L'infirmière Magazine n° 359 du 01/04/2015

 

PARCOURS DE SOIN

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SANDRA MIGNOT  

Nouveau concept d’organisation du soin, le Service territorial de santé est inclus dans la prochaine loi de santé. Fondé sur un diagnostic partagé, il obligera les acteurs locaux à coopérer.

La création du Service territorial de santé (STS) au public est une formidable opportunité en termes de convergence des outils, des stratégies et des objectifs de santé publique. » Bernadette Devictor, la présidente de la Conférence nationale de santé (CNS) s’est montrée fort enthousiaste en présentant cette vision contenue dans la prochaine loi de santé, lors des Régionales de la santé organisées à Paris le 9 mars. Le conditionnel demeure pourtant de mise, alors que le texte n’est pas encore passé sous les fourches caudines du Parlement et qu’il fait l’objet de très nombreuses critiques de la part des médecins, notamment. Dans son communiqué du 11 mars, le ministère annonçait vouloir rebaptiser le STS en communauté professionnelle territoriale de santé.

Difficile donc de savoir ce qui subsistera du texte, mais souhaitons que l’esprit d’initiative et de service au public recouvert par la première mouture ne soit pas gâché. « Il s’agit de définir une offre de service coordonnée, basée sur les besoins d’une population dont les contours restent à définir par les acteurs locaux », résume Bernadette Devictor. Le territoire de santé ne se fondera pas sur les limites d’un département ou d’une circonscription administrative, mais s’organisera en fonction d’un diagnostic local, sur un espace établi en fonction de l’accessibilité et de la disponibilité des dispositifs, ainsi que de la continuité des soins.

« Au préalable, il faudra répertorier les ressources disponibles, améliorer la connaissance des référentiels d’intervention de l’ensemble des acteurs sanitaires et médico-sociaux », poursuit Bernadette Devictor, également vice-présidente de CISS Rhône-Alpes, un collectif d’usagers.

Une nouvelle instance

Enfin et surtout, même si les ARS conserveront leur rôle d’animateur, la construction du projet territorial devrait découler d’un diagnostic partagé entre les acteurs de santé et d’une validation par une nouvelle instance, le Conseil territorial de santé, réunissant institutions, financeurs, acteurs, élus et citoyens. « Il s’agit que chacun des acteurs de santé s’engage dans une responsabilité collective à l’égard d’une population, estime Bernadette Devictor, même si une large marge de manœuvre sera laissée aux acteurs locaux. Ceux-ci devront apprendre à construire une culture commune et à élaborer les outils qui seront utiles à leur population pour travailler en coopération, au lieu de demeurer dans un exercice individualisé et concurrentiel. »

Partage d’information

Plutôt qu’un diagnostic, jugé « lourd et épuisant pour les acteurs », Michel Varroud-Vial, chef du service maladies chroniques et dispositifs d’accompagnement des malades à la Haute autorité de santé, plaide pour une concertation entre usagers et professionnels, sous le pilotage de l’ARS. « Mais la concertation ne relève pas du spontané, a-t-il souligné. Dans ce domaine, la HAS élabore différents outils qui aident à la mettre en œuvre, comme la check-list d’aide à l’identification des priorités au sein des Paerpa, celles concernant les maladies chroniques ou les sorties d’hospitalisation, toutes deux étant en cours de finalisation. »

Autres outils à même de soutenir l’élaboration des STS, les systèmes informatiques « même s’ils ne font que consolider le travail en équipe et non pas l’initier, » a insisté Michel Varroud-Vial. Ils permettront le partage des informations, la gestion des données cliniques et l’analyse des pratiques, attendus de longue date.

Meilleure prise en charge

Les usagers, enfin, devront être associés à l’élaboration du projet, de l’étape du diagnostic à la proposition finale (même si, là encore, la nouvelle terminologie de « communauté de professionnels » instille à présent le doute). « Il s’agit de les écouter et de les informer, mais pas seulement, a poursuivit Michel Varroud-Vial. Car ils sont également des partenaires, par exemple dans l’éducation thérapeutique. »

Le projet élaboré ferait ensuite l’objet d’un contrat entre le territoire de santé défini et l’ARS. Puis un observatoire des parcours de santé permettrait de mettre en évidence les pratiques les plus vertueuses parmi l’ensemble des territoires qui auront émergé. Avec, en perspective, une meilleure prise en charge des pathologies chroniques, une diminution des inégalités d’accès aux soins et un maintien du financement par la solidarité… Un beau programme, tributaire des choix qui seront prochainement opérés par le législateur.

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