L'infirmière Magazine n° 379 du 01/02/2017

 

FORMATION

OUTILS

Anne-Gaëlle Moulun  

Nouveaux capteurs de contrôle glycémique, lecteurs connectés et bientôt pancréas artificiel se développent, tandis que les applications pour smartphone se multiplient. Tour d’horizon avec le Dr Sylvia Franc, endocrinologue et vice-présidente du CERITD(1)

Des capteurs toujours plus performants

La diabétologie a connu récemment de nombreuses avancées, à l’image des holters glycémiques qui donnent la mesure en continu du glucose. « C’est très utile pour les personnes qui ont du mal à effectuer les contrôles glycémiques par exemple », estime Sylvia Franc, endocrinologue au Centre hospitalier sud francilien (CHSF), à Corbeil-Essonnes (91).

→ Il est également possible de coupler ces capteurs de glucose à certaines pompes. Le taux de glucose est enregistré en permanence, toutes les 5 minutes. « En fonction de la courbe des mesures, le système peut prédire une hypoglycémie et régler l’administration d’insuline, ce qui va limiter la durée de l’hypo. Un système très intéressant pour des patients qui ne ressentent pas bien leur hypoglycémie. »

→ Le développement du lecteur de glycémie FreeStyle libre(2) représente, lui aussi, un réel progrès : « Grâce à une rondelle sur le bras, avec une petite canule sous-cutanée, le patient peut se scanner, comme on fait un scan au supermarché, et voir s’afficher son taux de glucose. Il n’a plus besoin de se piquer le bout du doigt. » Une application téléchargeable sur le smartphone permet de récupérer les données. Chaque rondelle dure 15 jours et ne nécessite aucun calibrage. Seul bémol : ces innovations ne sont pas encore prises en charge par la Sécurité sociale. « Un holter, par exemple, c’est 60 € pour 6 jours et une rondelle, 60 € pour 15 jours. Ça ne peut pas encore passer dans l’usage courant. »

→ Autre innovation de taille : le pancréas artificiel. Un capteur de glucose collecte les données, les transmet à un smartphone qui va les analyser et commander la pompe qui va administrer la dose. « Le projet Diabeloop, encore à l’étude, est très prometteur. »

Télésuivi

Parmi les innovations, le Dr Sylvia Franc cite également les lecteurs connectés, qui permettent de recueillir des données et d’effectuer un télésuivi des patients. « Dans le cadre d’une étude, nous travaillons sur le système Diabéo. Il s’agit d’une application smartphone qui offre une aide au calcul en temps réel des doses d’insulines. Et nous pouvons être alertés en cas d’hypo- ou d’hyperglycémie. »

Enfin, la télémédecine est en plein développement. Une nouvelle façon de prendre en charge les patients, indispensable pour l’endocrinologue : « Nous avons actuellement des délais de consultation de 8 mois et nous ne pouvons pas suivre tous les patients. La télémédecine permettrait d’améliorer le suivi et d’éviter que les diabétiques mal contrôlés ne se retrouvent aux urgences. »

1- Centre d’études et de recherches pour l’intensification du traitement du diabète.

2- Lire aussi l’article sur ce lecteur dans le n° 372 de L’Infirmière magazine, p. 38.

SUR LE TERRAIN

Du côté des patientset des soignants

→ Les patients réservent un accueil très positif à ces nouvelles technologies. « Les innovations sont très attendues par les patients, qui sont très partants pour les tester. Ces derniers sont à l’affût de tout ce qui peut simplifier leur quotidien. Ils nous interrogent sur les applications, mais cherchent aussi beaucoup par eux-mêmes. Souvent, ce sont eux qui nous informent d’applications nouvelles ! », relève le Dr Sylvia Franc, endocrinologue au CHSF, à Corbeil-Essonnes (91). Mais attention, « il y a énormément d’applications, plus ou moins fiables. Désormais, des structures cherchent à évaluer les outils connectés qui sortent. L’Association française des diabétiques (AFD) a ainsi créé un laboratoire d’évaluation d’outils technologiques. L’autre limite, c’est la masse de données générées. Il faudra des systèmes pour les analyser, sinon on risque de crouler sous leur poids ! »

→ Et côté soignants ? « Ces nouveaux outils demandent un changement de pratique. Nous n’avons pas forcément la culture pour faire de la télémédecine, ou regarder des données toute la journée sur notre ordinateur. Il faut aussi qu’on ait du temps pour appeler les patients et que l’on puisse intervenir au bon moment. Il faut que ce soit reconnu comme une activité à part entière, rémunérée et organisée. C’est la vraie conditionpour que cela fonctionne de façon durable. »