L'infirmière Magazine n° 360 du 01/05/2015

 

CANCER COLORECTAL

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AVELINE MARQUES  

Faute de test disponible, le dépistage du 3e cancer le plus fréquent en France est à l’arrêt depuis le 31 janvier. Un contretemps qui ne sera pas sans conséquence, quand on sait que, pris au stade précoce, ce cancer se soigne dans 9 cas sur 10.

Avec 17 500 décès en 2012, c’est le 2e cancer le plus meurtrier en France. Pourtant, le cancer colorectal n’est plus dépisté depuis quatre mois. Le nouveau test immunologique se fait attendre. Or, sur instruction de la Direction générale de la santé, le test au gaïac (Hemoccult) n’est plus utilisé depuis le 1er janvier 2015. Pire, des milliers d’échantillons de selles envoyés après le 31 janvier ont été détruits. « Un gâchis regrettable, qui aura un impact indéniable », dénonce le Dr Bruno Richard-Molard, président sortant de la Société française d’endoscopie digestive.

Moins performant que le test immunologique, recommandé par la HAS dès décembre 2008, le test au gaïac a tout de même permis de détecter 27 500 cancers et 72 500 adénomes avancés entre 2009 et 2014. En prévision d’une mise sur le marché du test immunologique au 1er janvier 2015, un arrêt progressif de la remise des tests au gaïac à la population cible(1) a été décidé fin 2014. Mais l’appel d’offres pour le nouveau test, lancé par la Cnamts(2), a fait l’objet d’un recours suspensif, retardant sa mise sur le marché.

Plus simple et performant

Le test immunologique peut être commandé par les généralistes depuis le 14 avril seulement. Il sera « proposé aux 18 millions de personnes concernées par le programme de dépistage » ce mois-ci, précise la Cnamts. Et les personnes ayant réalisé un test au gaïac non lu le recevront directement chez elles. « Entre le moment où l’usager reçoit le test et le moment où il le fait, il se passe trois mois. Il y aura une incidence sur les cancers de l’intervalle, déplore Jean-Louis Bertou, président de l’association France Côlon. Plus on les prend en charge tôt, moins les conséquences sont terribles. » Le taux de participation au programme national de dépistage est en baisse constante : de 34 % en 2010 à 29,8 % en 2014. Le test au Gaïac est pointé du doigt. Imposant six prélèvements de selles, répartis sur trois jours, « il n’était pas pratique et très répulsif », relève Jean-Louis Bertou. « Il y a une absence de motivation des généralistes, qui n’étaient pas convaincus par sa performance », note le Dr Richard-Molard. L’arrivée du test immunologique devrait lever ces obstacles : il ne nécessite qu’un seul prélèvement de selles et détecte plus finement les traces de sang humain. Le bénéfice attendu : une participation en hausse de 10 à 15 points, 2 fois plus de cancers et 2,5 fois plus d’adénomes avancés détectés. Il était temps.

1- Les 50-74 ans dont le risque est jugé « moyen » : pas d’antécédents personnels, de prédispositions héréditaires ou de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin.

2- Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés.

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