L'infirmière Magazine n° 388 du 01/12/2017

 

FORMATION

L’ESSENTIEL

Claire Manicot  

Estimer le nombre de personnes séropositives, celles ignorant leur séropositivité et connaître leurs profils et leurs pratiques est indispensable pour adopter une stratégie de dépistage. État des lieux.

En France, on estime le nombre de personnes porteuses du VIH à 153 400, dont près de 25 000 ignorent leur séropositivité. L’incidence de l’infection au VIH est stable sur la période 2011-2015, après avoir baissé entre 2004 et 2007. En 2015, 6 000 personnes ont découvert leur séropositivité : 70 % sont des hommes, 12 % ont moins de 25 ans, et 19 % plus de 50 ans. Par ailleurs, 52 % des personnes nouvellement diagnostiquées étaient nées en France (52 %), 31 % en Afrique sub-saharienne, 8 % sur le continent américain, 4 % en Europe en dehors de la France et 5 % ailleurs dans le monde.

→ Des disparités géographiques : 42 % des découvertes de séropositivité sont concentrées en Île-de-France et 8 % dans les départements d’outre-mer. Le nombre total de découvertes de séropositivité, rapporté à la France entière, est de 89 par millions d’habitants. Comparativement, il est beaucoup plus important en Guyane (743), Guadeloupe (342), Martinique (214) et Île-de-France (208). Viennent ensuite les régions Provence-Alpes-Côte d’Azur (85) et le Centre-Val de Loire (73).

→ Une contamination stabilisée : d’année en année, on observe une diminution des découvertes de séropositivité chez les hétérosexuels hommes ou femmes, nés en France ou à l’étranger, représentant 54 % des nouveaux cas. En revanche, elles ne diminuent pas chez les HSH (hommes ayant des rapports avec les hommes) avec 43 % de nouveaux cas, et se stabilisent chez les usagers de drogues injectables (2 % des cas). Parmi les HSH, les jeunes de 15-24 ans, avec 15 % des découvertes (contre 8 % chez les hétérosexuels), sont particulièrement touchés. Par ailleurs, les femmes nées à l’étranger représentent toujours une part importante des nouveaux diagnostics (23 % des cas).

→ Des diagnostics à un stade tardif : en 2015, 39 % des découvertes de séropositivité étaient précoces (stade de primo-infection ou CD4 ≥ 500/mm3 en l’absence de pathologie sida) et 43 % tardives (stade sida ou CD4 ≤ 350/mm3 en dehors d’une primo-infection). Plus d’un quart des diagnostics étaient réalisés à un stade avancé de l’infection et concernaient surtout les personnes de plus de 50 ans et les hommes hétérosexuels, qu’ils soient nés en France ou à l’étranger.

→ Une recrudescence des IST : en 2015, les cas de syphilis ont augmenté de 59 % par rapport à 2013 et 19 000 cas d’infections à gonocoque ont été estimés la même année. L’infection au chlamydia est l’IST la plus fréquente avec 81 000 cas recensés en 2015 (+ 10 % par rapport à 2013). Les HSH sont les plus touchés par la syphilis, l’infection à gonocoque ainsi que par le LGV (lymphogranulome vénérien) rectal. Le nombre de syphilis et gonococcies augmente chez la population hétérosexuelle.

→ Quelle prise en charge ? Parmi les 153 400 personnes séropositives, 84 % connaissaient leur infection, 90 % de ces personnes diagnostiquées étaient sous traitement ARV et 90 % de ces dernières avaient une charge virale contrôlée. L’OnuSida a fixé, pour cette cascade de prise en charge, des objectifs de 90/90/90, pour espérer enrayer l’épidémie en 2020. La France a donc des chiffres tout à fait honorables. L’effort doit porter sur les 16 % de personnes séropositives qui ignorent leur statut sérologique. L’effort doit être d’autant plus important que les délais entre contamination et diagnostic s’avèrent longs. Sur la période 2010-2013, le délai médian estimé était de 3,3 ans. Il était de de 4,4 ans chez les hommes hétérosexuels, 2,9 ans chez les femmes hétérosexuelles et les HSH. Le diagnostic tardif est une perte de chance pour l’individu et pour la collectivité. Il se traduit par une épidémie cachée, évoluant à bas bruit.

EN CHIFFRES

Le VIH dans le monde

→ En 2016, près de 37 millions de personnes vivent avec le VIH (dont 25 millions en Afrique).

→ Parmi celles-ci, 19,5 millions ont eu accès au traitement anti-VIH (contre 17,1 millions en 2015 et 7,7 millions en 2010).