L’accompagnement infirmier - L'Infirmière Magazine n° 381 du 01/04/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 381 du 01/04/2017

 

FORMATION

PRISE EN CHARGE

M. F.  

Retour d’expérience dans le service des maladies neurométaboliques de l’hôpital Necker-Enfants malades (AP-HP), qui s’occupe chaque année d’une quinzaine d’enfants atteints d’AVC.

Réaliser les évaluations

→ Fonctions vitales, signes neurologiques, conscience. En première intention, le travail de l’IDE repose sur la surveillance des fonctions vitales par scope, l’évaluation neurologique et de l’état de conscience de l’enfant. Une évaluation plus complexe que chez l’adulte, car les critères pris en compte peuvent être très différents en fonction de l’âge de l’enfant et de sa capacité à comprendre et à s’exprimer. « Ne disposant pas d’échelle spécifique(1), nous réalisons cette évaluation au cas par cas, à partir d’un certain nombre de signes – pleurs, cris, altération des réflexes à la marche, à la préhension, déficit focalisé sur un côté, un membre, une partie du visage… – et des observations réalisées par la famille : changements de comportement (agressivité, anxiété), déficit moteur (incapacité à tenir le biberon ou à lever la jambe par ex.), troubles du langage, de la déglutition… », expliquent Théo Teng et Virginie Le Strat, IDE dans le service des maladies neurométaboliques de l’hôpital Necker-Enfants malades (AP-HP). Ces observations sont consignées par écrit dans les transmissions infirmières, partagées chaque jour avec le médecin lors de la visite du matin, des examens successifs en journée et de la contre visite réalisée en fin d’après-midi.

→ État nutritionnel, troubles de la déglutition. Les IDE évaluent également l’état nutritionnel de l’enfant qui est pesé à son arrivée, puis tous les matins, afin de dépister rapidement une éventuelle dénutrition. « Cette évaluation est d’autant plus importante qu’il existe des troubles de la déglutition. Ceux-ci sont évalués en lien avec l’ergothérapeute et le kiné afin de mettre en place rapidement les modalités d’alimentation adaptées et la surveillance requise au moment des repas. » Les IDE veillent à l’installation de l’enfant en position de sécurité (assise) et prennent le temps de le faire manger afin d’optimiser son alimentation tout en limitant les risques de fausses routes.

Prévention et accompagnement

→ Prévenir la douleur des soins. Toutes les techniques susceptibles de limiter la douleur liée à l’inconfort, la fièvre ou les soins sont mises en place (Doliprane, patch d’Emla, Meopa(2)), car celle-ci peut favoriser, au même titre que la peur de l’hôpital, des blouses blanches, des piqûres ou de la séparation des parents, une hypertension intracrânienne qui risque non seulement d’occasionner elle-aussi des douleurs, mais aussi d’entraîner des crises d’épilepsie.

→ Prévenir le risque d’escarre. Les enfants atteints d’une hémiplégie importante consécutive à l’AVC sont d’emblée alités sur un matelas anti-escarre.

→ Stimuler la récupération. Deux fois par jour, ils bénéficient de séances de kiné respiratoire et de kiné motrice, tant pour éviter les mauvaises postures que pour être stimulé sur le plan locomoteur. Au cours des soins, de l’alimentation, mais aussi pendant les jeux – élaborés au cas par cas par les ergothérapeutes et les kinés –, les IDE veillent également à stimuler la main, le membre ou le côté héminégligent en faisant participer l’enfant le plus possible afin d’éviter les rétractations et de corriger les positions vicieuses qui pourraient, à terme, constituer un déficit durable. Si nécessaire, certains peuvent bénéficier de la pose d’attelle ou d’une installation particulière.

→ Accompagner les familles. « La perte plus ou moins importante des acquisitions est une source d’anxiété pour l’enfant et les parents et un aspect majeur de la prise en charge post-AVC. » Il faut rassurer aussi bien l’enfant que les parents, qui s’inquiètent légitimement de son devenir et des risques de handicap. « C’est une question récurrente face à laquelle il est souvent impossible de répondre, mais qui impose néanmoins de ne pas laisser les parents dans l’incertitude totale, commentent les IDE. Nous essayons de les rassurer en leur indiquant qu’un enfant récupère toujours plus vite qu’un adulte, que leur enfant est dans un service spécialisé qui met tout en place pour stabiliser, améliorer et stimuler sa récupération, mais qu’il est très difficile de se prononcer sur l’avenir, à cette phase précise de la prise en charge. Pour qu’ils se sentent utiles, nous les invitons à se focaliser sur tout ce qu’ils peuvent faire pour favoriser la récupération de l’enfant, à commencer par le laisser faire ou l’aider à faire plutôt que de faire à sa place… »

1- Une version pédiatrique en français du score NIHSS (National Institute of Health Stroke Score) est en cours de développement. Chez l’adulte il permet d’évaluer la gravité de l’AVC.

2- Utilisé pour détendre l’enfant pendant les soins, le mélange équimolaire oxygène protoxyde d’azote (Meopa) est utilisable chez les enfants dont il est possible d’évaluer la conscience.