La mode du selfie se répand dans les blocs opératoires italiens… Au grand dam des autorités.
Un smartphone, un bistouri, on sourit, et clic ! La photo est immédiatement postée sur les réseaux sociaux. Les soignants italiens sont de plus en plus nombreux à s’immortaliser en pleine action, ce qui peut parfois choquer le public. En juillet dernier, par exemple, deux médecins de Pérouse ont déclenché l’indignation générale en posant devant un patient qui allait mourir de complications opératoires quelques jours plus tard. Inacceptable pour l’opinion pu?blique transalpine. « Cette mode a vraiment démarré de manière significative il y a moins de deux ans », raconte Barbara Mangiacavalli, présidente de la Federazione nazionale collegi infermieri professionali, assistenti sanitari, vigilatrici d’infanzia – la fédération nationale des collèges Ipasvi –, l’équivalent de notre Ordre infirmier. « C’est strictement interdit par la loi, par les différents codes de déontologie, mais aussi par l’éthique personnelle des soignants », ajoute-t-elle.
Problèmes de secret médical, de respect de la dignité de la personne, d’altération de la relation soignant-soigné… Les difficultés posées par cette nouvelle mode sont en effet nombreuses. « Ces selfies offensent la dignité des malades », tonnait d’ailleurs la ministre italienne de la Santé dans une lettre adressée en avril dernier à l’Ordre des médecins pour réclamer des sanctions. Mais Barbara Mangiacavalli explique qu’elle n’a pas attendu les instructions ministérielles pour sévir. « Nos sections locales ont toujours puni ces pratiques, et les sanctions vont être intensifiées », annonce-t-elle.
Mais le selfie au bloc est loin d’être une spécialité italienne. Aux États-Unis, en Suisse, en Corée et même en Chine, des polémiques émergent régulièrement sur le même sujet. Une épidémie mondiale qui n’épargne pas notre pays. « La mise en scène par des selfies dans le cadre professionnel est une théâtralisation publicitaire interdite en France par le code de déontologie médicale », tient d’ailleurs à rappeler le Dr Jacques Lucas, vice-président du Conseil national de l’Ordre des médecins en charge des questions numériques. Voilà qui est dit !