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L’ESSENTIEL
R., 23 ans, a été victime d’un accident de moto. Les médecins sont pessimistes quant à ses lésions cérébrales. Les parents de R. ont été prévenus et ont informé son amie. R. est transféré en service de réanimation. Très rapidement, les médecins informent les parents que R. est en état de mort cérébrale et qu’il pourrait être donneur d’organes. La mère et l’amie de R. refusent d’admettre son état et supplient les médecins d’entreprendre tous les soins possibles, quand le père souhaite un arrêt de la réanimation. Il est prêt à accepter le don d’organes. L’amie de R. n’imagine pas qu’une partie de lui puisse vivre dans le corps d’un autre.
Lorsqu’un patient est en état de mort encéphalique, les équipes de réanimation et les professionnels de santé spécialisés dans la rencontre des familles et les discussions autour du don d’organes sont souvent confrontés à ce genre de situation. Ce travail est encadré en France par la loi de bioéthique de 1994, modifiée en 2004 et 2011.
Dans le cas de R., la loi reconnaît que les proches (et pas seulement la famille) doivent être informés. Ils sont les interlocuteurs de l’équipe responsable du don d’organes. Par ailleurs, dans son article L. 1232-1, la loi précise que « le prélèvement peut être pratiqué dès lors que la personne n’a pas fait connaître, de son vivant, son refus [qui] peut être exprimé par tout moyen, notamment par l’inscription sur un registre national automatisé prévu à cet effet. Il est révocable à tout moment ». Les proches sont donc consultés pour identifier un éventuel refus de la part du donneur potentiel. L’Agence de biomédecine les définit comme « l’ensemble des personnes vivant dans la proximité du défunt ». Il faut y ajouter la personne de confiance, dont l’avis est prioritaire.
Comme le souligne Daniel Maroudy
La notion de mort encéphalique est complexe à comprendre et difficile à admettre. Comme dans le cas de R., les proches ne sont pas toujours tous dans les mêmes dispositions concernant le don d’organes. Si la question n’a jamais été discutée avant l’accident, cette demande peut être douloureuse, ce qui risque d’engendrer un refus. Daniel Maroudy considère qu’il existe en général parmi les proches un « allié » des soignants. Cette personne « est susceptible d’orienter des membres de la famille incertains ou frileux en faveur du don ». La parole de la mère est souvent déterminante.
Il faut bien préparer l’entretien avec les proches afin qu’il se déroule dans les meilleures conditions. Si elle a établi de bonnes relations avec la famille, l’infirmière qui assure les soins au donneur potentiel peut être présente lors de l’échange.
Au cours de cette étape délicate, les professionnels doivent adapter leur façon de communiquer, favoriser l’établissement d’une relation de confiance, rester maîtres de leurs émotions et être en mesure d’accepter celles des proches. Pour Daniel Maroudy, « une attitude soignante apaisante, posée et généreuse, contribue presque toujours à atténuer l’angoisse et l’agressivité des familles ».
Pendant ce temps, le donneur doit bénéficier de soins de qualité et ne pas être considéré comme « un patient de seconde zone ». De son état dépend la qualité du don d’organes, qui n’est pas quelque chose de naturel. Sa réussite dépend en grande partie de la qualité du travail et de la préparation des professionnels.
1 - Voir encadré En savoir plus, p. 59.