On peut en rire ou trouver cela de mauvais goût. Les enterrements sont des moments-clés de la vie où chacun, malgré lui, se révèle. « Vous pourriez faire la version courte ? Parce qu’on a rendez-vous chez le notaire, pour la succession, juste après », assène une famille. Ou encore : « Je crois que vous faites erreur. Là, c’est maman, elle dort. Le défunt c’est papa, il est dans la pièce d’à côté », s’excuse presque le fils d’un défunt. Ce sont des perles tragicomiques que restitue Guillaume Bailly, Brestois de 38 ans, dans son recueil d’anecdotes collectées au gré de plus de dix années dans les pompes funèbres. « Nous, les croque-morts, nous sommes un peu le service après-vente de la médecine », s’amuse-t-il. Pour lui, les derniers adieux sont le théâtre de situations inattendues, de dialogues décalés, de comportements à la fois déconcertants et humains. « Depuis, quand je regarde un vaudeville, j’éprouve la sensation familière du déjà vécu », écrit-il. Au fil des pages, on pioche des histoires touchantes ou qui laissent pantois. Incidents en pleine cérémonie, lapsus macabres, gaffes en tout genre, on se pince pour y croire. Pourtant, les enterrements constituent un observatoire parfait de la société. En première ligne, les croque-morts, témoins de l’intimité des familles. Les familles ? Des radins, des enfants ingrats, un chien inconsolable, des alcooliques, des punks… Qui sont dans le déni, la vengeance, la cupidité, le désintérêt. Heureusement, il y a aussi de l’humour : « – Et les bières, qu’est-ce qu’on en fait ? – Mets-les au frigo. Ce n’est pas ce qui manque ici. »
Mes sincères condoléances, Guillaume Bailly, Les éditions de l’Opportun, 9,90 €.