Arrêter de fumer trois paquets de cigarettes par jour en faisant une cure de baclofène, décontractant musculaire originellement utilisé contre la sclérose en plaques et popularisé comme traitement contre l’alcoolisme. C’est ce qu’Alix de Saint-André expérimente en 2008 dans sa maison des bords de Loire où elle se réfugie pour écrire. Entamée sous les auspices d’une spécialiste des addictions pour vérifier si la fameuse théorie d’Olivier Ameisen, cardiologue aujourd’hui décédé, peut s’appliquer au tabagisme, la thérapeutique vire à l’enfer. Le traitement « miracle » n’a de miraculeux qu’une flopée d’effets secondaires et d’états extrêmes. Hallucinations, excitation, aucune sensation de faim, de soif, de sommeil ! Si le médicament, auto-administré quotidiennement à fortes doses en adaptant un protocole utilisé dans des modèles animaux, a guéri à l’époque Olivier Ameisen d’un alcoolisme chronique, pour l’ex-chroniqueuse de Nulle part ailleurs, c’est la débandade. « Que m’est-il arrivé ? Ni burn-out, ni dépression… Cette question me préoccupe moins que celle de ma mission divine, qui a envahi toute la place. » Elle a beau prendre des notes sur les dosages et écrire sur ses délires, elle finit par être admise dans une clinique psychiatrique pour se désintoxiquer. Quelques mois plus tard, elle tombe sur un rapport d’un institut médical de New Delhi faisant état des effets secondaires dont elle a été victime, soit d’une « psychose induite par la prise de baclofène » oubliée des notices. « J’ai bien fait de guérir. Un cobaye mort n’est pas un bon cobaye. » Récit d’une descente aux enfers.
L’angoisse de la page folle, Alix de Saint-André, Éd. Gallimard, 21,50 €