L'infirmière Magazine n° 373 du 01/07/2016

 

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Je m’appelle Étienne, je suis infirmier dans le Grand Nord québécois. Il n’y a pas de médecin permanent dans le petit village isolé où je travaille. Il y a bien la visite médicale, deux jours par mois, mais sinon c’est à l’infirmier en poste de gérer les consultations, les gardes et les urgences. En tant qu’infirmier en dispensaire, je dois être en poste et disponible24 heures sur 24, 7 jours sur 7, pendant deux mois… suivis de deux mois de vacances bien méritées !

J’ai fait mon métier de travailler dans les endroits isolés du Québec, notamment dans les communautés inuites et cries du Grand Nord. Vivre et dispenser des soins infirmiers dans ces régions éloignées nous amènent à repousser nos limites, à développer une autonomie que peu d’infirmiers connaissent et à pratiquer une médecine propre à la réalité des milieux isolés.

On finit par tomber amoureux de ces grands espaces et de ces gens vivant en cette nordicité si magnifique. Une qualité qui définit bien les populations de ces petits villages nordiques est leur accueil chaleureux, eux qui vivent pourtant dans un climat de froid extrême. Peut-être est-ce dû à la promiscuité dans laquelle on vit ici. Il règne une ambiance familiale dans ces petites communautés, comptant parfois à peine plus de 200 personnes. Alors que dans une grande ville, je me sens souvent perdu, ici, je me suis senti adopté. Tout le monde se connaît. Tous s’entraident dans les moments difficiles, ce qui renforce encore les liens. Dispenser des soins dans ce genre d’environnement est donc très particulier et très valorisant.

Ici, je suis ce qu’on appelle un infirmier en « rôle élargi ». En somme, comme il n’y a pas de médecin sur place, je réalise des actes qui leur sont habituellement réservés et auxquels j’ai été formé : examen physique, diagnostic, traitement, suture de plaies, accouchement en urgence, etc. Comme je suis le seul personnel soignant sur place, je me dois de gérer toutes les urgences. Bien sûr, j’ai la possibilité de téléphoner à un médecin si j’ai besoin de conseils pour soigner un cas difficile ou évacuer un patient par hélicoptère. Notez tout de même que le médecin se trouve souvent dans un centre hospitalier à deux heures d’avion de ma clinique… Vous aurez compris qu’il faut avoir confiance en ses capacités de soignant. Le travail d’infirmier en rôle élargi au Québec est, sans aucun doute, une pratique infirmière « extrême » !