« DITES QUI VOUS ÊTES ! » - L'Infirmière Magazine n° 378 du 01/01/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 378 du 01/01/2017

 

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Clarisse Briot  

Clarification des missions, amélioration de la formation et des conditions de travail, management d’équipe… Tels sont les enjeux débattus, fin novembre à Paris, lors des Assises nationales des infirmières coordinatrices (Idec).

Dites qui vous êtes et ce que vous faites ! » Lancée par le Dr Florence Barthélémy, coordinatrice du DU d’infirmière référente à l’université Descartes à Paris, l’interpellation reflète un sujet récurrent chez les Idec : la clarification de leurs missions. Un combat pour une meilleure reconnaissance dont la jeune Fédération française des infirmières diplômées d’État coordinatrices (FFIDEC) compte pleinement se saisir. « Il est essentiel d’établir une fiche de fonctions commune à tous les établissements, a martelé Joëlle Sicard, membre du bureau national. C’est un défi loin d’être impossible. Ces fiches doivent venir du terrain. Il faut y travailler ensemble, avec les directeurs d’établissements, les organismes de formation etc. »

« 50 agents à gérer »

En Ehpad par exemple, en l’absence de texte réglementaire, leurs missions varient d’un établissement à l’autre. « 30 % des infirmières que nous avons interrogées n’ont pas de fiche de poste à leur entrée en fonction, a indiqué Karine Leveugle, consultante, qui a mené l’enquête sur les conditions de travail des Idec. Certaines m’ont confié contrôler le travail du jardinier, remplacer le technicien de maintenance…. Dire qui vous êtes, c’est en effet fondamental ! » Le flou pénalise aussi les professionnelles sur le plan salarial. Elles touchent en moyenne 33 000 € brut annuel, contre 51 000 € pour un cadre intermédiaire dans l’industrie, alors même qu’elles ont 20 personnes en moyenne sous leur responsabilité, contre 11 dans le secteur industriel. « Pour ma part, j’ai non pas 20, mais 50 agents à gérer, a témoigné Véronique, Idec dans un Ehpad public. En attendant d’avoir un statut et une reconnaissance, on coûte moins cher et on nous le fait savoir ! »

Projet de DU en gérontologie

La clarification des missions est aussi un préalable à l’évolution des formations. Selon la même enquête, parmi le faible pourcentage d’Idec ayant suivi une formation spécifique, 45 % ont bénéficié d’une formation continue… de 6 jours et demi seulement. « Les formations ont le mérite d’exister, a reconnu Joëlle Sicard. Mais il faut débattre du contenu. Les professionnelles attendent des outils concrets sur l’hygiène, la prévention des chutes, la préparation à une évaluation interne, externe, la participation au Pathos(1), l’élaboration de GIR justes etc. » Elles souhaitent aussi être parties prenantes de la construction de ces contenus.

La présidente de la FFIDEC, Blandine Delfosse, a ainsi annoncé sa volonté d’écrire et de porter le projet d’un DU en gérontologie. Quant aux autorités, elles semblent progressivement s’impliquer dans l’offre de formation. Brigitte Sury, responsable de la formation continue des instituts de formation du CHU de Poitiers, est venue témoigner de la dynamique engagée avec l’ARS depuis trois ans en Nouvelle Aquitaine.

Central dans les missions des Idec, le management d’équipe doit aussi l’être dans les formations, a de son côté souligné Yves Clercq, responsable de formation à l’Institut Meslay (Vendée). « Il y a aujourd’hui une carence en management de proximité, a-t-il expliqué. Les directions, prises dans des fonctions globales, s’éloignent du terrain. Ce sont les Idec qui accompagnent les équipes et les familles au quotidien et assument tous les gestes qui apportent du sens au travail, dans un contexte de “gestionnite” donnant le sentiment aux professionnels d’être des pions. » Et de déplorer que dans nombre d’Ehpad, les Idec se retrouvent « happées par la machine à gestion et les plannings ».

Cette dernière tâche absorbe souvent plus de la moitié de leur temps de travail. « Il n’y a pas de recette unique, a insisté le formateur. Il faut inventer les outils de management qui correspondent à chaque réalité. » Parmi les solutions abordées, le management participatif qui favorise l’écoute et les temps d’échanges.

1- Le Pathos est actuellement le modèle retenu pour effectuer l’évaluation des besoins en soins requis au sein des Ehpad.