SUS À LA DÉTERSION ! - L'Infirmière Magazine n° 365 du 01/11/2015 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 365 du 01/11/2015

 

ANTISEPSIE

ACTUALITÉS

COLLOQUES

AVELINE MARQUES  

Une étude présentée au congrès de la Société française d’anesthésie et de réanimation (Sfar), mi-septembre à Paris, remet en cause l’intérêt de l’antisepsie en quatre temps.

Nettoyer la peau avec un détergent antiseptique, la rincer à l’eau stérile, la sécher avec des compresses stériles puis appliquer un antiseptique. Cette procédure, recommandée depuis 2003(1) par la Société française d’hygiène hospitalière (SF2H), est répétée avant chaque pose de cathéter. Quatre gestes, chronophages pour les infirmières, qui n’auraient en fait aucun intérêt. C’est ce que démontre l’étude Clean, publiée dans The Lancet et présentée au congrès de la Sfar, à laquelle 11 unités de réanimation françaises ont participé entre octobre 2012 et février 2014. Incluant 2 349 patients adultes nécessitant la pose d’un cathéter artériel, veineux central ou d’épuration extra-rénale, Clean avait pour objectif de comparer l’efficacité de quatre stratégies d’antiseptie cutanée dans la lutte contre les infections associées aux cathéters, qui proviennent dans 60 % des cas de la contamination de la flore cutanée : utilisation de chlorhexidine alcoolique à 2 % (CHG-OH) ou de la povidone iodée alcoolique à 5 % (PVI-OH), avec ou sans détersion.

Attente des soignants

Les résultats sont sans appel : la CHG-OH réduit de 79 % le risque de contracter une infection bactériémique liée au cathéter (ILC) ; l’incidence est de 0,28 ILC pour 1 000 jours-cathéter pour la CHG-OH, contre 1,32 avec la PVI-OH. Le surcoût lié à l’usage de la CHG-OH, évalué à 227 euros par infection évitée, n’est rien comparé à celui du traitement d’une ILC : 19 583 euros.

Les procédures d’antisepsie en un temps et en quatre temps ont obtenu des résultats comparables, démontrant l’absence de bénéfice supplémentaire de la réalisation d’une détersion. « La France est le seul pays qui recommande encore la détersion, souligne le Pr Olivier Mimoz, chef de service de réanimation chirurgicale polyvalente du CHU de Poitiers et auteur de l’étude. Des recommandations contraires, basées sur l’étude Clean, devraient être publiées en 2016 par la SF2H. L’attente des soignants est forte : cette procédure est contraignante et consomme beaucoup de produits. » La France s’alignerait ainsi sur les États-Unis et la Grande-Bretagne, qui ont opté pour la CHG-OH sans détersion préalable. Prochaine étape : évaluer l’intérêt de cette stratégie en milieu opératoire, dans la préparation de la pose de cathéters périphériques ou de péridurales.

1- En 2013, la SF2H a adopté une position moins tranchée qu’en 2003, ne se prononçant pas sur la détersion d’une peau non souillée en préopératoire, mais maintenant sa recommandation pour une peau souillée. La société savante laisse le choix de l’antiseptique à utiliser.

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