Fait d’allers et retours entre le milieu hospitalier et son foyer, le parcours de soin d’un enfant atteint d’un neuroblastome est complexe et nécessite une bonne coordination des équipes impliquées dans sa prise en charge. Une coordination assurée en Île-de-France par le Rifhop.
En Île-de-France, la prise en charge des enfants atteints par un neuroblastome se fait dans les services spécialisés des trois hôpitaux référents pour cette maladie (Institut Curie, Institut Gustave Roussy et Trousseau). Mais pas seulement. Des établissements de proximité et des services de soins de suite, agréés par l’ARS, proposent le suivi complémentaire au plus près du domicile dans leurs services de pédiatrie générale, avec un personnel médical et paramédical formé. Ces établissements fonctionnent de façon autonome, selon des recommandations consensuelles du réseau, en lien avec les centres référents. Au domicile, ce sont soit des professionnels de l’HAD, soit des infirmiers libéraux qui interviennent. Que ce soit à l’hôpital ou en ville, de très nombreux professionnels se relaient tout au long du parcours de soin de l’enfant.
Pour coordonner et harmoniser les soins, depuis 2008, tous les patients âgés de 0 à 18 ans, résidant ou ayant une adresse en Île-de-France – et jusqu’à 20 km au-delà – à qui l’on a diagnostiqué un cancer sont pris en charge au sein du Réseau Île-de-France d’hématologie oncologie pédiatrique (Rifhop)
Quatre coordinatrices, responsables chacune d’une zone de la région sont en lien, chaque semaine, avec l’un des hôpitaux référents. Dès la première hospitalisation de l’enfant, la coordinatrice concernée « entre dans la boucle » avec le médecin référent et les infirmières des parcours patients. « La prise en charge du neuroblastome s’intègre pour environ 9 % dans celle des 500 cas annuels de cancers de l’enfant en Île-de-France. Tous les nouveaux patients nous sont signalés. Très tôt, comme nous connaissons bien nos secteurs, nous sommes capable d’annoncer quel hôpital de proximité va être en capacité d’accueillir l’enfant, lequel sera le plus accessible. » La coordinatrice a déjà aussi, d’expérience, une vision des besoins qui vont se présenter à la sortie de l’enfant et des moyens qui devront être mis en place. « Dès la première hospitalisation, il y a une vraie réflexion à la fois médicale et sur la prise en charge, autour du futur de cet enfant, de l’organisation de la famille. Nous discutons très tôt de ce qui va être important pour le retour à la maison. Éventuellement, nous pensons à des infirmières libérales déjà formées, en priorité. Capables, par exemple, de s’occuper de petits enfants. » Chaque situation est évaluée au cas par cas. Certains parents seront en capacité de se voir déléguer un certain nombre de soins (prise des médicaments, prise de la température, observation de la peau…), alors que d’autres seront plus inquiets. « Dans ces cas, si on sent les parents un peu fragiles, on va opter pour une hospitalisation à domicile. »
Les intervenantes du réseau veillent, à tout moment, à être au plus près des familles, en cas de besoin. « Nous vérifions que tous les moyens qui devaient être mis en place l’on bien été. Il faut aussi s’assurer que les familles ont bien tout compris. C’est essentiel pour le bon déroulé des soins. » Dans les quelques jours qui suivent la première sortie d’hôpital, les coordinatrices proposent systématiquement aux parents de les rencontrer. « Avec les familles, nous évaluons ce que l’enfant et les parents ont retenu de la maladie, du protocole, de ce qu’il va falloir surveiller. Si nécessaire, nous n’hésitons pas à réexpliquer et on finalise les choses. Si ça nous semble important, on va appeler l’hôpital. Nous nous devons d’être très réactifs. »
Dans le cas du neuroblastome, les points à surveiller sont essentiellement la réapparition des symptômes, la douleur, la perte d’appétit et l’arrêt du jeu. Le Rifhop remet aux parents un classeur de liaison qui va être rempli par tous les intervenants. Il assure également le lien entre tous les professionnels de santé, hospitaliers comme libéraux. « Nous sommes en relation constante avec les centres spécialisés qui nous donnent les informations importantes concernant les patients dont nous avons la charge, et que nous transmettons aux soignants qui prennent le relais en ville », poursuit Laurence Benard. La coordinatrice fait le point avec les infirmières libérales en leur donnant tous les détails nécessaires sur la pathologie. « Concrètement, nous leur rappelons ce qu’il faut surveiller en particulier. Nous leur proposons même, si elles le souhaitent, lorsqu’il s’agit de petits enfants, de les accompagner au premier soin au domicile. Pas pour voir comment travaille l’infirmière, mais pour rassurer les parents. » Le Rifhop est un soutien d’expertise pour des soins sur voie veineuse centrale. Il est là aussi pour faire le lien avec les centres de proximité. « Chaque coordonnatrice rencontre ceux de son secteur tous les mois », précise Laurence Benard.
« On sait mieux soigner les neuroblastomes qu’avant, mais ce n’est pas la seule chose importante dans la prise en charge : nous nous préoccupons aussi de ce qui va se passer après », insiste la coordinatrice. Et quoi de plus important, pour un enfant, malade ou non, qu’une scolarité harmonieuse ? Le Rifhop travaille (et c’est une spécificité de la région Île-de-France) en collaboration avec les directeurs d’établissements scolaires pour minimiser l’impact de la maladie cancéreuse sur la scolarité. De la maternelle jusqu’au baccalauréat, le réseau a obtenu des agréments avec les trois académies franciliennes. Car les conséquences de la maladie sur la vie scolaire sont inévitables. « Selon le traitement que reçoit l’enfant et son taux de globules blancs, ce dernier pourra ou non aller à l’école. Il y a des moments où il se sentira trop mal pour s’y rendre. Mais l’important pour nous, c’est qu’il ne subisse pas une double-peine. Qu’il garde un lien avec l’école. »
Si les parents le souhaitent, les coordinatrices régionales organisent des réunions pour réfléchir au projet de l’enfant avec les directeurs, instituteurs, professeurs, CPE, infirmières et médecins scolaires, référents MDPH… « Le but est de réfléchir ensemble aux solutions possibles : comment faire venir des professeurs à la maison, par exemple, pour ne pas mettre l’enfant en situation d’échec ? » En particulier, elles travaillent sur le retour à l’école, qui est toujours un moment délicat, qui expose l’enfant, fragile, au regard de ses camarades. « Souvent, l’enfant a une voie centrale, pas de cheveux. Il peut avoir beaucoup maigri ou grossi, avoir une sonde dans le nez… Quand il retourne à l’école, cela peut être troublant pour tout le monde. Nous faisons le point avec les parents, nous réfléchissons aux informations à communiquer à l’école. Les parents et l’élève peuvent lever le secret médical et nous complétons alors. » Laurence Benard et ses collègues proposent aussi, selon les situations, de se rendre dans les classes pour répondre aux questions. « Cela permet de prendre un temps d’échange. Et bien souvent de tordre le coup à un certaines idées reçues auprès des autres enfants et d’accompagner au mieux le retour. » Laurence Benard est résolument positive : « Nous avons tellement fait de progrès, pas seulement d’un point de vue technique et médical, mais aussi dans l’accompagnement des familles. Au départ, elles étaient complètement laissées isolées et elles se débrouillaient comme elles le pouvaient. Nous n’avions pas les clés, les structures pour nous occuper d’elles… Maintenant, on sait comment orienter les parents, comment les aider concrètement. »
1- www.rifhop.net, voir aussi Savoir + p. 61.
En 2014, le Rifhop c’est :
→ 572 familles incluses dans le réseau (vs 492 en 2013) ;
→ 384 visites à domicile (vs 335) par les coordinatrices pour 244 enfants le nécessitant ;
→ une aide au retour à la scolarité pour 52 enfants.