que le document « exprime la volonté libre et éclairée » de la personne. Leurs noms, qualités et attestations sont joints aux directives anticipées. Celles-ci sont de préférence communiquées au médecin traitant et insérées dans le dossier médical en cas d’hospitalisation. Elles peuvent être détenues par la personne de confiance lorsqu’elle est nommée. Leur durée de validité est de trois ans, elles peuvent à tout moment être modifiées ou supprimées. Elles n’ont toutefois pas de valeur contraignante pour le médecin, qui reste libre de sa décision.
L’obstination déraisonnable regroupe « les actes qui paraissent “inutiles”, “disproportionnés” ou n’ayant d’autre effet que “le maintien artificiel de la vie”, entraînant une altération de la qualité de vie associée à un pronostic très péjoratif ».
Soit le patient est apte à décider de limiter ou d’arrêter tout traitement, soit il ne l’est pas. Dans ce second cas, il peut avoir écrit des directives anticipées, nommé une personne de confiance, fait les deux ou n’avoir rien fait. Quoi qu’il en soit, le passage d’un traitement curatif à un traitement palliatif, voire une limitation des traitements en phase palliative ou une modification des traitements antalgiques risquant d’entraîner la mort (le « double effet ») doivent faire l’objet d’une discussion au sein des équipes, appelée décision collégiale. Les directives anticipées et l’avis de la personne de confiance sont alors pris en considération.
Une décision collégiale est prise lorsque la situation du patient implique un arrêt ou une diminution des traitements curatifs (passage en soins palliatifs par exemple) ou palliatifs. La situation est exposée aux représentants des catégories professionnelles.
Dans un premier temps, les directives anticipées, la personne de confiance ou les parents, pour un patient mineur, sont consultés. Ces avis prévalent sur tous les autres avis non-médicaux. Les discussions doivent se dérouler dans le souci de la dignité du mourant et de sa qualité de vie. Elles nécessitent parfois l’avis de professionnels extérieurs à l’équipe et peuvent aboutir à un report temporaire. La décision finale appartient au médecin, après une concertation avec l’ensemble de l’équipe (médicale, paramédicale, psychosociale). Elle fait l’objet d’une argumentation, surtout si elle n’est pas conforme aux souhaits du patient.
En conclusion, la loi relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, puis la loi Leonetti, ont modifié la relation entre malade et médecin, introduisant le droit pour le patient de choisir de limiter ou d’arrêter ses traitements et d’être assisté dans ses décisions. Le médecin a le devoir d’écouter l’avis du patient, de son entourage et de l’ensemble de l’équipe. Sa décision ainsi que la réflexion menée sont inscrites dans le dossier du patient. Tout ceci modifie profondément le fonctionnement des équipes de soin. L’application de ces mesures se fait plus ou moins rapidement selon les lieux. Il faudra encore un peu de temps pour qu’elles soient parfaitement intégrées sur tout le territoire.