L’INVITÉ
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Le mardi, je fais des consultations dans un foyer d’hébergement pour adultes handicapés mentaux. J’y rejoins Claire, l’infirmière. À mon arrivée, Juliette fait le pied de grue devant le bureau. Elle dit qu’elle ne va pas bien et parle de son kyste au genou. Comme je ne semble pas réceptive, elle dit qu’elle tousse puis qu’elle a eu la diarrhée. Et rajoute qu’elle pense avoir vomi. Je promets de la voir.
Jean-Paul doit avoir mal à la jambe, au dos ou au bassin. En fait, on n’en sait rien. Il boîte depuis trois jours, mais personne ne sait pourquoi. Il ne parle pas et ne sait pas me dire s’il souffre. Pendant que j’examine son dos, Claire tente de repérer sur son visage un rictus qui pourrait indiquer une zone douloureuse. On ne trouve rien. On décide de lui donner des antalgiques et de laisser des consignes aux éducateurs. Régis a mal au ventre et a vomi. C’est compliqué de le soigner, car il panique dès qu’on le touche. Je parviens à glisser mon stéthoscope sous ses vêtements, mais il l’arrache au bout de deux minutes. Dans le doute, je prescris une échographie. Pendant que je range le matériel, Juliette fait une nouvelle tentative, toujours infructueuse.
Arrive Robert. Il a une grosse verrue plantaire avec un cal qui se reconstitue régulièrement. Il ne veut plus qu’on y touche. Après une longue négociation, il enlève chaussure et chaussettes. Les éducateurs opteraient pour un anxiolytique avant les séances de pédicure, mais son traitement est déjà bien chargé. Est-ce qu’une ablation complète ne serait pas la solution ? La question est toujours en suspens quand entre Juliette. Cette fois, c’est son tour. Elle se plaint de maux de gorge et a oublié les soucis décrits au début. Je la rassure : oui, je suis disponible mais non, pas quand elle veut. Elle demande des médicaments, en veut toujours plus. On négocie un moment.
La famille de Claude me demande de remplir un dossier médical pour la maison départementale des personnes handicapées. Je ne l’ai jamais vu et il ne se plaint de rien. Or, le dossier demande des détails sur ses capacités au quotidien. Seul l’éducateur peut dire s’il sait couper sa viande tout seul ou s’il a des difficultés de préhension sur sa main dominante. Sur son dossier, il est indiqué « surdi-mutité ». Claire lui pose des questions en étant de face, puis en se cachant la bouche. Il ne répond pas si elle la masque. On remplit le dossier et Claude lance un « R’voir ! » en partant. Un café et quelques papiers plus tard, on prépare une partie du programme de la prochaine venue, car le mardi, c’est Adapei(1)!
1- Association départementale de parents et amis de personnes handicapées mentales.