FONCTION PUBLIQUE HOSPITALIÈRE
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Six ans après le très controversé « protocole Bachelot », alors que les différences salariales se creusent, la fédération santé de Force ouvrière réclame l’instauration d’un droit de remords pour les IDE de catégorie B qui souhaiteraient passer en catégorie A.
Quelques mois après la fin du droit d’option, nous avons reçu des demandes d’IDE qui souhaitaient revenir sur leur choix. Ce sont surtout de jeunes soignantes qui ont eu du mal à se projeter et se sont rendues compte que les différences de salaire n’étaient pas négligeables. Un fossé s’est creusé : dans un même service, des personnels avec le même diplôme, effectuant le même travail, n’ont pas le même salaire.
Le ministère s’était engagé à ce que le choix se fasse de manière éclairée, que les établissements informent les agents sur leur situation future en B ou en A. Cela a été fait à certains endroits – parfois de façon partielle – et pas à d’autres. Notamment dans les maisons de retraite où il n’y avait pas beaucoup d’agents concernés, ou dans les petits établissements où les syndicats étaient peu présents et les administrations dépassées. Dans mon établissement, le syndicat a organisé une vingtaine de réunions d’information. On s’est bien gardé de dire au personnel d’opter pour une catégorie, parce qu’il y avait une part de choix personnel. Mais ailleurs, des syndicats ont orienté les gens vers la caté?gorie B pour faire pression sur le Gouvernement et garder le dispositif de reconnaissance de la pénibilité. Dire à une IDE de 30-35 ans de rester en B, c’était une erreur. Cela signifiait intégrer un corps en voie d’extinction et s’exclure de toutes les avancées futures, telle le PPCR
Ce protocole proposait des grilles avec des avancées financières non négligeables. Dans le contexte de la crise de 2008, pour les IDE qui n’avaient pas eu de revalorisation substantielle depuis 1988, cela assurait des augmentations sur plusieurs années. Le débat n’a pas été simple au sein des syndicats. Certains estimaient que ce n’était pas si mal. Les IDE ont été la première profession à intégrer le dispositif LMD
Nous avons formulé une demande au sein du conseil supérieur de la fonction publique. La DGOS nous a répondu qu’il était juridiquement impossible de rouvrir le droit d’option. Mais certains professeurs des écoles auraient eu cette possibilité en passant des concours spécifiques. C’est une piste que l’on va explorer. L’inverse, un passage du A au B, serait en revanche impossible.
Il faut reconnaître la pénibilité dans la catégorie A, d’autant que les conditions de travail à l’hôpital se sont dégradées ces dernières années. Le ministère de la Fonction publique devait nous proposer un calendrier, mais on ne voit rien venir. Et en septembre, avec le début de la campagne présidentielle, tout sera bloqué…
Cette proposition de FO nous fait un peu sourire. La CNI a été la première à dénoncer le texte dès son examen. On aurait bien aimé que les grandes centrales syndicales se manifestent… Plutôt qu’accorder un droit de remords à celles qui en font la demande, nous revendiquons la reconnaissance de toutes les IDE en catégorie A, avec le maintien de la notion de pénibilité.
En 2010, on a dit que ce texte était un abandon de la profession. L’âge de départ à la retraite a été repoussé de 7 ans ! La revalorisation salariale n’était pas du tout à la hauteur d’une vraie catégorie A type. Par la suite, l’augmentation des cotisations re?traite a annulé ce petit bénéfice. On a diffusé des communiqués, appelé à des manifestations. Mal?heureusement, la mobilisation a été médiocre… Aujourd’hui, nous avons beaucoup de demandes de jeunes IDE restées en catégorie B parce que mal informées, parce qu’elle n’ont eu que six mois pour se positionner, parce qu’elles n’ont pas bénéficié de simulations retraite. Les DRH, débordés, ont accordé la priorité aux plus âgées. Beaucoup d’IDE ont choisi la B par défaut. Elles réalisent aujourd’hui qu’elles vont arriver à l’échelon terminal alors qu’il leur reste pas mal de temps à travailler et qu’elles n’auront jamais les annuités pour partir à 57 ans. Quitte à travailler jusqu’à 60 ans pour avoir une retraite à taux plein, mieux vaut la catégorie A…
Ce n’est pas à la hauteur de la dégradation du pouvoir d’achat depuis le gel du point d’indice en 2010. C’est surtout un effet d’annonce : les premiers gains indiciaires proviennent du transfert des primes dans le traitement de base. Les revalorisations s’étalent jusqu’en 2020… Que se passera-t-il après l’élection présidentielle ? Par ailleurs, cette réforme allonge les carrières, pour les calquer sur la durée de cotisation.
Cette réforme restera comme la plus injuste pour la profession. Il n’y a pas eu le financement nécessaire pour accompagner la réforme des études : les Ifsi en ont souffert et dans les services, très peu de tuteurs de stage ont été détachés… Avec les plans de retour à l’équilibre, il est prévu que ces IDE soient réintégrées dans les services. Ce sera par exemple le cas à l’AP-HM. Quant aux spécialisées, seuls les Iade ont réussi à obtenir un grade master, mais la grille indiciaire ne suit pas. Les Ibode et les puéricultrices attendent toujours leur réingénierie.
On ne voit rien venir pour prendre en compte les souffrances du personnel. Les chiffres de l’absentéisme sont très médiatisés. Une IDE de 60 ans qui travaille dans des services durs, on trouve ça normal qu’elle s’arrête pour des petits problèmes physiques… Rien n’est prévu en fin de carrière pour ces personnels vieillissants. Nous souhaitons le rétablissement d’une majoration d’assurance : un an pour cinq ans, comme pour les gardiens de prison. Madame Bachelot a fait sa réforme. Cela dit, celle qui criait à l’injustice à l’Assemblée nationale à l’époque, qui relayait nos revendications, est devenue ministre de la Santé et n’a rien fait pour changer la donne.
1- L’accord sur la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations (PPCR) prévoit une revalorisation des paramédicaux de catégorie A à l’horizon 2019. Pour en savoir plus, lire notre article daté du 8 février sur Espaceinfirmier.fr.
2- Licence master doctorat.
SECRÉTAIRE FÉDÉRAL FO SANTÉ
→ 1986 : diplôme d’infirmier de secteur psychiatrique
→ 1986-1996 : ISP au CHS de Sarreguemines (Moselle) ; milite à Force ouvrière (FO)
→ Avril 2016 : élu secrétaire fédéral
VICE-PRÉSIDENT DE LA CNI
→ 1989 : DE d’infirmier
→ 1990-2008 : IDE en réanimation à l’Assistance publique-hôpitaux de Marseille, dont il est membre du conseil de surveillance
→ 2008 : temps plein syndical à la Coordination nationale infirmière, dont il est élu vice-président en 2009
→ Protocole. Porté par Roselyne Bachelot, le protocole d’accord du 2 février 2010 visait à octroyer des avancées statutaires aux IDE de la FPH. Il ouvrait un droit d’option : intégration dans la catégorie A avec trois revalorisations salariales jusqu’à 2015 et recul de l’âge de départ de la retraite à 60 ans (contre 55) ou maintien d’un départ anticipé à la retraite à 57 ans dans la catégorie B. À compter de 2012, les nouvelles diplômées sont intégrées à la catégorie A, avec un départ à la retraite à 62 ans. Le texte a été signé par le seul Syndicat national des cadres hospitaliers.
→ Droit d’option. Seules 75,62 % des 199 564 IDE concernées ont exprimé leur choix, les autres étant automatiquement reclassées en B. 52,3 % des IDE (85 % des 20-29 ans) ont choisi la A.
→ Extinction. D’après les estimations du ministère de la Santé, environ 76 000 IDE seraient en catégorie B en 2016. Leur moyenne d’âge est de 51 ans. Une grande partie aura quitté le corps d’ici 15 ans.