L'infirmière Magazine n° 383 du 01/06/2017

 

VACCINATION

ACTUALITÉS

FOCUS

Sandra Mignot  

Le calendrier vaccinal 2017 a été publié le 24 avril à l’occasion de la semaine européenne de la vaccination. Surprise : il ne tient pas compte de la concertation citoyenne mise en œuvre par Marisol Touraine entre 2015 et 2016.

Le nouveau calendrier vaccinal(1) est paru. Principale nouveauté : la recommandation d’une immunisation aux papillomavirus humains (HPV) chez les jeunes hommes ayant des relations homosexuelles jusqu’à 26 ans. Le reste concerne l’âge de certaines primovaccinations (BCG au cours du 2e mois sauf cas particuliers, infections invasives à méningocoque dès 5 mois avec une 2e injection à 12 mois), la précision, voire la simplification, des schémas d’administration (infections à pneumocoque, varicelle dans l’entourage d’un malade…) ou la proposition d’alternatives en cas de difficultés d’approvisionnement (coqueluche, hépatites, BCG…). Au-delà des polémiques, la recommandation de vaccination contre l’hépatite B est maintenue, dès l’âge de 2 mois, et jusqu’à 15 ans. Elle n’est ensuite recommandée que chez les personnes à risque. Enfin, une liste de personnes prioritaires est dressée en cas d’impossibilité de répondre à l’ensemble des demandes de vaccination : les enfants nés en Guyane et à Mayotte plutôt que ceux vivant en région parisienne, les moins de 5 ans avant les plus âgés, etc. L’immunisation contre le rotavirus, la varicelle ou le méningocoque B ne figurent toujours pas dans les recommandations du calendrier.

Absence d’obligation…

Les seules obligations demeurent la primovaccination infantile contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite (DTP), ainsi que ses rappels, et, côté professionnels de santé, les vaccins contre l’hépatite B, la rougeole, les oreillons, la rubéole (ROR) et le BCG. Rappelons que l’impératif d’immunisation contre la tuberculose a été levé en 2007. Pedro Conches, infirmier de santé publique à l’ARS Bourgogne Franche-Comté, s’alarme du niveau de contrainte qui lui semble insuffisant : « En termes de santé publique, je pense que l’on devrait rendre obligatoire la vaccination contre la grippe des personnels travaillant auprès de personnes âgées, car c’est efficace. Avec ce qui s’est passé cette année, les 15 000 morts excédentaires, et l’épidémie dans l’Ehpad lyonnais, nous n’aurions pas dû passer à côté. » Et le spécialiste de rappeler les risques liés à la coqueluche ou à la varicelle : « Santé publique France s’attend à une nouvelle épidémie de rougeole dans les années à venir, comme celle qui a sévi entre 2008 et 2012. Alors pourquoi ne pas imposer le ROR, au moins temporairement ? »

Une obligation qui avait été réclamée pour huit pathologies(2) dans le rapport final émis par la Concertation citoyenne mise en œuvre par le ministère de la Santé, l’hiver dernier. Or, le calendrier 2017 ne se fonde que sur les recommandations du Haut conseil de la santé publique (HCSP). « On nous explique que l’absence d’obligation est déjà le cas dans nombre de pays du nord de l’Europe, poursuit Pedro Conches. Certes, mais dans notre pays, la santé est fortement basée sur une attitude curative. Donc, si quelque chose n’est pas obligatoire, on ne le fait pas, tout simplement. » En France, des études ont en effet montré que moins de 85 % des médecins continueraient à recommander la vaccination DTP si celle-ci n’était plus obligatoire. Et que moins de 80 % des parents feraient certainement ou probablement vacciner leurs enfants, si la contrainte était levée. De quoi ouvrir encore plus largement les mailles du filet de protection.

1- Ministère de la Santé (bit.ly/2oLlEJH).

2- Coqueluche, virus de l’hépatite B, bactérie Hæmophilus influenzæ, pneumocoque, méningocoque C et les virus de la rougeole, des oreillons, de la rubéole.

ENQUÊTE

Des Français peu à jour

34 % des femmes et 43 % des hommes ne savent pas s’ils sont à jour de leurs vaccinations, révèle une enquête réalisée par la plate-forme de prise de rendez-vous médicaux mondocteur.fr. « Cela ne me surprend pas. Il s’agit de pathologies quasi disparues et il est normal que les gens ne s’en souviennent pas. Et puis, c’est au professionnel de santé d’assurer le suivi », observe Pedro Conches, IDE de santé publique à l’ARS Franche-Comté. En revanche, le fait que 18 % des femmes et 20 % des hommes aient égaré leur carnet de santé est plus inquiétant, d’autant que la tendance s’accentue avec l’âge : 26 % des 35-49 ans contre 56 % des 50-64 ans et 66 % des 65 ans et plus. « D’où l’intérêt de développer rapidement un carnet de santé électronique », observe l’infirmier. Par ailleurs, seuls 56 % des femmes et 50 % des hommes se disent à jour de leurs rappels vaccinaux.